Chapitre 4 : Néates

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Ce fut tôt dans la matinée que les premiers rayons de soleil percèrent la cîme des arbres pour se loger dans les yeux de Jeena. Encore un peu assoupie, elle s'assit avant de s'étirer dans un grand bâillement communicatif, écarta la couverture de feuilles et scruta la masse ligneuse de Néates qui semblait encore profondément endormi. Un couple de geais s'était installé sur une des branches de ce dernier, chantant un doux poème matinal à nos deux pêcheurs de la veille.

La laefvi posa pied à terre pour aller se débarbouiller dans la rivière et boire un peu d'eau. Elle en profita pour remplir sa gourde, faire un tour des environs pour compléter sa collection de plantes et infuser un petit bouillon pour bien attaquer la journée. Est-ce que Néates pouvait boire d'ailleurs ? Ce serait une bonne occasion de l'apprendre. Ce fut au retour de la cueillette que ce dernier se réveilla, sous les petits craquements que le rallumage du feu provoquait.

"Qu'est ce que tu fais ?" bailla-t-il.

"Du bouillon, j'ai récupéré un peu de graisse des poissons d'hier et des herbes, ça nous mettra en forme pour la journée. D'ailleurs, je me demandais, tu peux boire ?"

"Euh.. Oui ? C'est-à-dire ?"

"Eh bien hier, pour "manger", je déposais les poissons dans ta main, tu avais l'air de trouver ça bon, mais comment ça se passe pour les liquides ?"

"Je me suis jamais posé la question... J'ai déjà absorbé de l'eau avec ma main mais je le fais généralement par mes racines..."

"Ah ! C'est donc une forme d'absorption ? J'aimerais bien que tu me racontes ce que tu es, ou du moins ce que tu en sais, qui es-tu Néates ?"

Il vira au bordeaux.

"Je euh... Je m'appelle Néates et je suis un Sylcolosse !"

Elle éclata de rire.

"Tu es fascinant ! Écoute. Je sais que cette question peut paraître directe mais... Je ne connais rien de ton espèce : les Sylcolosses, comme tu dis ! J'aimerais vraiment comprendre d'où tu viens !"

Dans une gêne somnambule, il répondit :

"Je sais pas. Je viens d'Enignate. Là où tous les autres sont. Moi j'en avais marre. Alors je suis parti."

Comprenant qu'elle touchait un point sensible, elle eut une moue triste avant de continuer :

" "Eniguenatte" tu dis ? C'est quand même dur à prononcer... Mais peu importe ! Ça ne te dirait pas qu'on repasse par là-bas ? Je ne sais même pas si c'est sur le chemin ou si tu as des problèmes là-bas mais... Je peux me porter garant pour toi tu sais ?"

Elle comprit immédiatement son regard d'incompréhension.

"Je peux me faire passer pour ton représentant ! Parler à ta place ou encore te protéger si c'est ce qui te fait peur ! Après je ne sais pas si tu veux bien mais..."

Il l'interrompit à sa débâcle.

"Je veux pas."

Un silence lourd s'installa.

"Tu sais, si j'suis là, c'est parce qu'ils sont tous nuls là bas."

Sentant qu'il avait encore quelque chose à dire, elle le laissa continuer.

"Je sais que ça fait pas grand de dire ça. Mais vraiment... Ils me parlent comme à un bébé depuis longtemps... Je comprends rien apparemment. Mais je faisais tout ! Je faisais tout ce qu'ils me disaient ! Et ils étaient jamais contents... Alors un jour, j'ai juste dit que j'allais cherché des herbes, et je suis parti..."

La Couleur de l'IrisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant