24 - Les jardins

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     Le petit faune referma doucement la porte derrière lui et tendit l'oreille un instant pour être sûr que son maitre n'allait pas franchir la courte distance entre le lit et la porte de sa chambre pour vérifier qu'il était bien parti, puis, après avoir sourit un instant, il se mit à sautiller dans les larges couloirs. Il croisa plusieurs autres démons du palais, et ils se saluèrent tous d'un geste de la tête. Les plus anciens aimaient poser la paume de leur main sur les cheveux de Saty pour marquer leur affection, même s'ils savaient tous au fond que c'était le favori de Silcharde.

     Saty arriva devant la porte qui l'intéressait le plus. Une fois encore, il sauta pour attraper la poignée et se suspendit jusqu'à ce qu'elle s'ouvre. Il se dépêcha de sortir et referma rapidement la porte derrière lui ; il savait que de nombreux démons n'aimaient pas quand des papillons entraient à l'intérieur du palais.

      Dès l'instant où un Attacus atlas passa jusque au dessus de lui, Saty eu un grand sourire et il s'amusa à le suivre en sautillant pour essayer de l'attraper. Il n'y parvenait jamais et la seule fois où il y était parvenu était également l'unique fois où Silcharde l'avait puni. Mais bon, Silcharde était plutôt occupé, et personne n'était là pour lui faire la moindre remarque.

     Il arpenta les jardins, où il faisait toujours un temps idéal. Des bancs en bois étaient disposés un peu partout, et hormis le chemin fait de pavés en brique rouge, les jardins n'étaient fait que de d'herbe, de buissons ou d'arbres.

     Il n'y avait aucun oiseau, bien évidemment, sauf si on comptait les Charognards qui planaient dans le ciel, bien trop haut pour qu'il ne s'en prennent aux papillons. Saty arriva au milieu des jardins, qui était un peu en hauteur et qui comprenait une fontaine en pierre blanche. Tout autour volaient des papillons de toute sorte de forme, couleur et taille, et le petit faune sauta une dernière fois pour s'assoir sur un banc.

     Ses sabots ne touchaient pas le sol et il se mit à les balancer dans le vide, le regard fixé sur les papillons de nuit qui dormaient, posés sur le tronc d'un arbre. Il entendit un craquement qui lui fit tourner la tête et l'esclave humain baissa sa tête en marmonnant des excuses. Saty se redressa et lui accorda un regard mauvais, avant de faire un signe de la tête. L'esclave humain s'empressa de partir sans demander son reste.

     Saty avait envie d'être seul et ce n'était pas un esclave humain qui allait briser sa tranquillité. Le petit faune s'assura s'être seul et tenta une dernière fois d'attraper un agrias (sans succès, malheureusement) et il se dirigea vers la fontaine. Sans que personne ne le remarque, il sauta sur le rebord et évita de justesse de tomber dans la fontaine. Si ça avait été de l'eau, cela serait passé inaperçu, mais en l'occurence, ce n'était pas de l'eau. C'était un liquide noir et bien compact, qui remuait doucement et qui refléta son visage d'enfant lorsqu'il se pencha au dessus.

     Et en l'occurence, bien entendu, ce n'était pas une simple fontaine. Il porta son index sur la pointe de sa corne et il y planta la pulpe de son doigt, juste assez pour qu'une goutte de sang perle dessus. Sans trop attendre, il la laissa grossir un peu avant de faire tomber la goutte dans la fontaine.

« Maria Luciania, dit-il d'une voix intelligible.

     Aussitôt, l'eau noire se mit à remuer, d'abord doucement puis elle se mit à léviter pour former un cercle au niveau du visage de Saty. Le liquide noir commença à tourner et enfin, il réussit à apercevoir ce qu'il voulait : la femme dont lui avait parlé maitre Silcharde. Saty tendit l'oreille.

— ... aire quelque chose ! protesta Luciania.

     Elle semblait assez contrariée. Et il y avait de quoi, à vrai dire. Non seulement maitre Silcharde leur avait glissé entre les doigts, mais en plus de cela il avait emporté un humain avec lui, sous leurs yeux.

Roméo aux Enfers [MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant