Chapitre 13

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2 ANS ET DEMI PLUS TOT

Je rentrais tard, encore, comme tous les soirs depuis quelques mois. Je marchais en direction de l'appartement d'une collègue et amie de travail qui me logeais, alors que la nuit sombre envahissait le ciel. J'enchainais les heures supplémentaires le soir au restaurant pour avoir suffisamment d'argent. Cela m'exténuait certes, mais je voulais me prouver que j'étais capable de vivre seule, comme depuis plus de deux ans déjà. Et même si les déceptions sont présentes, je savais que cela était mieux que d'être resté avec mes parents. Peut-être me sentais-je vivre davantage.

Je trainais le pas dans l'avenue, presque déserte à cette heure-ci, hormis les clients tardifs des bars. Londres avait une ambiance très particulière, en tout cas sa périphérie, de nuit. Même si je n'étais pas en centre-ville, les avenues étaient prises d'assaut par les piétons et les véhicules la journée. Ces heures supplémentaires me ramenaient exténuée.

Les lampadaires éclairaient encore la route, contrastant avec la couleur sombre du ciel.

Une main fut soudainement plaquée sur ma bouche et mon corps tiré en arrière dans une rue annexe. Mon cœur s'emballa et mon cri fut étouffé par la puissante main sur ma bouche.

Je mordais vivement la main de l'homme posé sur ma bouche, qui la retira aussitôt dans un grognement camouflant un cri. Ma voix semblait avoir disparue et nul son ne sortait de ma gorge. Son autre main tenait fermement mon cou, me tirant en arrière. Je balançais mon pied avec vivacité en arrière, frappant directement le genou de mon agresseur, ce dernier tombant au sol. Je me défis de son emprise lors qu'il se relevait. Son visage arpentait une expression douloureuse.

_ « Petite pute » Grogna-t-il. Sa main agrippa fermement mon bras. Je lançais à nouveau mon pied dans sa direction, atteignant directement son entre-jambe. Un grognement lui échappa à nouveau et je me saisissais de son bras, le tirant vers l'arrière, prête à lui briser. Il chuta au sol et je l'accompagnais, toujours saisie de son bras. Il se retrouva à plat ventre contre le sol, sa joue gauche s'écrasant contre le bitume frais. Je tirais vivement sur son bras, un craquement se faisant entendre et son hurlement étouffé contre le sol.

_ « J'espère que tu ne pourras plus jamais t'en servir » Dis-je avec rage en lui assénant un dernier coup entre les jambes. Je me relevais et repartais en courant en direction de l'immeuble de Stacy. Je rentrais à bout de souffle, complètement décoiffée et regagnais directement ma chambre. Je me laissais tomber sur le lit. Tous les sentiments se bousculaient en moi, rage, peur, tristesse, désespoir, fierté. Je n'avais aucune réaction, aucune larme ne coula, je restais de marbre, allongée sur mon lit.

Deux jours plus tard, je rentrais dans l'après-midi du restaurant. Je comptais me reposer avant de reprendre  mon service le soir même. J'arrivais à hauteur du grand immeuble grisâtre dans lequel se situait l'appartement de Stacy. J'ai toujours fait mon possible pour partager les frais, mais je sais qu'elle fait en sorte que je ne doive pas lui donner une part équitable.                                                                                                                                                                                                                                                                            

Un homme se tenait devant la porte de l'appartement, adossé au mur. Il avait à priori une quarantaine d'année, une tenue simple et un regard sombre. Je fronçais les sourcils. Je ne l'avais jamais vu auparavant. 

Je m'approchais du seuil  de la porte tout en essayant de l'ignorer.

_ « Miss Forms ? » Demanda-t-il d'un ton grave tandis que je glissais la clef dans la serrure.

Je relevais la tête surprise.

_ « Je euh- Oui ? »

_ « Je peux vous parler ? » Son ton était extrêmement distant.

_ « Je, suis désolée, je n'ai pas le temps » J'ouvrais la portière avec vivacité et rentrais dans l'appartement. Lorsque je refermais la porte, l'homme la bloqua avec son pied.

Je fronçais les sourcils.

_ « Ecoutez au moins ce que j'ai à vous proposer Miss Forms. »

J'ouvrais la porte à nouveau lentement et prudemment.

_ « Je sais tout sur vous »

_ « Je- ok, et ? » Mon ton plutôt sec, donna l'impression que je débordais d'assurance, mais j'étais plus confuse qu'autre chose en cet instant.

_ « Je sais que vous avez besoin de changer d'air, j'ai un travail pour vous »

_ « Quel genre de travail ?»

La confusion m'envahissait alors que l'homme se tenait stoïquement de l'autre côté de l'ouverture de la porte. Stacy pouvait débarquer à tout instant. 

_ « Sois vous acceptez sois vous refusez. Le premier contrat se trouve sur Bradford et je vous ai observé, je sais que vous êtes quelqu'un de très compétente dans ce domaine. »

_ « Quel domaine ? Et quel est votre nom d'abord ? Votre histoire ne tient pas debout »

J'hésitais à refermer à nouveau la porte sur cet homme alors que mes questions fusaient sans filtres. Je faisais tout mon possible pour passer inaperçue depuis plus de deux ans, comment cette homme pouvait-il connaître ma vie ?

_ « Mon nom ne vous sera pas utile et mon histoire tient plus debout que vous ne le pensez. » Lâcha-t-il d'un ton toujours aussi froid. « Tenez » Ajouta-t-il en me tendant une enveloppe à peine fermée. Je fronçais les sourcils. « Ce n'est pas un travail « normal » mais je suis certain que cela vous aidera. Mais c'est tout aussi dangereux."

Il s'en alla sans rien ajouter, me laissant bras ballant avec l'enveloppe. Je refermais la porte et ouvrais l'enveloppe d'un air suspicieux. Mes yeux s'agrandirent lorsque je lu les mots paraphés sur la feuille.

Chasseuse de primes, oh et bien. Si ce travail pouvait m'emmener loin d'ici... Une carte d'identité était jointe, seul mon nom était changé dessus. Parker. Haley Parker.


*****


Dana était encore à Londres et je m'impatientais de plus en plus de son retour.  Elle était presque la seule personne avec qui je faisais des choses dans la semaine. Je ne suis pas habituée non plus à être longtemps sans elle. Depuis plus d'un an et demi que je la connais, nous passons presque la moitié de notre temps ensemble.

Je me souviens encore de notre rencontre quelques mois à peine après mon arrivée sur Bradford. J'avais cherché un job à plein temps en vue de me trouver un appartement. Je m'étais donc proposée comme vendeuse dans un petit magasin. Dana y travaillait à mi-temps pour payer ses études de journalisme. Nous avions tout de suite accroché et sommes devenues essentielles l'une pour l'autre, même après avoir quitté ce travail.  Et cela malgré le fait que je n'éprouvais presque plus aucuns sentiments pour les gens autour de moi. J'étais sincère mais mon affection se limitait. Avec Dana ce n'était pas la même chose.

Je passais mon temps à réfléchir ces derniers jours. Cet échec sur le contrat de Zayn me perturbait. Je devais agir au plus vite, ou la situation pouvait bien devenir incontrôlable. Je ne pouvais pas envisager d'éliminer un "ami". Je n'arrivais pas à comprendre ce que cela me faisait. D'un côté, j'étais rassurée et heureuse de le revoir, de l'autre extrêmement frustrée. Je ne devais pas laisser trainer les choses. Pourtant, je n'avais pas l'impression de m'en empêcher.

Je n'arrêtais pas de réfléchir à par quel moyen je pourrais  effectuer la tâche.  Il fallait juste que je sois rapide, « ne pas faire trop tarder le contrat ».

Maintenant que j'en savais plus sur lui, je devrais être disposée à agir mais j'avais le ressentiment que je ne pouvais pas. Pas encore.


Game Over ➳ Z.MOù les histoires vivent. Découvrez maintenant