Après la courte concertation autour de la Soule à la mairie, Milan Lazsco fut amené dans la salle principale de l'auberge de Soulevan, où se tenait le premier conseil de guerre des représentants du village. Le début de la confrontation était imminent et cela se sentait dans l'ambiance tendue. La Soule n'avait rien d'un jeu, chacun ici en était conscient ; au contraire, les enjeux pesaient lourd sur leurs épaules.
La salle du conseil était une immense cave, au plafond soutenu par des arches de pierre voûtées. A vue d'œil, ses dimensions correspondaient avec celles de l'auberge, bien que l'endroit ne parût pas aussi vaste au premier regard, du fait que ses nombreuses arches délimitaient une partie centrale de surface respectable, mais fragmentaient le pourtour en de nombreuses alcôves indépendantes, dont certaines abritaient de petits monuments mémoriels.
Ici l'on aurait pu réunir presque la totalité d'un village tel que Soulevan, mais la salle ne semblait visiblement pas utilisée à des fins de réception. En d'autres circonstances, elle aurait pu être très agréable, si toutefois elle n'avait pas été aussi sombre : tous les volets, situés en hauteur sur le pourtour, étaient barricadés, et seules quelques torches faisaient un peu de lumière à l'intérieur.
– Vous allez me dire que vous n'avez pas d'électricité à Soulevan, s'étonna Milan.
– Les Tarsiens ne jugent pas utile de nous en fournir.
– Moi qui croyais que c'en était fini des querelles de clocher.– Taisez-vous et asseyez-vous, ordonna Sandoz. Nous avons répondu à vos questions, maintenant c'est à vous de répondre aux nôtres.
Milan s'assit à une longue table de bois massif, où se trouvaient déjà nombre de personnes, et qui aurait pu en accueillir bien davantage.
A l'une des extrémités de cette longue table, il y avait Taronne, le chef de sa prestigieuse famille, cet individu charismatique et puissamment charpenté, ainsi que sa femme Bora, plus fine, une femme noire aux yeux très clairs et au regard doux.
Le dénommé Malik attendait patiemment, en silence, assis tout près des Taronne. A côté de lui se trouvait un homme âgé affublé d'une blouse blanche qui se faisait appeler simplement "Toubib". Quoiqu'il ne fut pas médecin, ce dernier semblait suffisamment érudit pour se faire passer pour tel au sein de la petite communauté.
A l'autre bout de la table, il y avait le clan Buldor, comptant trois représentants très remontés, qui rongeaient le frein de leur récente défaite mais se faisaient un devoir d'être présents malgré tout : le meneur lui-même, accompagné de ses deux plus intimidants lieutenants.
Sans oublier la présence de Mama Galia, bien que cette dernière semblât préférer rester assise à l'écart, sur l'un des bancs placés à distance de la grande table. En la voyant ainsi isolée, Milan se demanda quel était exactement la position de la revêche aubergiste dans la hiérarchie bien particulière de Soulevan.
Au centre de la table, à la droite de Sandoz, se trouvait une vieille femme, donnant l'impression par sa position de présider le conseil. C'était la doyenne du village en réalité, et chacun ici la nommait seulement par ce titre. Elle était maigre et ridée, voûtée, bien que sans donner une impression de fragilité. Son âge était avancé, elle ne témoignait guère de vivacité, au contraire son indolence lui donnait presque l'impression de dormir. A peine si elle dévisagea Milan lorsqu'il entra.
Ceux qui accompagnaient Milan prirent place en face de Sandoz et de la Doyenne : le grisonnant Parvis, son colosse de fils Rancor, la jeune Manille, ainsi que la personnalité encombrante du Maire Faurou.
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Milan Lazsco : La Soule [E2 Quadrilogie du vampire]
VampireAu détour d'une route des Pyrénées, deux villages se livrent à une compétition antique et mortelle. Serait-ce l'œuvre d'une malédiction ? Il se trouve que même quand on est un vampire, on ne plaisante pas avec les malédictions. ...