6* Un samedi banal

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2647 mots

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2 mai

Kyoto Brew Coffee

Arrondissement de Fushimi-ku, Kyoto

Préfecture de Kyoto

Japon

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Samedi. Un jour tout à fait banal à mon goût. Banal parce que, pendant que les jeunes de mon âge en profitent pour sortir et s'amuser, moi, je travaille. Comme durant le reste de la semaine. Alors, ça ne change pas grand-chose de d'habitude pour moi. Hier soir, après la fin de mon cours désastreux de danse, j'ai reçu un message de la part d'Hanae. Son collège de travail supposé travailler aujourd'hui est tombé malade, et elle me demandait si je pouvais le remplacer. Aussi fatiguée et peu motivée que j'étais, je ne pouvais pas trop faire la difficile et refuser. Déjà que le patron a gentiment accepté de me faire travailler plutôt les soirs après les cours au lieu du week-end, je peux bien prendre sur moi pour une fois.

Je me retrouve donc à passer ma journée, initialement consacrée à rattraper mon retard accumulé durant la semaine à cause de mon planning chargé, à bosser au café. Si je continue à négliger autant mes études, je sens que mes résultats vont en prendre un sacré coup. Et ma mère va encore râler. Je dis bien encore parce que ce matin, on s'est disputée. Elle n'a pas apprécié que j'aille travailler aujourd'hui, pendant le seul jour ou l'on pouvait se retrouver tous les trois, ensemble. Sauf que malheureusement pour elle, les éléments de la veille additionnés à ma courte nuit de sommeil ne m'ont pas aidée à garder mon sang froid. Les mots que je retenais depuis des semaines m'ont échappé, et j'ai explosé. Je n'ai pas pu m'empêcher de lui faire la remarque que c'est elle qui n'était jamais présente depuis la rentrée, sauf quand il est question de mon frère, Kai. Fondamentalement, ce que j'ai dit n'étais pas faux. Il y en a vraiment que pour lui, et ce qui m'énerve c'est qu'elle ose me faire des remarques sur ma non-présence alors que c'est lui qui découche un soir sur deux sans prévenir personne, ou qui passe son temps enfermé dans sa chambre. Alors que je me fais disputer parce que je travaille au café ou que je vais à la danse. Mais là n'est pas le problème. Maintenant, je m'en veux énormément de lui avoir sorti toutes ces horreurs et de l'avoir blessée. Je trouve que j'ai été injuste avec elle. Vraiment injuste. J'hésite à envoyer un message d'excuses, mais je me ravise à chaque fois. Mon égo mal placé ne digère vraiment pas notre embrouille.

-C'est la redescente sur terre qui ne te réussit pas, poulette ?

Même Hanae et ses sous-entendus douteux sur ma pseudo addiction à la drogue ne me remontent pas le moral. La petite rousse fait vraiment beaucoup d'efforts pour me réconforter, et son attention me va droit au cœur. J'apprécie sincèrement qu'elle se préoccupe de moi. Mais dans l'instant présent, j'ai juste envie de me mettre en boule dans mon lit pour les trois jours à venir.

-Tiens, déclare-t-elle en posant un chocolat chaud devant moi. Ça te fera du bien de te mettre quelque chose dans le ventre.

-Merci.

-Je sais que ce n'est pas très healthy et que ta prof de danse ne serait pas très contente de voir ça, mais tu iras lui dire que c'est la crise.

Je pouffe gentiment et me met à souffler sur la boisson chocolatée sans y tremper mes lèvres pour autant. Les voutes de fumées qui s'en échappent ainsi que son odeur sucrée ont quelque chose d'hypnotisant.

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