Chapitre 3

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Pourquoi ? Mais pourquoi était-elle née fille ? Qui se souciait de savoir comment dresser une table ? Comment se comporter en présence de sa belle-mère ? Comment s'habiller pour la réception en l'honneur d'un cousin éloigné rentré de bataille ? Tous ces cours, réservés aux filles, lui semblaient ridicules. Les garçons, eux, se formaient au maniement des armes, à l'agilité à cheval, aux entraînements physiques.

– Je t'assure, Alixe, je n'en peux plus d'écouter ces idioties.

– N'exagère pas. La plupart des cours sont les mêmes que ceux des garçons.

Les deux amies remontaient la route pour se rendre à l'école du village.

– N'empêche ! On devrait avoir le choix de suivre les cours qui nous plaisent le plus.

– C'est sûr que tu seras drôlement avancée de savoir mener un duel à l'épée quand ton mari te demandera de lui servir à boire.

Elina jeta un regard noir à son amie.

– Merci pour le soutien.

– Tu ne parles que de ça pour le moment, Elina. J'ai parfois envie de changer de sujet de conversation ! De toute façon, c'est comme ça, on n'y changera rien, alors au lieu de te rendre malheureuse, accepte que tu es une fille et que, par conséquent, tu suis les cours réservés aux filles.

Cette réaction noua la gorge d'Elina. Alixe, sa meilleure amie de toujours, connaissait par cœur son caractère rebelle. D'habitude, elle la soutenait dans ses délires, ses rêves impossibles. Depuis quelques semaines, elle semblait distante.

Alixe accéléra le pas.

– On doit se dépêcher ! s'agaça-t-elle.

– Vas-y, je te rejoins.

Elina la regarda s'éloigner d'un pas vif et les larmes lui montèrent aux yeux. Elle franchit la porte d'enceinte, sans prendre la peine de saluer le garde. Elle ne tourna pas non plus la tête pour admirer la demeure de son chevalier fétiche, Falkor, située en bordure de l'une des ruelles.

La jeune fille caressa Kiko, blotti sur son épaule. Lui, au moins, ne la jugeait jamais. La douceur de son pelage contre son cou l'apaisait et il avait le don de lui donner de tendres petits coups de museau.

– Heureusement que je t'ai, toi, lui murmura-t-elle.

Le petit animal fixait un point devant lui et Elina suivit son regard. Une foule inhabituelle occupait la place du Marché. Elle aperçut un crieur, entouré de quatre gardes. Sa curiosité la poussa à s'approcher. L'homme prit la parole et le brouhaha s'estompa.

– Oyez, Oyez, votre attention s'il vous plaît !

Il parcourut l'assemblée des yeux, comme pour s'assurer que chaque personne l'écoutait.

– Au nom de Sa Majesté, le Roi Amaury de Languedoc, nous vous annonçons l'organisation d'un grand événement : un concours va être organisé afin de recruter de nouveaux apprentis-chevaliers.

Elina n'en croyait pas ses oreilles. À en juger par les réactions qui fusaient, le reste de l'assemblée non plus.

– Les inscriptions se dérouleront le samedi vingt août à midi, ici-même, sur la place du Marché. Les épreuves, quant à elles, débuteront le samedi trois septembre et s'étaleront sur plusieurs jours.

– Incroyable... murmura-t-elle.

– Il faut savoir que ce concours est ouvert à tous les jeunes hommes de la région, âgés entre douze et quinze ans, issus ou non de familles nobles. Un seul candidat par famille pourra être retenu.

ElinaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant