Chapitre 24

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Je suis en suspension comme immergé dans une baignoire remplie d'un liquide dense. Mon corps est engourdi et au-dessus de moi je peux apercevoir la scène qui se déroule sous mes yeux. Je suis tout bonnement incapable de prendre le contrôle de ce corps, ce corps qui est le mien. Mon esprit s'y est détaché et je crois sombrer dans les limbes les plus noires et les plus profondes que je n'ai jamais pu observer. Je suis empli d'un sentiment de plénitude qui pourtant me fait froid dans le dos. L'obscurité qui m'entoure est profonde, vaste et n'est percée que par la vision que je reçois de mon corps. Je vois enfin ce que je décris comme étant la salle de classe que je ne connais que trop bien, la même qui nous avait accueilli pour nos premières transformations à moi et Lucie. Les murs y ont été renforcés avec ce qui me semble être du métal et, en guise de lumière, une simple ampoule vient timidement se suspendre du plafond et éclairer la pièce. Cette salle, maintenant devenue une prison d'acier impénétrable, ne m'inspire rien. Elle est vide de sens, vide de vie. Je me sens emprisonné, enfermé dans une cellule. Reverrais-je un jour, le jour, la nuit ? Peu m'importe si cela me permet de sortir... Les quatre murs sont unis et moi je suis lié, lié à cette entité animale qui ne me veut que du mal. Elle veut me voir disparaître mais... Je ne veux pas me laisser faire. Je ne veux pas, en plus d'être véritablement enfermé à l'extérieur, je suis aussi emprisonné dans mon corps. Ce sentiment de plénitude, il me submerge une nouvelle fois. Je ressens comme une vague m'écrasant la poitrine et... Plus rien. Toute envie d'opposer une résistance quitte mon corps, que dis-je, mon esprit. Je ne suis plus qu'immatériel à présent. Ce sentiment. Il me fait me sentir bien comme... Dans la pièce mystérieuse. Je tente de reprendre le contrôle de mon corps en me contractant, essayant de faire bouger un bras ou une jambe... Impossible. Je suis immobilisé par une force invisible. Tout aussi noire que le noir qui m'entoure et tout aussi dénuée de compassion pour ma pauvre âme en détresse. Elle me submerge et je commence à suffoquer tandis que le loup qui est maintenant apparu et qui manipule MON corps se redresse de la manière d'un animal se réveillant d'une longue sieste. Les minutes avaient défilées bien plus vites que ce que j'avais pu imaginer. Le loup est là, présent avec moi. Je le sens qui se réjouit du spectacle macabre en attendant de pouvoir aspirer mon âme. A peine qu'il ait esquissé le moindre mouvement que derrière lui se fait entendre un vrombissement. Il se retourne rapidement, trop rapidement pour un animal ordinaire et, avant même que je ne puisse percevoir ce qu'il en est, il se fait projeter à l'autre bout de la pièce. Je ressens ce que le loup ressent et je vois ce que le loup voit.

Je vois cet ours féroce dont les poils me semblent être d'aciers et ses crocs luisants aiguisés comme des sabres. Je peux presque apercevoir mon reflet dans la bave qui coule de la grande gueule béante du mastodonte me menaçant. Le loup au pelage roux clair se relève péniblement et montre à son tour les crocs. Je ressens l'adrénaline parvenir jusqu'à moi et le loup se concentrer une nouvelle fois afin d'annihiler cette impulsion qui pourrait me servir à me délivrer. Sa patte arrière est enroulée autour de quelque chose, nous ressentons une gêne. Les guenilles, pauvres restes de mes habits, semblent me rappeler que ce corps d'animal et le mien. Je suis celui qui devrait être aux commandes ! Le loup, agacé, secoue la patte énergiquement pour se débarrasser de ce bout de chiffon. Je sens quelque chose se resserrer autour de notre cou. Un poids pesant qui nous fait presque trébucher. Je veux reprendre le contrôle, je DOIS reprendre le contrôle. Je n'ai pas le choix et c'est à ce moment précis que les dernières instructions et informations données par Owen refont surface.

« Tu ne dois en aucun cas laisser le loup avoir le dessus sur toi parce que si cela arrive alors tu seras oublié à jamais. Tu ne souhaites pas que ton esprit disparaisse et ne soit remplacé par celui du loup, si ?

Je revois très bien son expression idiote qui n'a fait que renforcer ma détermination. Je vais reprendre le contrôle.

- Il faut aussi que tu comprennes que si ça doit arriver alors tu ne reprendras jamais forme humaine. Tu ne disposes que d'un temps limité afin d'arriver à reprendre le dessus car le loup devient de plus en plus fort et il te sera encore plus difficile de le dominer au fil du temps qui passe. »

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