Chapitre 7 : Confidences

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Salieri n'était pas sorti depuis le concert de samedi. Le rideau de son appartement était presque intégralement baissé, ne laissant d'un filet de lumière éclairer sommairement la pièce. Le jeune homme, vêtu uniquement d'un caleçon, était affalé sur son canapé, une bouteille dans sa main gauche, et le bras droit posé sur l'accoudoir, ouvert et se vidant lentement de son sang. Le couteau, posé sur la table basse, l'avait encore tenté. Il avait mal, mais il se sentait bien. Il resta immobile longtemps, jusqu'à ce qu'il sente sa tête tourner. Antonio se leva, titubant légèrement. Il n'aurait pas du boire, cela anesthésiait trop la douleur. Le musicien alla dans la salle de bain, il se dévêtit et se mit sous la douche. L'eau glacée entra au contact avec la plaie et il ressentit un désagréable picotement tout le long de son corps. Paradoxalement, il soupira d'aise. Il resta immobile jusqu'à ce que son corps se mette à trembler de froid, et il sortit enfin, s'habilla de vêtements propres avant de bander son avant bras pour compresser la plaie et couper le saignement. Salieri retourna dans le salon, et il passa plusieurs heures à détacher l'accoudoir du canapé de la trace écarlate qui s'était imbibée dessus.

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Wolfgang n'était pas sorti non plus depuis plusieurs jours, occupé à composer de nouveaux morceaux et à se perdre dans sa musique. Avant de fonder Requiem, il créait les notes spontanément, sans rien écrire. C'était inutile, tout était bien à sa place dans sa tête. Mais il n'était plus seul, alors il rédigeait maintenant des partitions à l'attention de ses amis. Le résultat n'était pas fameux pour son appartement. Assis en tailleur sur son bureau, sa guitare dans les mains, la pièce de vie était dans un désordre flagrant. Entre les divers instruments posés sur les meubles, ou sur le sol, les papiers traînant par terre par dizaines et les objets variés qui n'avaient rien à faire à certains endroits, le lieu était un véritable chaos. Mais dans ce bazar, il se sentait à l'aise. Il aimait bien être chez lui, laissant sa muse le guider pour composer, mais l'extérieur commençait à lui manquer. Mozart était un jeune homme très sociable, qui se faisait souvent remarquer et qui se liait d'amitié avec les autres très vite, et avec une grande facilité. L'autrichien laissa sa guitare sur son ordinateur refermé, et il se rendit dans la salle de bain pour se préparer. Il enfila un jean noir, auquel il attacha des chaînes, puis une chemise à carreaux rouge et noire. Il enfila quelques bracelets de cuir sur ses bras et se maquilla les yeux d'une couleur dorée pailletée qui mettait en avant son regard. Fin prêt, il quitta enfin son immeuble, excité à l'idée d'aller boire un verre dans un bar et de converser avec des inconnus.


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Antonio n'avait plus une seule bouteille chez lui. Les quelques jours passés seul dans le noir lui avait fait vider sa réserve d'alcool. Mais il ne voulait pas arrêter, il ne voulait pas être sobre. Il voulait oublier, cesser de penser, voire disparaître. Il ne voulait plus ressentir cette douleur mentale si forte, si intrusive. L'italien saisit un élastique et il attacha ses longs cheveux bruns derrière son crâne avant d'enfiler une veste sombre à capuche. Lui qui prenait soin de son apparence quand il sortait, il portait là un simple jogging avec un t-shirt, tous deux noirs. Une fois ses baskets mises, il sortit de son appartement. Il voulait trouver une épicerie pour refaire son stock. Après avoir marché pendant quelques minutes dans les rues, évitant les endroits fréquentés, il finit par trouver ce qu'il cherchait. Le soleil diffusait une lumière orangée tout en se couchant, et le temps que le jeune homme fouille les étagères à la recherche de son bonheur et qu'il passe à la caisse, il avait disparu du ciel, ne laissant que la lune pour éclairer la ville. Antonio ne voulait pas rentrer tout de suite. Son appartement était autant un foyer qu'une prison, aussi marcha-t-il longtemps, sans but, dans les ruelles vides d'Aupehra. Il finit par en avoir marre et il s'assit contre un mur. Personne ne passait par ici, il serait tranquille. D'un geste lent, mécanique, il ouvrit la première bouteille.

Mozalieri - Une mélodie qui fait malOù les histoires vivent. Découvrez maintenant