Chapitre 2 : Un nouvel environnement

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   Depuis le jour où j'avais commencé mon travail de garde du corps, j'avais pris conscience de tout ce que ce métier impliquait. En particulier le fait que le garde du corps d'un gangster se doit d'être comme son ombre : intimidant, toujours à ses côtés, et surtout, discret. Autrement dit, j'avais pris l'habitude de rester en retrait, ne faisant part de ma présence qu'en cas de nécessité, et surtout de laisser le luxe et les manières à mon employeur.

   L'accueil qui m'avait été fait à la demeure des Romano allait contre toutes ces choses que l'on m'avait apprises.

   Je n'avais pas été si choquée que cela lorsqu'un chauffeur était venu spécifiquement me chercher. Se rendre chez des mafieux avec un véhicule inconnu pouvait être mal pris, alors il n'était pas inhabituel qu'un de leur chauffeurs attitrés vienne conduire directement chez eux un nouvel employé.

   Ce qui était définitivement étrange, cependant, c'était le véhicule en lui-même : une impressionnante limousine couleur ébène, avec même un mini-bar champagne compris en prime. Tout cela uniquement moi, simple nouvelle recrue temporaire que j'étais. Cet élan de générosité pour un membre du petit personnel était loin d'être ordinaire mais je mis cela sur le compte d'un probable excès d'orgueil de ce cher Dario. Je ne pris pas une seule goutte de champagne. Il était trop tôt pour lui faire confiance.

   Tandis que la voiture quittait la ruelle, je jetais un dernier coup d'œil derrière moi. La demeure de Clark devenait de plus en plus lointaine, et je sentis mon cœur se serrer. Je n'avais pas pu lui dire au revoir ce matin, lui ayant été contraint de partir aux aurores pour le travail. Je me sentais bête, mais il me manquait déjà.

   Les rues se transformèrent petit à petit. Les habitations se succédaient, jusqu'à ce qu'on soit assez éloigné pour que je n'en reconnaisse plus aucune. Bientôt, la limousine s'engouffra dans une allée d'arbres où la route était à peine visible. Elle ne tarda pas à en sortir, et à travers la vitre teintée, je pus apercevoir pour la première fois le sublime manoir où j'allais loger pendant presqu'un mois. C'était un bâtiment en pierre probablement vieux de plusieurs siècles. Les nombreuses voitures de luxe garées non loin et la gigantesque piscine turquoise y ajoutaient une touche de modernité, mais il avait malgré cela l'air d'être tout droit sorti d'une autre époque.

   À partir de là, les choses commencèrent à devenir de plus en plus bizarres.

   Le comportement des employés avec moi fut ce qui m'alerta en premier. « Vous êtes la bienvenue, mademoiselle », « Faites comme chez vous, mademoiselle », « Je suis à votre service, mademoiselle » : non tu ne l'es pas, nous sommes collègues ! Un peu de politesse n'était pas bizarre, mais je trouvais leur comportement un peu trop excessif.

   Un domestique me guida vers l'entrée. Je lui fis aussitôt une remarque :

   – C'est l'entrée principale, non ? Les employés ne sont-ils pas censés prendre l'entrée de service ?

   – Normalement oui, mais monsieur Romano a insisté pour que vous soyez traitée comme une invitée de marque.

   Ah. Ceci expliquait cela. Visiblement, tous ces artifices avaient bien pour but de m'impressionner. Il y avait deux raisons possibles à cela : première raison, Dario voulait faire part à Clark de son amitié en passant par moi, tout en frimant avec sa limousine et son personnel hors pair par la même occasion. Deuxième raison possible, Dario Romano était bien comme les rumeurs le décrivaient. Et cette possibilité m'épuisait déjà.

   Après avoir mis le pied à l'intérieur, un domestique me retira mon manteau. Si l'extérieur l'était déjà, le cœur de la maison était encore plus magnifique. Des œuvres d'art ornaient les murs en bois sculpté. Un lustre en cristal, sans doute plus cher que tout ce que je n'avais jamais pu toucher, était accroché au plafond. L'architecture avait beau être ancienne, les nombreux meubles en métal ébène et la rambarde en verre qui soutenait le grand escalier en face de l'entrée prouvaient qu'elle avait su s'adapter au fil des époques.

[EN PAUSE] Douce ViolenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant