Chapitre 20

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Le groupe avait quitté l'auberge en début de mâtiné et cheminait maintenant d'un bon pas en direction du château, s'il gardaient l'allure, ils seraient arrivés en tout début de soirée. Lyria avait demandé à monter avec le jeune Rorik, qui avait accepté en rougissant faiblement. Elle avait fini par en déduire des réactions du jeune homme qu'il ne devait pas avoir l'habitude de traiter avec la gente féminine, et cela l'amusait quelque peu. Sur le chemin, le soldat essaya d'entretenir la conversation avec la jeune femme. Mais bien que reconnaissante, celle-ci ne parvenait pas à accorder toute son attention au gentil guerrier qui essayait de la distraire. Lyria était toujours contrariée par le comportement odieux du Prince, et bien qu'elle avait prévu de ne pas finir le trajet avec lui, le fait qu'il monte sur son étalon et parte sans même lui adresser un regard l'avait fortement irrité. C'était à elle d'être contrariée, pas le contraire ! Le groupe voyageait depuis quelques heures et Lyria commençait à avoir faim, elle avait eu juste le temps de croquer dans une pomme avant son affrontement verbal avec le Prince, puis la faim s'était envolée. Mais elle était revenu et la jeune femme espérait secrètement qu'ils n'allaient pas tarder à faire une halte pour déjeuner. Le ciel parut l'entendre car le Prince choisit ce moment pour annoncer que les chevaux avaient besoin d'une pause, et qu'ils en profiteraient pour se restaurer. Le groupe quitta le chemin principal pour se diriger vers un petit cours d'eau où leurs montures pourraient s'abreuver. Rorik aida la jeune femme à mettre pied à terre et l'invita à s'installer sur un tronc renversé. En attendant que les hommes déchargent les quelques vivres que l'aubergiste leur avait fournis avant leurs départs, elle sortit de sous son pull l'écaille que Makara avait attaché à un lacet de cuire. La tournant entre ses doigts, les différentes nuances de bleu brillaient au soleil. Elle repensait à cette rencontre fortuite avec ce majestueux dragon. A ce souvenir un sourire naquit sur ses lèvres, dans ce monde étrange et dangereux, elle avait eu la chance de croiser sur son chemin une sublime créature et cette pensé lui remonta légèrement le morale. Makara pris place aux côté de la jeune femme et l'observa d'un regard bienveillant.

- Vous êtes étonnante. La jeune femme la regarda d'un air surpris.

- Vous croyez ? Vous vous trompez, je n'ai rien d'étonnant.

- Vous avez tenu tête à un homme très redouté ici et dans les contrées voisines.

- Je dois vous avouer quelque chose. La jeune femme s'approcha plus près de la Doyenne pour qu'elle soit seul à l'entendre et utilisa le ton de la confiance. J'ai eu peur qu'il dégaine son épée et m'embroche avec.

La Sorcière se mit à rire si fort que les hommes se retournèrent, surpris par le soudain éclat de rire de la doyenne. La jeune femme se surpris à glousser en essayant de calmer sa voisine, sa bonne humeur étant contagieuse. Dès que les deux femmes se furent calmées, Lyria soupira.

- Le Prince ... Il ... Je ne le comprends pas ... Qu'est-ce que je lui ai fait pour qu'il me déteste à ce point là ? Moi non plus je ne l'aime pas beaucoup, mais j'ai de bonnes raisons ! Je ne peux pas apprécier quelqu'un qui me traite comme il le fait ... Mais moi je ne lui ai rien fais ... La Sorcière prit une grande inspiration et leva les yeux vers le ciel.

- Vous n'étiez pas ce à quoi il s'attendait.

- Oui merci, on me le rabâche depuis que je suis apparu comme par magie dans ce monde ... Pardon je m'emporte ...

- Je vous en pris mon enfant, je me doute bien que votre situation est loin d'être facile et je pense être loin de me douter de ce qu'il se passe réellement dans votre cœur et dans votre tête. Mais vous souhaitez savoir pourquoi le Prince se comporte ainsi avec vous donc je tente de vous éclairer, même si je n'ai sûrement pas toutes les réponses. Après une petite pause, elle reprit. Depuis sa naissance, le jeune Prince à été élevé avec pour objectif de rencontrer l'Elu. Chaque pas, chaque progrès qu'il faisait était motivé par la légende que j'ai compté l'autre jour, vous souvenez-vous ? Il a eu le temps de s'imaginer ce à quoi ressemblerait son héros. Et visiblement vous ne correspondez pas à ses attentes.

- Je peux comprendre qu'il soit déçu, mais je n'ai rien demandé. J'ai du mal à me souvenir de ce que je faisais avant d'apparaître dans votre monde, mes pensées sont floues, et je ne sais pas comment j'ai pu être blessé. Mais je suis pratiquement sûre d'une chose, c'est qu'il y a erreur sur la personne, je ne devrais pas être là.

Les deux femmes furent interrompues par Angus qui leur apporta à chacune un morceau de pain accompagné d'un bout de fromage, d'une tranche de viande séchée et d'une pomme. La jeune femme remercia le guerrier et commença à manger avec appétit se petit encas sous le regard compatissent de la Doyenne.

Le soleil commençait à décliner dans le ciel lorsqu'ils atteignirent les remparts de la capitale Astaréis, ville qui entourait le château. Kei envoya deux soldats afin d'informer les gardes et ses Majestés de leurs arrivées. Le trajet de retour avait mis plus de temps que l'aller dû à l'arrêt imprévus à l'auberge, mais quatre jours pour un voyage de cette distance n'était pas étonnant. Les pas des chevaux résonnèrent entre les mûres de la capitale, attirant quelques curieux se demandant pourquoi une troupe royale menée par le Prince défilait ainsi dans les rues. Lyria avait levé sur sa tête la capuche de sa cape sous les conseils de Rorik, cachant ainsi son visage et ses particularités physique.

- Nous devons rentrer au château. S'ils vous voient, leurs joies risque de créer un mouvement de foule et cela pourrait être dangereux.

Caché sous sa capuche, elle pouvait entendre les éclats de voix se transformer en murmures sur leurs passages, les rires des enfants disparaître derrière les portes qui claquent, même les chiens n'aboyaient plus. L'atmosphère était étrange, pesante.

- Que se passe-t-il Rorik ? Avait-elle chuchoté. Pourquoi les gens se taisent sur notre passage ?

- Ils ont peur.

- Peur de quoi ?

- Du Prince. Après une courte pause, le soldat repris. Vous avez surement pu le deviner à présent mais Son Altesse est un redoutable guerrier sans aucune pitié avec ses ennemis. Ses victoires sur le champ de bataille, sa hargne au combat et le nombre incalculable de victimes à son arc font qu'il est craint de tous, même de son propre peuple.

- Mais cela n'a aucun sens, il ne ferait pas de mal à ses sujets, si ? Voyant que le jeune homme ne répondait pas, la jeune femme senti la crainte monter. ... Si ?

- Il ne ferait pas de mal à des innocents. Mais commettez un crime et il ordonnera un châtiment à la hauteur du délit commis. Notre Prince n'est pas un tendre, mais nous qui sommes proches de lui savons qu'il est juste ... La plupart du temps ... De ce que j'en sais, gouverner n'a jamais été son but premier donc les rapport qu'il entretient avec son peuple lui importe peu, du moment qu'il n'y a pas de soulèvement cela lui convient. Et s'il faut pour cela qu'il inspire la peur et la crainte dans son propre royaume, alors il sera pour tous le Guerrier Sanguinaire.

Lyria ne put répondre à cette sinistre déclaration car un bruit de corne résonna dans le crépuscule. La jeune femme releva légèrement la tête et vit qu'ils étaient arriver devant une imposante grille en fer forgé. Dès que le Prince eut décliné son identité, la herse se leva dans un grincement sinistre afin de les laisser entrer et se referma lorsqu'ils furent tous dans la cour du château, telle une immense bouche avalant ses victimes. Il n'était plus possible à Lyria de faire demi-tour à présent.

De l'Autre CôtéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant