Chapitre 16 : Le Cri de la Baleine

823 1 0
                                    


Les jours passaient mais ne se ressemblaient pas.

Après avoir quitté Foengus, la traversée de nos héros devint plus solitaire. Il leur arrivait de croiser quelques voyageurs mais les seuls échanges qu'ils eurent par la suite furent des échanges cordiaux à base de gestes de la main ou de salut souriant lors des pauses qu'ils s'accordaient.

Au plus ils se rapprochaient du nord du continent, au plus la route s'élargissait. Et même si cela était encore imperceptible, les forêts se faisaient moins denses. Quelques champs et habitations clairsemaient le paysage sylvestre de plus en plus régulièrement et les véhicules se faisaient de plus en plus motorisés, que cela soit par magie ou technologie.

Cela faisait presque deux semaines que leur course avait commencé. Les nuits se faisaient également plus fraîches, et c'est sur ce point que Jeena fut très heureuse d'avoir récupéré de quoi se couvrir chez les Leylid. Par ailleurs, au vu du monde qui s'accumulait de plus en plus sur les routes en journée, ils prirent la décision de voyager de nuit afin de pouvoir encore emprunter la grande route sans pour autant risquer de noyer sous les racines, d'autres usagers, décidant ainsi de dormir une fois le soleil levé.

Ainsi, une nuit, alors que le roulement de ces racines sur la route était la seule mélodie que l'on pouvait entendre, la fraicheur nocturne commençait à se faire de plus en plus sentir. Et, accompagné par le vent soufflé par la vitesse de leur course, il n'en fallut pas plus pour faire éternuer Jeena :

"- Et dire qu'on n'est même pas sur le continent Humain... T'as pas froid, toi, Néates ?

- Je ne sais pas si on peut appeler ça froid mais je sens que j'ai des branches qui se flétrissent... Après, ça me fait ça pour pas mal de raisons différentes donc je sais pas...

- Eh ben, t'as bien de la chance, c'est moi qui te le dis..."

Elle éternua une seconde fois, la coupant net dans sa phrase.

De leur côté, ils donnaient aujourd'hui l'impression de s'être toujours connus. Cela faisait globalement deux mois qu'ils ne s'étaient plus lâchés et qu'ils voyageaient comme deux amis faisant le tour du monde. Jeena poursuivant son but, Néates ayant trouvé quelqu'un qui le traitait normalement.

C'était d'ailleurs un sujet récurrent. Lorsqu'ils passaient dans des auberges, villages ou villes, il n'était pas rare de voir les regards se tourner vers nos deux phénomènes. La monture en imposait, certes, mais ce qui épatait davantage les passants, c'était Néates. Un arbre vivant, cavalier d'un cheval de verdure qui semblait vagabonder parmi les Laefvis sans aucun à priori.

Ils n'avaient pas eu plus d'explications de la part d'Enir sur ce fameux cousin qui avait déjà dit voir des Sylcolosses. Et au vu des réactions de toutes les personnes rencontrées jusqu'alors, il était évident que ce peuple devait être caché depuis des décennies, si ce n'est plusieurs siècles.

Ce qui avait marqué Jeena, c'était surtout qu'à la différence de beaucoup, Néates n'inspirait pas la moquerie par sa différence. Non. Il insufflait, au contraire, une forme d'aura rassurante et charismatique. Il suffisait de voir les réactions des enfants qu'ils croisaient : qu'ils viennent caresser une gigantesque monture ou juste observer ce miracle ambulant, leurs yeux émerveillés en disaient beaucoup.

A première vue, personne ne savait qu'il s'agissait d'un enfant à l'intérieur et c'était mieux ainsi.

"Dis moi Néates, je... Je voulais juste te dire merci pour tout le trajet qu'on a fait jusqu'ici... J'espère que tu t'amuses toujours autant !"

Le jeune arbre vira au bordeaux, il ne s'attendait pas à ça :

"- Euh... Oui... Oui, Jeena ! Toujours autant ! Mais pourquoi tu me dis ça maintenant ?

La Couleur de l'IrisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant