26* Journée mouvementée

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5133 mots

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5 août

Lac Biwa
Préfecture de Shiga
Japon

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Moi qui trouvais déjà brutal la façon dont je me fais réveiller depuis plus d'une semaine maintenant, là, c'était pire. La lumière qui m'a aveuglée lorsque Saito – ou Suzuki, je n'ai pas réussi à bien identifier le malfaiteur – a ouvert les stores m'a paru encore plus agressive que d'habitude, ce qui m'arrache un grognement plaintif. Quoi, c'est déjà le jour ? J'ai l'impression d'avoir à peine fermé les yeux quelques minutes !

Rabattant la couverture par-dessus ma tête, j'essaye de gratter malgré moi quelques instants de répit supplémentaires. Mon esprit est encore trop ensommeillé pour affronter quiconque de bon matin. Mais c'est sans compter sur les voix surexcitées du duo de seconde qui me brise les tympans. Comment est-ce possible de faire autant de boucan à eux seuls, dès le matin ? Ce n'est pas croyable.

Il me faut quelques minutes supplémentaires avant d'émerger malgré la fatigue intense qui m'habite. J'y suis bien forcée, après tout. Je n'aimerais pas m'attirer les foudres du coach parce que je suis arrivée en retard au petit déjeuné. Même si la perspective de sortir du futon ne m'enchante guerre, je finis par sortir de sous la couette. La pièce est silencieuse, et je n'ai pas besoin de la balayer du regard pour comprendre que Saito et Suzuki sont partis. Je n'ai même pas percuté à quel moment ils ont quitté le dortoir, à vrai dire.

-J'en connais une qui n'a pas dormi beaucoup.

La voix trainante de Yamazaki me fait tourner rapidement la tête, m'octroyant une belle douleur au passage. Il se tient nonchalamment appuyé contre le mur, à quelques pas de moi. De son regard blasé, il me dévisage longuement en fronçant les sourcils.

-Qu'est-ce que tu fiches habillée comme ça ?

Clignant plusieurs fois des yeux, mon cerveau met un moment avant de comprendre le sens de sa phrase. Qu'est-ce qu'il a, mon pull ? Mes sourcils se froncent d'eux même quand je remarque qu'effectivement, la matière de mon vêtement n'est pas celle à laquelle je m'attendais.

-Je rêve ou tu portes la veste de Nishimura ? Interroge Yamazaki d'un ton moqueur.

Une exclamation de surprise que je n'étouffe même pas traverse mes lèvres. Ça y est, je viens de me souvenir de la soirée d'hier. Les images défilent brusquement devant mes yeux sans que je ne puisse m'y opposer. La rencontre fortuite dans la cuisine. Le bain de minuit. Ma confession sur Kai. Le presque baiser. La course poursuite. Le moment où Nishimura m'a donné son survêtement de volley, dans le kombini. Survêtement que je ne lui ai pas rendu, et que je porte encore sur moi. Ça ne peut être que le sien, il est imprégné de son odeur de jasmin.

Un soupir agacé m'échappe alors que je me laisse tomber sans délicatesse sur mon futon, un bras couvrant mes yeux. Bordel, tout me revient, maintenant. D'une façon aussi clair et lipide que l'eau. Et j'aurais peut-être préféré oublier. Pour ne rien arranger, un ricanement mesquin me rappelle la présence de Yamazaki, qui visiblement a décidé de me faire chier de bonne heure. Son air narquois me le confirme lorsque j'ose enfin affronter son regard émeraude.

-Toi et le capitaine, siffla-t-il faussement impressionné. Tu ne perds pas de temps, dis donc.

-Ce n'est pas du tout ce que tu crois, tentai-je malgré moi. Et puis, c'est ma veste.

Yamazaki hausse un sourcil dubitatif, et son rictus mauvais s'élargit. Mon mensonge vient apparemment d'être mis à découvert, et il s'amuse visiblement de sa découverte.

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