Chapitre 31

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C'est comme reprendre son souffle après avoir été en apnée pendant longtemps. C'est comme émerger après s'être jeté du haut d'une falaise dans l'eau glacée. C'est... C'est une nouvelle inspiration qui entre dans mes poumons en les incendiant. C'est une douleur qui réanime. Une douleur qui nous fait nous sentir... vivant. Une nouvelle vie vient de débuter. Ma nouvelle vie vient de commencer. Finies les transformations, fini la douleur. Je peux dorénavant vivre comme je l'entends. Vivre dans le but de changer les choses. Vivre dans le but de faire entendre la voix de Mère Nature sur cette terre. Je suis prêt.

J'ouvre les yeux et aperçois le ciel nuageux. Je sens mon aura encerclant mon corps faire fondre la neige qui tombe et donc l'eau qui ruisselle dans mon dos, nu. Je bouge de part et d'autre ma tête dans l'espoir d'élargir mon champ de vision. Suis-je en un seul morceau ? Suis-je réellement de retour ? Me suis-je rematérialisé sans problèmes ? Je lève lourdement une main à hauteur d'yeux. Cinq doigts. L'autre main. Idem. Je soupire avant de les relâcher mollement. Je suis intact. La gravité est bien attractive cependant. Je peine à me relever. Je sens des mains prudentes m'empoigner les bras de chaque côté. Je tourne la tête vers l'un, ce visage m'est familier. Ces cheveux qui reflètent la galaxie... Lucie. De l'autre côté, les lèvres retroussées sur des canines, Matéo. Le visage fin et blafard de celui-ci n'a toujours pas changé. Son petit nez en trompette et ses yeux caramel sont toujours les mêmes. Il n'a pas changé. Je retourne péniblement la tête vers Lucie qui me sourit à son tour. J'ai l'impression d'être sous l'effet de stupéfiants ou d'un médicament me privant de mes sens. Je suis mou. Owen se précipite pour prendre la place de mon amie et m'aide à me relever. Je reconnais ses grosses paluches, et la montagne de muscles solides qui le constitue. Je lève la tête afin de croiser son regard absent. Il semble être en pleine réflexion, troublé par quelque chose, ou quelqu'un. Je reprends peu à peu conscience et me rends compte d'une chose qui n'avait pas encore fait tilt dans ma tête : je suis nu. Un spasme incontrôlable me prend et je cache mes parties intimes. Lucie détourne le regard, amusée mais je ne peux rien lui reprocher pour le moment. Et il faut dire que ce n'est pas la première fois que cela arrive. Les forces m'abandonnent une nouvelle fois et je sens la soif monter. La résurrection en métamorphe a dû me pomper tout le sang que j'avais pris soin de stocker. J'ai soif. J'ai besoin de me nourrir.

« Je...

- Je sais ce que tu vas dire ne perd pas tes forces à essayer de le formuler. Réplique aussitôt Lucie. Sandrine ! Crie-t-elle. »

Mes oreilles me font souffrir le martyr. Je les bouche précipitamment puis replace mes mains là où elles étaient, oubliant qu'elles cachaient une partie personnelle de mon anatomie. Lucie s'excuse, à moitié amusée et inquiète. La renaissance est vraiment pénible. Je ne pensais pas être si faible. Je viens pourtant de finir la dernière de mes transformations. J'ai un mouvement de recul alors que je découvre Liana qui se tient juste devant moi Elle attrape mon visage entre ses délicates mains aux longs ongles tranchants et m'oblige à accrocher son regard.

« Montre-moi tes yeux.

Devant mon manque de réaction elle reprend :

- Montre-moi tes yeux ! »

Je fais ce qu'elle me demande et active chacune de mes facettes les combinant et faisant affluer chacune des différentes facettes de ma personne derrière mes paupières closes. Lorsque je les rouvre, Liana fait un pas en arrière. Dans ses yeux orange brûlé j'y vois... l'extase, l'étonnement, la joie. Avant que je n'aie le temps d'analyser chacun des sentiments qui se bousculent dans ses yeux, Liana m'embrasse rapidement sur les lèvres avant d'enlacer ma poitrine contre sa joue alors que mes deux amis sont toujours en train de me maintenir.

« Perfection. »

Elle m'habille ensuite d'un revers de main puis part en fredonnant. Ses longs cheveux et ses habits noirs contrastent avec la neige qui recouvre les sols et les toits des bâtiments de l'établissement qui nous servait alors de lycée dans notre ancienne vie. Je regarde mes deux camarades et Lucie, tous sont aussi troublés que moi par la réaction de la sorcière. Au moins je suis habillé mais... Alors que Sandrine accourt les bras chargés de poches de sang. La réalité me frappe de plein fouet : Julien ? C'est un coup de poignard que je me prends dans l'estomac.

Hidden MysteryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant