Undercover

Prologue

2812 mots

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10 avril

Maison
Arrondissement de Nishikyō-ku, Kyoto
Préfecture de Kyoto
Japon

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Un soupir ennuyé m'échappe quand je trouve enfin le courage de vider le dernier carton qui traine. Bientôt un mois s'est écoulé depuis que mon frère jumeau, ma mère et moi avons déménagé dans cette grande maison et pourtant, je n'avais jamais daigné à défaire le contenu de cette boîte. Je l'ai laissé reposer dans un coin de ma nouvelle chambre durant toutes les vacances, comme s'il allait soudain disparaitre, lui et son contenu. Si je me résigne autant à l'ouvrir, c'est parce que j'ai l'impression que cela signerait la fin de mes espoirs vers un retour en arrière. Bien avant que tout cela n'arrive. C'est comme si j'acceptais que tout a changé ces derniers temps, et que rien ne serait plus comme avant. Ma mère a dit qu'elle voulait qu'on reparte du bon pied, tous les trois. Enfin, c'est comme ça qu'elle a justifié ce soudain déménagement. Et c'est comme ça que deux semaines plus tard, à peine mon année de première terminée, je me retrouve à l'autre bout de la ville de Kyoto, perdue dans la campagne. Personnellement, je ne vois pas tout ça, mais alors pas du tout, de la même manière qu'elle. Entre nous, cette perspective ne me réjouissait déjà pas trop de base. J'aimais bien ma petite vie bien rangée d'avant, avec ma petite routine des plus banales qui soit. Celle où j'étais une étudiante comme une autre, avec des notes plutôt bonnes - enfin sauf en maths ou je suis limite. Je ne perturbais pas les cours des profs et respectait plutôt bien le règlement, même quand cela signifiait devoir porter les horribles chaussures de l'uniforme règlementaire. J'avais quelques bonnes amies avec qui passer mes pauses de midi, et je m'entendais plutôt bien avec le reste de mes camarades de classe. Et en dehors de cela, je consacrais la plupart de mon temps libre au studio de danse. Une vie tout à fait calme et banale en soit.

Enfin, tout ça, c'était avant. Et je ne savais pas encore à quel point j'allais être sortie de ma zone de confort.

Maintenant accroupie devant cette fichue boite, je m'empresse d'arracher le bout de ruban adhésif qui la maintenu fermée. A l'intérieur ne se trouve rien de plus que toute mes nouvelles affaires de cours. Parce que non seulement j'ai déménagé, mais j'ai aussi et surtout changé de lycée. La rentrée des classes a lieu dans quelques jours et je m'apprête à rentrer en terminale. Soit en dernière année. D'un coup d'œil critique, je juge mes nouveaux manuels de cours ainsi que les fournitures scolaires que j'avais entreposé dans la boite à peine reçue. Pas qu'ils m'aient l'air abimés ou vieux. Ils me rappellent juste à quel point je vais devoir travailler dur pour mes examens de fin d'année en prévision de mon diplôme. J'espère au moins que je vais réussir à jongler entre les études, mon nouveau job dans le café en centre-ville et la danse.

Mon intérêt finit par se porter sur l'uniforme scolaire, plié au fond du carton sous mon sac de cours. Prudemment pour ne pas y faire des plis, je le dépose sur mon lit avant de me lancer dans sa contemplation. Il est constitué d'un blazer bleu marine avec une chemise blanche tout à fait basique, d'un ruban rouge à nouer à mon cou en guise de cravate et d'une jupe gris clair plissée qui m'arrive, a vu d'œil, à mi-cuisse. Une paire de chaussures noires accompagnent l'uniforme – au moins elles n'ont pas l'air aussi laides que celle de mon ancien lycée- ainsi qu'un gilet en laine de la même couleur à rajouter par-dessus la chemise. Un soupir me gagne à nouveau et je me laisse tomber sur mon lit tout en prenant toutefois garde à ne pas froisser les vêtements. Au même moment, la porte de ma chambre s'ouvre.

-Je te l'avais dit, l'uniforme de Kotodama est vraiment canon !

Je n'ai même pas besoin d'ouvrir les yeux pour reconnaitre le ton jovial de la personne qui vient d'entrer. Mina Yoshida. C'est ma meilleure amie d'aussi loin que je m'en souvienne. Elle a des cheveux châtain clair coupés en dessous des épaules, de grands yeux bruns et un air toujours enjoué collé sur le visage. Elle est vraiment mignonne dans son genre. M'enfin passons. On a toutes les deux dix-sept ans et on a plus au moins la même taille, même si je la dépasse de quelques centimètres avec mon mètre septante. Mais surtout, on partage toute les deux une passion pour la danse, et particulièrement le hip-hop. Depuis toute petite, on va toutes les deux dans le même studio de danse le plus réputé de la ville de Kyoto. J'avoue que je ne suis pas peu fière de cet exploit. Notre prof est très stricte et le niveau y est, sans surprise, plutôt haut. Les filles qui s'y trouvent ont toutes beaucoup de talent et de temps à consacrer aux nombreuses heures d'entrainement qui jalonnent la semaine. L'ambiance ces dernières semaines s'est cependant particulièrement corsée à cause du spectacle à venir. Les entrainements sont plus rigoureux que jamais, même en période de vacances. On cherche toutes à avoir le rôle principal, et pour ce faire, on donne tout le meilleur de nous-même. C'est fatigant, mais cela en vaut largement la peine. Surtout quand on sait que les meilleures d'entre nous auront peut-être la chance de faire carrière si nous nous démarquons durant la prestation prévue d'ici peu...