Cette nuit-là, je dormis particulièrement mal.
Je me répétais en boucle les évènements de la veille, mon esprit empli d'émotions contradictoires. La colère, la culpabilité, et même ce sentiment honteusement plaisant qui m'avait parcourue lorsque Dario m'avait maintenue contre lui.
Qu'est ce que je devais faire maintenant ? Partir ? Faire comme si rien ne s'était passé ? Mais je ne pouvais pas fuir, car les mots qu'avait prononcé Dario sur Clark me hantaient. Je l'avais toujours vu comme mon sauveur, mais c'était seulement l'image que moi je m'étais faite de lui. Après tout, c'était un mafieux, lui aussi, et cela impliquait toute la cruauté qui venait avec ce métier. Dario avait peut-être raison, et ça me mettait en rage.
Et puis, je ne pouvais ignorer ce que j'avais vu ce soir. Cet Alexei et tous ces enfoirés qui s'étaient comportés comme des animaux, j'avais déjà vu certains d'entre eux avec Clark par le passé. Autrement dit, il travaillait avec des types pareil pendant tout ce temps, comme si c'était normal. Y avait-il encore un espoir pour que Clark soit différent ? Qu'il ne soit pas réellement lui aussi de la même trempe que tous ces hommes ?
Toutes ces questions me tracassèrent jusqu'à l'aube, où j'abandonna tout espoir de trouver le sommeil et sortis du lit sans effort.
On était samedi, ce qui voulait dire que Rebecca n'avait pas à aller au lycée aujourd'hui. Je repensais à son visage, lors de l'incident. Je ne l'avais encore jamais vue aussi effrayée. Elle n'était qu'une adolescente, mais ce genre de scène aurait de toute façon choqué n'importe quelle autre personne peu habituée. Dire qu'elle me disait être prête pour le monde de la mafia, sans doute devait-elle être désormais en train de se remettre en question.
Je me mis à repenser à ma propre adolescence, me demandant quand est-ce que j'avais eu ce déclic qui m'avait fait perdre mon innocence. Je ne parvins pas à mettre le doigt sur un souvenir précis. Peut-être même que je n'avais jamais été innocente, après tout.
Comme d'habitude à cette heure-ci, le manoir était plongé dans le silence. D'habitude, cela ne me dérangeait pas, mais cette fois-ci cela me forçait à devoir écouter mes pensées, et je n'aimais pas ça.
Lorsque le silence devint finalement trop étouffant, je me précipita à l'extérieur par la première porte que je croisa sur mon passage.
J'étais sur un balcon, ce qui m'offrait une impressionnante vue d'ensemble sur le jardin. L'air frais et le chant des oiseaux apaisèrent petit à petit mon cœur meurtri. Je pris une grande bouffée d'air frais, la laissant remplir mes poumons de fond en comble. J'essayai de me concentrer sur le moindre petit bruit afin de trouver de quoi supplanter les pensées intrusives. Parmi la myriade de bruits de nature, je reconnus une voix familière.
Sur la terrasse, donc en dessous de là où j'étais, un homme était au téléphone, seulement éclairé par les premiers rayons du soleil. Un rapide coup d'œil sur cette silhouette couverte de tatouages me permit de deviner qu'il s'agissait de Zack. Les rôles étaient inversés cette fois-ci : c'était lui qui ne m'avait pas vu, et je me satisfis de ce petit moment de supériorité impromptu.
Je ne pouvais entendre que des bribes de la conversation de là où j'ai étais, et je n'avais de toute façon pas l'intention de l'espionner. Mais il y avait quelque chose d'étrange qui retint mon attention : certains des mots qu'il utilisait n'avaient pas leur place dans une discussion normale.
— La semaine prochaine, oui... Tout est déjà prévu par le patron. Une balle dans la tête, et on entendra plus jamais parler de lui.
C'était visiblement une conversation "professionnelle", le genre que l'on n'est pas censés entendre. Je savais que je n'avais personnellement rien à craindre, mais je pris tout de même soin de ne pas alerter ma présence.
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[EN PAUSE] Douce Violence
RomanceEllie Winters est une garde du corps entièrement dévouée à l'homme qui l'a sauvée il y a plusieurs années. Mais cet homme est loin d'être un saint : c'est un gangster, et depuis qu'elle est à son service, Ellie s'est complètement habituée à agir pou...