Cette journée, par rapport à toutes celles passées aux côtés de Clark, m'avait fait prendre conscience d'une chose : surveiller une adolescente, c'est épuisant.
Rebecca avait passé l'après-midi à courir d'une boutique à l'autre, tout en criant et gesticulant dès qu'elle voyait le moindre article qui l'intéressait. Ses nombreuses amies, qui nous avaient vite rejointes, étaient toutes aussi bruyantes. Les filles n'accordèrent que très peu d'attention à ma présence. D'abord légèrement intriguées par ce nouveau visage, elles firent finalement totalement abstraction de ma personne en quelques minutes à peine. C'était comme si je n'étais pas là. Leurs seules paroles à mon égard furent pour me demander de porter leurs sacs qui s'accumulaient petit à petit. Un cauchemar.
Au fond de moi, je me demandais si mes émotions actuelles ne cachaient pas une certaine jalousie. Je n'avais jamais vraiment eu la chance d'avoir une adolescence normale, avec des amies et des sorties shopping. Les drames de la vie me demandaient constamment toute mon attention. Pas sûr que grandir avec un père violent et une mère absente soit l'idéal pour le développement d'une petite fille. Non, arrête de penser à ça, Ellie. Cette vie, ce n'est plus la tienne.
Lorsque nous rentrâmes enfin à la maison, il était déjà relativement tard. Le manoir était plongé dans le silence, mais les quelques domestiques que je vis passer devant nous étaient encore en plein travail. Les journées étaient toujours bien plus longues pour le personnel. Rebecca, elle, était toujours aussi pleine d'entrain. Elle me fit signe qu'elle avait l'intention de passer le reste de la soirée dans sa chambre. En d'autres mots, elle désirait de l'intimité, et cela voulait dire que j'avais quartier libre.
Ma première action, une fois revenue à mes appartements, fut de prendre une douche. Il avait fait chaud aujourd'hui, et mes vêtements collaient à ma peau. Fort heureusement pour moi, une salle de bain était accolée à ma chambre, ce qui m'évitait une potentielle situation embarrassante.
La salle de bain était plus petite que la chambre, mais toute aussi luxueuse. Plus je découvrais le manoir, plus j'avais l'impression d'être dans un autre monde.
Je déposa mes armes une à une. Pistolet, poignard, taser : j'aimais être bien équipée. Bien que je rangea la plupart dans ma valise personnelle, que je prenais toujours soin de verrouiller, je gardais un revolver avec moi à disposer à portée de main. Jamais, ô grand jamais je ne devais être en position de faiblesse. Une fois tout cela fait, je me délesta de mes vêtements et sauta dans la douche. L'eau glacée me revigora d'un coup sec, mes muscles se crispant sous l'effet du froid. J'y resta une dizaine de minutes, profitant de ce moment de répit.
Une fois sortie, propre et toute trace de sueur évaporée, j'agrippa une des serviettes qui m'avaient été mises à disposition. C'était comme être à l'hôtel.
De retour dans la chambre, je m'apprêtais à me rhabiller jusqu'à ce que quelque chose retienne mon attention. Sur mon lit se trouvait une boîte, un bout de papier trônant fièrement sur le couvercle. Dessus, ces mots étaient écrits :
" Cadeau de ma part.
Mets ça et rejoins moi dans la salle à manger, au premier étage.
D. "
Confuse par cet ordre aussi imprévu que soudain, j'ouvris finalement la boîte. J'y plongea les mains pour en sortir une magnifique robe de soirée noire à dos nu parsemée d'une multitude de strass, semblables à des étoiles étincelant dans la nuit. Sous la robe se trouvait des escarpins et des bijoux assortis. Tous étaient, sans le moindre doute, hors de prix.
Il veut vraiment que je mette ça ? J'avais déjà quelques appréhensions à son égard à cause de sa manie à ne pas respecter mon espace personnel, mais visiblement, tout était finalement limpide. Dario Romano m'invitait à un rendez-vous. Si cela avait été quelqu'un d'autre j'aurais été ravie. Mais le contexte actuel était loin de rendre cet élan de galanterie digne d'un quelconque enthousiasme. Non, cet acte ne signifiait en réalité qu'une chose : il ne me prenait pas au sérieux. Je n'étais pas vue pour mon métier, ma tâche ou mes compétences. À ses yeux, je n'étais rien de plus qu'une femme, mais dans le sens le plus péjoratif du terme. Rien de plus qu'une jolie chose à conquérir et à gâter pour satisfaire son égo masculin.
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[EN PAUSE] Douce Violence
RomanceEllie Winters est une garde du corps entièrement dévouée à l'homme qui l'a sauvée il y a plusieurs années. Mais cet homme est loin d'être un saint : c'est un gangster, et depuis qu'elle est à son service, Ellie s'est complètement habituée à agir pou...