Depuis mon arrivée dans la nouvelle ville qu'est Destinée, il ne m'est jamais arrivé de me réveiller avec la pluie. D'ailleurs, je crois que la douce mélodie que produit l'eau qui tombe du ciel va finir par me rendormir. Mon réveil a beau sonner depuis cinq bonnes minutes, je ne trouve nulle part la motivation de me lever. Je sais que je vais être en retard, que je vais devoir me dépêcher sous la douche alors que j'aime en profiter, mais cette fois mon lit me retient prisonnier. Je mets le dernier rappel que je peux me permettre avant d'enfoncer ma tête dans mon oreiller, allongé sur le ventre quand j'entends celui-ci vibrer. C'est avec les yeux à moitiés fermés que je découvre le message :
« Salut Gwen, désolé mais je ne peux pas aller en cours. »
Je fronce les sourcils. Qui est-ce ? Je regarde le messager : Julien. Voilà qui devient encore plus embêtant. Cette fois-ci je ne me rallonge pas, je m'effondre dans mon lit. Je laisse passer quelques secondes, le temps de rassembler toute ma motivation et mon énergie et je m'assois au bord du matelas. Je prends mon téléphone et le débranche. Il s'est assez rechargé, pas moi. Je relis le message. Pourquoi il ne peut pas venir ? Et s'il ne vient pas non plus demain, ou même les autres jours ? Et après-demain, il sera là ? Je jette mon portable dans mes couvertures. Je contemple ma porte, silencieux. Puis, je me laisse tomber en arrière en soufflant. Je me heurte à mon téléphone qui a dû glisser, exprime mon mécontentement et pense à Lucie. C'est quand même abattu que je me redresse et que je me dirige vers la porte de la salle de bain qui se referme après mon passage.
Je rabats ma capuche précautionneusement sur mes cheveux. J'ai horreur de les voir mouillés, c'est l'une des raisons qui fait que je déteste sortir sous la pluie. Et pourtant j'apprécie le bruit qu'elle fait lorsque les gouttes viennent s'écraser sur les vitres et les toits. Cela me procure un sentiment de bien-être intense. J'aurais aimé rester à la maison aujourd'hui. Me pelotonner dans ma couverture, sur mon tapis à poils longs qui recouvre un large espace autour de mon lit. M'installer comme ça, avec une tasse de chocolat chaud à regarder l'eau qui tombe goutte à goutte du ciel avant de se déverser sur mon mur de verre et d'atterrir sur le sol. Voir les arbres pleurer réellement sachant très bien qu'en leur centre tout demeurera sec...
Lucie m'adresse un signe devant la grille. J'accélère le pas. Suis-je déjà arrivé au lycée ? On dirait bien. C'est fou ce que le temps passe vite lorsque je suis en pleine réflexion. Mon amie me rejoint avant de me faire remarquer que nous commençons par sport aujourd'hui. Les joies du mardi... Ça m'est totalement sorti de la tête. Heureusement que je prépare mon sac la veille parce qu'autrement dit j'aurais, d'une, était très en retard, et de deux ça m'a au moins permis de ne pas oublier de mettre mes affaires de sport dans mon sac de cours. D'ailleurs c'est sûrement pour ça que je le trouve légèrement plus gros sans pour autant qu'il soit plus lourd. Nous ne passons donc pas par la grille habituelle. Comme j'ai pu l'apprendre la semaine dernière, la deuxième grille présente bien plus près pour moi nous emmène directement au gymnase. Lucie m'invite à la rejoindre, enfin elle me sort de mes rêveries quoi.
A l'intérieur des vestiaires c'est toujours la même histoire : se battre pour les places. C'est pour ça qu'on y va avant que ça sonne d'habitude, pour avoir une place. Mais bon, puisque je n'ai pas été très réactif ce matin, je dois me contenter de l'une des dernières places qu'il me reste. Oui, il y a deux vestiaires pour chaque genre. Je vais toujours, enfin pour la deuxième fois, dans la seconde pièce carrelée. Non pas que ce soit une habitude, quoiqu'en réalité c'en est une, mais c'est juste qu'il y a des visages que je ne veux pas voir dès le matin. Ryan Berti principalement. Rien que de penser à lui un rictus s'étire sur mon visage. Je n'ai pas encore ouvert la bouche de la journée. Mis à part pour respirer. Et je ne veux vraiment pas l'ouvrir pour lui. Le rapport ? Si j'avais été dans le premier vestiaire il aurait tout fait pour me chercher et me pousser à bout. C'est une crapule, un vicieux et je ne veux pas qu'il ait la moindre chance de me faire sortir de mes gonds. Surtout qu'aujourd'hui je ne suis pas si bien luné que ça. Surtout qu'aujourd'hui je suis... je suis seul. Julien n'est pas là pour me faire rire, il n'est pas là pour me motiver. Je ne bouge pas depuis un moment, mes pensées m'étreignent comme un nuage d'orage qui m'entoure, me prive et me coupe de la vie réelle. Seules mes pensées m'importent. C'est à cause du temps. En un sens, on pourrait dire qu'il a un impact sur mes émotions, je pense.
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Hidden Mystery
МистикаGwenaël Angélia est un adolescent qui n'a jamais passé 2 ans dans une même école. Pourtant lorsqu'il arrive dans la ville de Destinée et qu'il rencontre de nouveaux camarades, tout change. Des événements mystérieux surviennent et entraînent le boule...