Chapitre 8 : L'Amphithéâtre

956 2 0
                                    


La petite place, sur laquelle les récents événements avaient eu lieu, s'était transformée en petit campement de fortune, où les couleurs du crépuscule, mêlées aux rayonnements des torches que les plus prévoyants avaient déjà allumées, ajoutaient une ambiance festive aux installations des tentes et aux préparations culinaires rendues possibles par l'inspection des caisses de survie laissées par le départ précipité des humains plus tôt.

L'odeur de la viande grillée faisait saliver toute l'assemblée. Cette dernière, maintenant réduite comptait environ une trentaine de prisonniers, dont six enfants et une répartition quasi égale femme-homme. Une fois que chacun eut étanché sa soif, et pris de quoi grignoter, tous s'étaient réunis, impatients, sur l'esplanade pour écouter ce qu'avaient à leur dire leurs sauveurs.

Jeena mit rapidement fin à cette attente et s'adressa à la foule qui s'était assise, disciplinée.

"Bon. Mesdames, messieurs, j'ai plusieurs questions à vous poser."

Un silence attentif régnait. Néates s'était assis sur les bords de la scène, prêt à écouter Jeena au même titre que les autres et donna l'impression de faire partie des secourus, ce qui ne manqua pas d'en faire sourire certains par sa candeur.

La jeune femme prit une grande inspiration. Une question lui brûlait les lèvres, mais elle se devait de la poser. Après s'être mordu la lèvre, elle lâcha durement :

"Bonsoir à tous ! Je ne sais pas vraiment par quoi commencer, alors je vais peut-être être trop directe... Ainsi : j'aimerais savoir si je n'ai pas fait une erreur en vous libérant... Autrement dit... Qu'avez-vous fait pour devenir esclaves ?"

Des regards s'échangèrent, certains incrédules, d'autres paniqués. Personne ne répondit et tous finirent par regarder de nouveau la druidesse. Mais, dans ce silence gêné, une voix retentit du centre de la foule :

"Rien. On a rien fait."

L'auditoire se retourna vers la personne qui venait de parler, Jeena retrouva un grand sourire dès qu'elle aperçut le nouveau centre d'attention. Après avoir capté son regard, elle lui fit signe de s'avancer.

Un jeune homme se leva, il avait une démarche nonchalante, les mains dans les poches, un regard sérieux, des cheveux coupés courts et visiblement jeune. Il arborait la moue mécontente de l'adolescent que l'on force à venir au tableau.

En espérant le détendre, elle s'avança vers lui, le prit par la main et l'invita à côté de là où elle se trouvait jusqu'à présent. Non sans comprendre qu'elle l'avait fait rougir face à une trentaine de personnes, elle enchaîna :

"- Pourquoi être enfermés si vous n'avez "rien" fait ?

- Parce qu'on était faibles, incapable de se défendre.

- On n'enferme pas les gens parce qu'ils sont faibles ! Ça n'aurait aucun sens !

- Bah si tu me crois pas, t'as qu'à demander aux autres." finit-il par lâcher avec un grand geste vers la foule.

Jeena suivi son geste du regard et vit de nombreux visages graves, tournés vers le sol.

"Je ne pense pas qu'il mente, Jeena." lâcha doucement Néates.

En effet, ces personnes avaient des yeux trop tristes. Trop... humains. Et cela confirmerait aussi la présence d'enfants dans ce groupe.

"- Comment tu t'appelles jeune homme ?

- Je suis Beran.

- Très bien, Beran, pourquoi le cadre vous appelait les "Dabomés" ?

- C'est le nom qu'on porte quand on est enfermés dans la Daboltraz.

La Couleur de l'IrisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant