Chapitre 6

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Une dizaine de minutes après avoir reçu la nouvelle, le quatuor d'Hybrides entrait dans le petit van noir qui attendait pour les amener à ce bâtiment que tous appelaient la Tour Brisée. Pourquoi brisée ? Cinq cents ans auparavant, lorsqu'elle fut bâtie, sa pointe côtoyait les nuages rougeâtres du ciel et s'apparentait à une colonne de verre qui se resserrait à mesure que l'on se rapprochait du sommet.

Cependant, soixante ans avant le début de leurs aventures, un séisme titanesque avait secoué l'intégralité de Pleym-Shurg. Durant ce même tremblement de terre, la moitié supérieure de la Tour s'était détachée puis écrasée en contrebas, provoquant de monstrueux dégâts qui ravagèrent la quasi-totalité de la Ville-Capitale. De nombreuses pertes humaines ont aussi été à déplorer, victimes du séisme ou de l'effondrement de la Tour. Les Enfants du Soleil, alors extrêmement puissants et influents, avaient revendiqué le séisme destiné, selon eux, à rappeler la place de l'Homme en ce monde : des créatures terrifiées, obligées de se regrouper derrière un mur pour espérer prospérer.

Après le nettoyage et la rénovation des bâtiments de la capitale, le Conseil de Pleym-Shurg avait décidé de conserver son apparence extérieure, aux murs de verre et au sommet ravagé, car ils voyaient en ce tremblement de terre la manifestation d'un être supérieur et omnipotent qui punissait les humains pour leur arrogance et leur vanité. Depuis ce jour, les membres dirigeants du Monde Humain vivaient et gouvernaient depuis ce que chacun appelait désormais la Tour Brisée.

Même depuis la base des Hybrides, Zircon pouvait voir le bâtiment sans trop de peine. Sur le chemin, Thryt ne pouvait cacher son excitation quant à la mission à venir :

« Vous vous rendez compte ? souriait-il. Le Conseil demande notre aide ! Le groupe de personnes le plus important du Monde Humain a besoin de nous, c'est pas incroyable ? »

Zircon sourit faiblement, amusé par la réaction presque enfantine de son ami. Subur, l'air gêné, évitait tout contact du regard avec le messager et Arca fixait les immeubles qui défilaient sous ses yeux, sans émettre le moindre son. Après une vingtaine de minutes de trajet, ils s'arrêtèrent devant l'entrée principale du plus grand monument de la capitale. Il s'agissait d'un hall d'accueil avec un sol de marbre blanc et noir, des colonnes de la même couleur, des murs qui émettaient une lumière entre jaune et orange ainsi que des ascenseurs d'un gris argenté au fond de la salle.

Ils empruntèrent l'un de ces derniers pour monter jusqu'au centième étage. Lorsque les portes s'ouvrirent, ils purent admirer un grand corridor blanc comme neige avec de grands rideaux rouges qui recouvraient les murs. De temps à autre, des portraits encadrés servaient d'ornements et de décoration.

Face à eux, un homme d'une soixantaine d'années en apparence, les cheveux poivre et sel brossés vers l'arrière, une barbe grisonnante et des yeux d'un gris orageux, les attendait avec un sourire chaleureux :

« Bienvenue, Hybrides, dans le Sanctuaire du Conseil. Si vous voulez bien me suivre... »

Il les invita d'un geste à s'aventurer dans le couloir. Puisqu'il s'agissait de la première fois qu'ils rencontraient les dirigeants de Pleym-Shurg, Zircon se demanda s'ils devaient prouver leur valeur ou s'essuyer les pieds avant de se présenter. Pourtant, l'inconnu ne semblait rien leur demander d'implicite, ce qui les encouragea à le suivre.

Sur le chemin, Zircon admira les différents portraits au mur tandis qu'ils s'approchaient d'une salle circulaire dans laquelle les attendaient le Conseil de Pleym-Shurg, confortablement assis dans leurs grands fauteuils de cuir noir. Celui qui les avait conduit jusqu'à la salle alla s'installer dans le dernier siège vide tandis que les quatre Hybrides se retrouvaient au centre du cercle de dirigeants.

Celui qui occupait le plus grand des fauteuils se leva : un vieillard aux cheveux blancs et la barbe touchant presque son ventre. Un élément en particulier attira l'attention de Zircon : une chevalière dorée rutilante qui représentait un cygne déployant ses ailes, si bien polie qu'elle reflétait la lumière plus intensément que sa source de départ, rendant presque désagréable le fait de regarder l'homme qui déclara :

Chroniques de Pleym-Shurg : Le complot du DépeceurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant