Chapitre 18

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Les Sables d'Olonne, 1980

- Maman, il faut qu'on parle de mon père ! fit Michael sur un ton qui se voulait plutôt ferme en dépit de son jeune âge.

Nell était en pleine séance de repassage. Elle lâcha son fer quelques secondes fixant son fils comme s'il l'avait insultée puis reprit sa besogne avec une application toute particulière.

- Maman ! insista l'adolescent, pas le moins du monde intimidé. Laisse ton foutu linge et accorde-moi un peu de temps bordel !!

- Michael !!!

- J'en ai besoin bon sang ! J'ai besoin d'avoir des réponses !

- A quoi cela peut-il servir ? Il n'est pas bon de remuer le passé !

- C'est facile pour toi, hein ?!Tu joues maintenant à la mère normale mais je te rappelle qu'il y a huit ans, tu as tenté de te suicider m'abandonnant à tes pseudos amis qui jouaient les oncles et les tantes et qui m'obligeaient à voir ce psy complètement barré !

- Michael !!!cria Nell qui semblait avoir perdu d'un coup toute assurance, toute autorité et dont le peu de couleurs avaient complètement déserté son visage.

- J'ai seize ans, maman et je ne suis plus un gosse depuis bien longtemps et ça, je le dois à mes chers parents !...

- Arrête Michael !

- Mon père s'est barré du jour au lendemain, toi tu as décidé de mourir puis un jour, tu es revenue comme si de rien était, sans évoquer quoique ce soit, coupant les ponts avec tous les gens que l'on connaissait et t'absentant quotidiennement pour ton travail, des semaines entières parfois, me laissant me démerder tout seul...Tu crois quoi ? Que le petit garçon a attendu bien sagement ?

Elle ne répondit rien, elle était dévastée.

- Contrairement à toi, je ne sais rien de mon père si ce n'est qu'il était policier, anglais et qu'il nous a quittés. T'es-tu seulement une fois demandée ce que j'ai pu ressentir ? Eh bien, je vais te le dire... J'ai pensé que s'il t'avait quittée, c'était à cause de moi, que j'avais été une erreur dans votre parcours et que c'était aussi ma faute si tu avais tenté de...J'ai essayé de te le ramener, tu te souviens ? Au final, j'ai été répertorié comme cinglé !!! Au fond, je ne regrette qu'une chose, être né.

- Non Michael ! hurla Nell. Je t'interdis de penser cela ! Je suis tellement désolée !!

Ses yeux étaient agrandis par l'horreur des révélations de son fils.

- Tout ce qui s'est passé n'est certainement pas ta faute. Il t'aimait tout comme je t'aime aussi. Il aurait tout donné pour toi ! Si tu avais vu ce bonheur dans ses yeux lorsqu'il a su qu'il serait père...Je crois...

- ...J'en ai rien à battre de ce qu'il a pu ressentir à ma naissance, la coupa le jeune homme, la voix déformée par la haine. Le fait est qu'il est parti !

- Il est mort !

- Encore une fois, tu mens ! C'est une habitude chez toi. Je t'ai entendu parler avec ton ami journaliste. J'étais jeune mais je comprenais. Et puis, l'homme à Calais, il a confirmé...il a dit que je le reverrai...

- ...Voyons, tu sais très bien qu'au final, il n'y avait personne à Calais ! Tu...

- ...Ah bon ! Maintenant je m'imagine des choses ! C'est ça ? Après ta tentative de suicide, c'est pas ce que tu as dit. Tu mentais là aussi ? Parce que moi je me rappelle très bien : « Michael, tu n'es pas fou, tu as un don, tu peux simplement voir ce que les autres ne voient pas... »

SÍ...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant