Chapitre 19 : Zack

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   Alors que j'arrivais non loin de la terrasse, j'aperçus la silhouette longiligne de Zack en train de fumer une cigarette. Lorsque j'entrai dans son champ de vision, il me salua d'un hochement de tête. Je m'avançai et m'adossai au mur à côté de lui.

   — Je peux t'en emprunter une ? lui demandai-je en désignant son paquet de cigarettes.

   Sans une quelconque protestation, il m'en tendit une et une fois entre mes lèvres, prit la peine de me l'allumer avec son propre briquet.

   — Je ne savais pas que tu fumais, fit-il remarquer.

   — Seulement pendant les moments stressants, expliquai-je en soufflant une bouffée de fumée.

   — Tout va bien ?

   — Oui, rien de grave. Juste la routine.

   La situation ne pourrait pas être pire, répondis-je intérieurement.

   Mes poumons, plus habitués à la cigarette depuis longtemps, firent cracher un toussotement douloureux de ma gorge. Mais je humai l'odeur apaisante du tabac, mon seul réconfort en cette froide matinée. Comme à son habitude, Zack restait silencieux, lui aussi se satisfaisait probablement de ces moments en privé uniques propres à notre profession.

   — Tu n'es pas avec Dario ? lui demandai-je.

   — Non, il s'est enfermé dans son bureau. Ce qui n'est pas habituel.

   Il allait falloir que je passe le mot à Dario d'arrêter d'avoir l'air aussi suspect. Il ne faisait que se mettre lui-même des bâtons dans ses propres roues.

   Il me vint à l'esprit que je n'avais jamais vraiment eu l'occasion de discuter avec Zack. Il était loin d'être de naturel bavard, mais depuis notre match amical de la veille, j'avais la nette impression que nous nous étions inconsciemment rapprochés.

   — Ça fait un moment que tu travailles pour lui ? lui demandai-je.

   — Quelques années.

   — J'imagine que c'est toi qui t'occupes de gérer ses trop nombreux ennemis, pas vrai ?

   — La plupart du temps, oui. Tu sais ce que c'est.

   Comme à l'ordinaire, les réponses de Zack étaient brèves, mais le ton de sa voix couplé au fait qu'il se montrait désormais plus enclin à faire la conversation me donnaient le sentiment qu'il s'était enfin habitué à ma présence. Les premiers jours, il n'aurait même pas pris la peine de me répondre.

   Ce sentiment se confirma lorsque même après qu'il eut jeté sa cigarette au sol pour la piétiner, il resta à mes côtés pendant que je finissais la mienne. La surprise dut sans doute se lire sur mes traits au moment où il continua de lui-même la discussion :

   — C'est pareil pour toi ? Avec Clark Malcolm ?

   — Ça dépend. En général, je fais le travail d'un garde du corps plus « classique ». J'ai été relativement préservée des bains de sang.

   — Et s'il t'avait demandé de te salir les mains ? Tu l'aurais fait ?

   Ses traits se durcirent en une expression indéchiffrable. Ses yeux étaient rivés sur les miens, guettant ma réaction. Je soutins son regard.

   — Sans la moindre hésitation.

   Il ne répondit rien. Au lieu de cela, il se contenta de souffler du nez. Visiblement, ma réponse l'avait satisfait. Peut-être avait-il voulu évaluer de quelle trempe j'étais.

[EN PAUSE] Douce ViolenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant