24* Révélations

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9494 mots

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4 août

Lac Biwa
Préfecture de Shiga
Japon

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La journée a été épuisante, et pourtant, je n'arrive pas à fermer l'œil ce soir-là.

Pour la dixième fois en trois minutes, je me retourne dans mon futon tout en soupirant. Je suis la seule qui ne dors pas. Saito et Suzuki se sont, comme d'habitude, écroulés dès que leurs têtes ont toucher leurs oreillers. Ils sont si profondément endormis que rien ne pourrait les réveiller. Même Yamazaki, qui pourtant est resté une bonne partie de la soirée scotché à son écran, a l'air de dormir à poing fermés. La pièce est donc plongée dans le silence, et seul le hululement lointain de quelques chouettes rompent la quiétude du moment.

Dehors, il fait nuit depuis déjà bien longtemps. Et c'est bien ça, le problème. J'ai déjà dû perdre une bonne partie de ma nuit, à cogiter sans raison particulière. Mon envie de calculer ce qui me reste à dormir me prend, et je me saisis de mon portable. D'abord aveuglée par la lumière de ce dernier, mes yeux s'écarquillent en voyant l'heure affichée sur l'écran. Je revérifie à deux reprises, mais je ne me suis pas trompée. 23 : 28. Ça fait une heure et demie que le couvre-feu est dépassé, et bien deux que j'essaye de dormir.

Je soupire de nouveau, un peu plus fort cette fois ci, et me retourne à nouveau dans ma couette. Mais à force de bouger dans tous les sens, je finis par vraiment avoir chaud. Déjà que je porte un sweat, ce qui est déjà plutôt inapproprié vu la saison, gigoter ainsi dans tous les sens n'arrange en rien à ma situation. Je meurs littéralement de chaud. Agacée, je me bats une fois de plus avec ma couverture que je finis par rejeter loin de moi, dans un geste un peu agressif. Je ferme les yeux et me force à me calmer, en prenant de grandes respirations. Ce n'est certainement pas en étant énervée comme ça que je vais m'endormir.

Pas plus de cinq minutes plus tard, je ne dors toujours pas. Mais surtout, j'ai soif. Ma gorge me démange affreusement, et je ne peux pas l'ignorer. Malheureusement pour moi, ma gourde est restée dans la cuisine, et il n'y a pas de robinet dans cette pièce puisqu'il s'agit simplement d'un dortoir. Je n'ai clairement pas la motivation de me lever, mais je ne peux pas non plus faire comme si de rien n'était. Alors, non sans pester à voix basse, je me relève complètement et, à pas de loup pour ne pas réveiller les autres, je me glisse hors de la chambre.

Le couloir est plongé dans le noir, les lumières sont éteintes. Je me sers donc de la lampe torche de mon cellulaire pour m'éclairer. J'ai l'impression d'être dans l'illégalité, à essayer de me faire le plus discrète possible. Mes pas sont rapides et chaque petit bruit me fait sursauter, comme si quelqu'un allait surgir à n'importe quel moment de l'obscurité pour m'attraper la main dans le sac. En soit, le coach ne m'en voudrait pas s'il me trouve dans la cuisine en dehors du couvre-feu. Je ne peux pas contrôler ma soif. Cependant, je préfère quand même me hâter. Je ne suis pas curieuse de savoir ce qu'il me dirait en me voyant me balader à cette heure-ci dans les couloirs. Ne sait-on jamais...

J'arrive sans encombre dans la petite cuisine, toujours aussi déserte. J'allume la petite lampe au-dessus du plan de travail, bien plus efficace que celle de mon portable, et me saisit rapidement d'un verre posé en hauteur. Je fais couler l'eau quelques instants, puis remplis mon verre à ras bord. D'une traite, je le termine et m'en resserre un nouveau qui subit le même sort.

D'une fois mon verre rincé, je ne quitte pas la cuisine pour autant. J'ai bien compris que le sommeil ne viendrait pas de sitôt. Ça faisait longtemps que je n'avais pas fait d'insomnies, et j'avoue que ça ne m'avait pas vraiment manqué. Alors au lieu de retourner dans ma chambre en sachant pertinemment que je ne pourrais fermer l'œil avant un bon moment, je préfère rester un peu ici. Après les deux journées de pluie auxquelles on a eu droit, le ciel s'est passablement éclaircit. Les étoiles y brillent de mille feu, et j'ai vraiment envie de les voir. Ça fait longtemps que je n'ai pas pris le temps d'observer le magnifique spectacle qu'est un ciel nocturne et parsemé d'étoiles. Maintenant que l'occasion se présente à moi, je la saisis.

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