📚𝓒𝓱𝓪𝓹𝓲𝓽𝓻𝓮 𝓭𝓲𝔁-𝓷𝓮𝓾𝓿𝓲𝓮𝓶𝓮📚

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En cette fin de vendredi après-midi, Langa et Reki étaient assis l'un en face de l'autre derrière la table en bois de la réserve

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En cette fin de vendredi après-midi, Langa et Reki étaient assis l'un en face de l'autre derrière la table en bois de la réserve. Lorsque la librairie était relativement calme et qu'Oka n'avait plus besoin de leur aide, il les autorisait parfois à lire un livre en attendant la fermeture, à condition qu'ils ne l'abîment pas. Ils prenaient alors un manga et s'installaient sur les chaises pliantes au coeur de la réserve grise et fraîche.

Odeurs de café, de cartons entassés, de poussières éparpillées. Vision d'un sol usé par les années, d'étagères en ferrailles fatiguées par le poids qu'elles supportaient, de fournitures mélangées, de matériel en papeterie dispersé. Bruits des pages qui se tournent, des pieds qui trépignent, de la salive déglutie. Les minutes s'écoulaient lentement dans ce lieu qui semblait figé dans le temps.

— Au fait, j'ai fini Le Seigneur des anneaux hier soir, annonça Langa. Je comprends pourquoi tu voulais tant que je le lise. C'est vrai que ça aurait été dommage de passer à coté de cette lecture.

Reki leva les yeux vers Langa. Un grand sourire étirait ses lèvres.

— Tu vois ! Ça me fait plaisir que ça t'ait plu, y a trop de gens qui passent à côté de ce chef d'œuvre de la littérature fantasy sous prétexte que le film leur suffit. Moi aussi, j'ai fini Kafka sur le rivage !

Ils avaient abandonné la lecture de leur manga. Les mots échangés avec leur interlocuteur étaient bien plus intéressants et excitants que les répliques clichés que se lançaient les héros du shōnen posé sur leurs genoux.

— Alors ? demanda Langa qui appréhendait l'avis de Reki.

Ce roman était particulier, il fallait une certaine ouverture d'esprit pour l'apprécier.

— C'était vraiment cool, ça m'a donné envie de lire d'autres titres de cet auteur ! Mais la scène avec le tueur de chat m'a traumatisé...

Langa fouilla un peu dans sa mémoire pour trouver à quelle scène il faisait référence. Il souffla du nez en se remémorant ces atroces lignes où un homme mystérieux sort une scie pour torturer un chat de la plus abominable des façons.

— Oui, moi aussi. On ne s'y attend pas.

— J'ai failli balancer le roman tellement ça m'a surpris ! Je pensais pas qu'il allait entrer dans les détails de manière aussi crue ! En tout cas, c'est sûr que ce bouquin est original, j'ai jamais lu ou entendu parler d'un livre qui lui ressemble de près ou de loin...

Langa hocha la tête, le sourire aux lèvres, heureux que sa lecture lui ait plu aussi. Alors que Langa se replongeait dans son manga, n'ayant plus rien à dire, Reki se pinça les lèvres. Il n'avait plus le coeur à poursuivre son shōnen.

Il était resté éveillé longtemps, cette nuit-là. Après tout, la fin du stage de Langa approchait à grands pas. Le lendemain soir, Langa ne serait plus là. Allongé dans son lit, se tournant et se retournant, Reki n'avait cessé de réfléchir aux paroles de Miya, qui lui disait de foncer avant qu'il ne soit trop tard, et à Langa, à son rire timide, à ses yeux lorsqu'il le regardait, au grain de sa voix lorsqu'il lui parlait...

Des heures s'étaient écoulées alors qu'il cherchait en vain à les chasser de son esprit. Vers une heure du matin, il avait fini par se rendre compte que ce n'était sûrement pas la bonne façon de procéder s'il voulait réussir à trouver le sommeil. Alors plutôt que de réfréner ses pensées et sentiments, il avait ouvert les yeux et les avait acceptés. A force de se triturer le coeur et les méninges, il avait fini par arriver à une conclusion : il ne voulait pas que sa relation avec Langa en reste là.

Ça semblait simple, comme raisonnement, mais Reki avait eu du mal à l'accepter. Il mourrait de gêne rien qu'en s'imaginant faire une déclaration à Langa ! Il s'était redressé sur son lit, un coussin serré contre son torse, et avait réfléchi à la façon dont il pourrait transmettre ses sentiments sans que cela ne soit trop embarrassant pour lui. Il avait eu beau peser le pour et le contre, tenter de se persuader que ce n'était pas grave si sa relation avec Langa n'évoluait pas, il savait qu'il se voilait la face.

Langa lui plaisait, et même un peu plus que ça. Il le regretterait probablement longtemps s'il le laissait partir sans rien tenter pour le retenir. Mais il attendrait le dernier jour pour faire le premier pas. Il n'avait pas envie que Langa le repousse et que sa dernière journée de travail avec lui soit tendue. Il n'était pas aveugle, il voyait bien que les sourires de Langa était plus grands lorsqu'ils lui étaient adressés, que son regard semblait s'illuminer lorsqu'il croisait le sien...

Mais il restait la probabilité, aussi faible soit-elle, qu'il puisse être rejeté. Reki y était préparé. Même si encore une fois, il avait dû y réfléchir longtemps, il préférait se prendre un râteau plutôt que de continuer à cacher la vérité.

Il lâcha son manga en se rendant compte qu'il avait commencé à tordre les pages. Il essaierait de le remettre dans l'étagère ni vu ni connu en espérant qu'Oka ne s'aperçoive de rien... En face de lui, Langa semblait plus détendu que d'habitude. Ses épaules étaient relâchées, son regard serein. Reki se surprit à lui en vouloir un peu. Il avait des cernes qui lui descendaient jusqu'aux genoux tandis que Langa avait un teint de poupée de porcelaine.

S'il avait su pourquoi Langa était si calme malgré l'approche de la fin du stage, sans doute aurait-il rougi de la tête aux pieds. Car contrairement à ce qu'il pensait, Langa n'avait pas été le seul à cogiter ces derniers jours. Seulement, Langa était différent. Car il n'avait pas peur de faire face à ses sentiments, et qu'il savait ce qu'il voulait. Lui aussi, avait prévu de faire comprendre à Reki ce qu'il ressentait le lendemain soir.

Mais sa déclaration s'avérait peut-être un peu plus directe et langoureuse que celle de Reki...

Mais sa déclaration s'avérait peut-être un peu plus directe et langoureuse que celle de Reki

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