Au bout d'un moment, une fois que Sandoz eut semble-t-il recouvré son calme, Milan reprit la parole, sur un tout autre sujet.
– J'imagine que c'est surtout sur ma mission d'aujourd'hui que vous vouliez m'interroger, dit-il. Vous vouliez mon avis sur Bora.
– Qui vous dit que ce n'est pas l'avis de Bora sur vous, que je veux ? rétorqua Sandoz, encore fâché part leur échange.
– Eh bien, parce que ce n'est pas moi que vous soupçonnez de massacrer les touristes...
Sandoz se retourna vers Milan avec un regard scrutateur.
– La couverture du garde du corps, c'est un peu mince, dit Milan. En réalité, vous m'avez envoyé pour que j'exerce mes talents de déduction sur elle.
– Admettons. Qu'avez-vous découvert ?– Ce que vous savez déjà, Bora est davantage qu'une herboriste. Elle possède une maîtrise des Arts occultes.
Sandoz grimaça, sans paraître comprendre. Milan insista :
– Ses connaissances dépassent le stade de l'érudition, elle sait certaines choses qui ne peuvent s'apprendre seules. Vous avez beaucoup de sorcières par ici ?
La surprise qui traversa le regard du chef du visage indiqua à Milan que visiblement ce n'était pas le cas.
– Autant pour moi, fit-il. Je pensais que vous saviez...
– Vous êtes en train de dire que Bora est une sorcière !
– Une Sorginà, une Belagile, comme on dit par ici. Ses mains et ses bras portaient des traces de coupures, de celles que l'on provoque avec une serpette.– Parce que c'est une herboriste !
– Pas lorsque les coupures se situent au niveau des veines. Cela signifie qu'elle prélève régulièrement son propre sang.Sandoz serra les dents, visiblement mal à l'aise avec cette conversation.
– Depuis le début, votre jeu utilise majoritairement les capacités combatives des hommes, dit Milan. Vous pensiez que les femmes faisaient quoi pendant ce temps ? Du tricot ?
– Vous êtes quoi en réalité, grommela le chef du village. Un spécialiste de l'occultisme ?
– Sort of... en ce qui concerne Bora, elle détient des capacités qui sortent de l'ordinaire. Elle a senti le retour de Taronne. Elle a placé une fleur protectrice sur la porte de la Doyenne, une sorte de paratonnerre magique. Je pense qu'elle connaît aussi bien que vous l'existence de l'entité qui tue ces gens.– Pourquoi utilisez-vous ce terme "entité", dit Sandoz. C'est un meurtrier.
– Seulement si ce meurtrier est "humain" !
– Vous prétendez qu'il ne l'est pas...– Nous savons tous les deux qu'il ne l'est pas, dit Milan. Tout comme Bora le sait. Malédiction, sorcières, ballon "fou", monstre tueur... j'imagine que vous commencez à percevoir le tableau dans son ensemble ?
– Ce qu'il y a de définitivement certain, dit Sandoz, c'est que vous n'êtes pas un touriste.
Un troisième jour consécutif arriva sans que quiconque ne prenne l'offensive.
A Soulevan, cette trêve troublait de plus en plus les esprits. D'autant que du côté de Tarsis, les choses avaient l'air de s'activer. Dès l'aube, les Tarsiens avaient installé de grands miroirs en de nombreux endroits de leur côté de la Doule, qu'ils utilisaient pour renvoyer les rayons du soleil en direction de Soulevan, aveuglant les guetteurs.
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Milan Lazsco : La Soule [E2 Quadrilogie du vampire]
VampirAu détour d'une route des Pyrénées, deux villages se livrent à une compétition antique et mortelle. Serait-ce l'œuvre d'une malédiction ? Il se trouve que même quand on est un vampire, on ne plaisante pas avec les malédictions. ...