Chapitre 28

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Rei a été tué le 4 juin 2003. J'ai quitté le Toman après sa mort, et ait fuit tout ce qui pouvait me relier à ces histoires de gang qui m'ont arraché mon petit frère. Après ça, mes parents ont divorcé. Papa, qui était déjà peu présent, a quitté la ville.

Kazutora est le seul membre du Toman qui est resté mon ami. Enfin, jusqu'à ce qu'il disparaisse en maison de correction sans que je ne sache pourquoi. J'ai rencontré Chifuyu par hasard un an plus tard, en passant sur la tombe de Rei. Il m'a aidée à ramasser les fleurs que j'avais fait tomber à l'entrée du cimetière.

Sa mort était entièrement de ma faute. Le jour de son anniversaire, je l'ai emmené voir mes amis. Ce jour là, un membre d'un gang ennemi du Toman nous a vu, et a guetté une occasion de prendre Rei en otage. Si je n'avais pas laissé mon petit frère sortir seul, rien de tout ça n'aurait eu lieu.

J'ai vécu longtemps avec la culpabilité d'avoir tué Rei. La douleur a fini par passer, mais pas les souvenirs.

Les cauchemars me hantaient. Dans chacun d'eux, je l'entendais me dire qu'il voulait vivre. Encore et encore. Je regrette tellement.

J'ai fini par redonner une chance à cette vie.

Je n'aurais pas du. Tout ça n'apporte que du mal. Et les dégâts collatéraux qu'on cause avec ces putain d'histoires d'adolescents en quête d'adrénaline sont trop importants.

Ils me détruisent.

À mon réveil, je ne suis qu'une boule de douleur. Ma chambre est plongée dans le noir. Je n'ai pas envie de bouger, pas envie d'esquisser un seul geste. J'ai mal, tellement mal. J'ai besoin de Baji. Qu'il me serre dans ses bras. Je veux sentir sa peau contre la mienne. J'ai envie de lui.

Ce besoin irrépressible ne sera jamais comblé. Et penser à toutes ces années gaspillées, durant lesquelles j'ai fui le Toman et tout l'univers du gang, dont Baji, me rappelle que j'aurais pu profiter de sa présence, si seulement j'avais choisi une autre voie. Si j'avais accompagné Rei au parc. Je suis rongée par mes remords.

Plus rien ne me rattache à cette vie qui n'a désormais aucun sens à mes yeux. J'ai trop mal pour penser de façon rationnelle. Je veux juste ne plus souffrir. Je dois mourir.

Je vais me suicider.

C'est poussée par cette pensée que je me lève de mon lit, repoussant sèchement mes couvertures.

Mes pas précipités m'amènent à la salle de bain. J'attrape mon rasoir, les mains tremblantes, et m'efforce de le décortiquer pour en extraire la lame. Je ne fais pas attention à mes doigts qui se coupent en essayant de récupérer la lame du rasoir.

Quand j'y parviens enfin, la porte s'ouvre et ha s'écraser contre le mur.

Mitsuko apparaît dans l'encadrement, ses yeux écarquillés rivés sur mes doigts mutilés tenant la lame.

-Putain de merde, qu'est-ce que tu fais, Emiko ?

Je ne pleure même pas. Seul le tremblement de mes mains trahit mon angoisse.

Ma meilleure amie s'empresse d'arracher l'instrument de mes mains et le jette dans la poubelle située dans la salle de bains.

-Je pensais pas que sa mort te mettrait dans cet état, bordel.

-On aurait du s'en douter, souffle une nouvelle voix.

Je relève le regard vers Chifuyu. Ses yeux sont creusés de cernes profonds. Je ne parviens pas à refouler mes larmes, cette fois-ci.

Je suis en train de péter un câble.

Mon ami prend mes mains et les passe sous l'eau du lavabo avant d'attraper des pansements qu'il pose sur mes doigts. La douleur m'importe a peine. Elle me permet de ne pas penser à la souffrance que m'inflige l'absence de Baji.

Je renifle bruyamment, secouée de sanglots. Mitsuko m'attire contre elle, et je me laisse aller contre son épaule.

J'ai besoin d'aide. De chaleur.

Mais la chaleur qu'ils m'apportent n'est pas la même que la sienne.

Il me manque tellement.

Je me retrouve à nouveau dans ma chambre, emmitouflée entre mes couvertures.

-Comment on en est arrivés là ? Je souffle.

-Kazutora à planté Baji dit Chifuyu. Mikey a commencé à se battre avec lui. Alors Baji s'est sacrifié. Pour que Mikey n'ait aucune raison de tuer Kazutora.

Je déglutis.

-Il est resté sur place et a endossé la responsabilité, ajoute Mitsuko. Kazutora a pris dix ans de prison.

J'acquiesce lentement.

-Laissez-moi seule, s'il vous plaît. Je ne ferai rien.

Mitsuko acquiesce et attire Kazutora à sa suite en dehors de la chambre après avoir éteint la lumière.

Je serre à nouveau mon doudou éléphant contre moi, en laissant mes larmes s'échapper.

Je pleure tout mon soûl, tremblant de tout mon être.

Je hais Kazutora. Je hais cette vie, et je hais cette souffrance qui persiste.

Pourquoi Baji m'a-t-il abandonnée ? Est-ce que je n'étais pas assez importante à ses yeux pour le faire rester à mes côtés ? Ne m'aimait-il pas suffisamment ?

Est-ce qu'il m'en voudrait si je me suicidait ? Probablement. Mais il n'est plus là. Et il l'a fait, lui. Je ne me berce pas d'illusions. Jamais ne ne reverrai Baji, pas même dans la mort, et ça me détruit. Mais la douleur peut disparaître si moi, je disparais.

Je suis prête à tout pour la faire partir.

J'aurais du le faire déjà à la mort de Rei, en fait. Ma décision est prise. J'irais confronter Kazutora demain. Je lui parlerai, ensuite, j'irais rendre visite à la mère de Baji.

Et après ça, je partirai. Sans aucun regrets, je mettrais fin à cette vie pleine de souffrance.

Bon, je m'arrête pour aujourd'hui. Mais je continue sûrement demain !

Stay with me - Tokyo Revengers Où les histoires vivent. Découvrez maintenant