3 - ROXANE

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Vendredi 10 septembre

"Alban, je pars."

Pas de réponse, mais je n'en attendais pas moins de sa part. Depuis deux jours, il est imbuvable. Encore plus que les dernières semaines, je veux dire. Tout ça pour que je n'y aille pas. Par esprit de contraction, et surtout par envie je dois bien l'admettre, je passe la porte avec soulagement et appelle l'ascenseur. Oui, je suis soulagée de ne pas voir Alban, qui est tout de même mon fiancé, pendant quelques jours. C'est quand même un comble, non ? Tout ça parce que monsieur est dans une période - qui me paraît totalement interminable soit dit en passant - de remise en question, d'acharnement dans son boulot, et de quête de son identité ou je ne sais quoi de certainement très "hype" chez les citadins en ce moment. Je soupire alors que les portes de l'ascenseur s'ouvrent. Je m'engouffre rapidement à l'intérieur, fuyant l'ambiance tendue des dernières semaines. Je me fais cependant la réflexion que l'herbe n'est pas forcément plus verte ailleurs et que mon séjour chez mes parents promet d'être très éprouvant également.

J'aperçois mon taxi garé devant la résidence dès que je pose un pied dehors. La chaleur est suffocante aujourd'hui, et je suis plus que ravie d'être dans quelques heures chez mes parents, au frais. Je discute vaguement avec le chauffeur durant tout le trajet qui me mène à l'aéroport de Bordeaux. En arrivant au guichet des départs, j'enregistre ma valise puis me dirige vers la porte d'embarquement. Ce dernier étant prévu dans quelques minutes, je ne devrais pas attendre trop longtemps. Je sors un roman de mon sac à main oversize. Un roman d'amour d'une mes auteures préférées en la matière. En même temps, en éternelle romantique que je suis, les trois quarts de ma bibliothèque personnelle sont faits de roman d'amour. Le reste est fait de romances de Noël... Après tout, romantique et accro à Noël, ça va de pair, non ?

Une voix féminine résonne quelques minutes plus tard dans les enceintes de l'espace d'attente situé vers la porte d'embarquement. Il est temps d'y aller ! Dans un peu plus d'une heure, je serai face à ma sœur, Lou, qui vient me chercher à Lyon pour l'occasion. Elle s'est proposée d'après ma mère. Deux solutions, soit elle est heureuse de me voir, soit elle est furieuse et souhaite régler ses comptes avec moi en face à face. J'ai un petit espoir pour la première option, mais ne me fais pas d'illusions pour autant...

J'éteins mon téléphone, suis la file indienne des personnes entrant dans l'avion, et prends place. Je suis du côté du hublot, et pour une fois, je n'ai pas l'aile qui me bouche la vue. Ce vol promet d'être court mais plaisant ! Revigorée par cet état de fait, je souris et patiente en lisant mon livre. L'histoire est vraiment prenante, j'en oublie ma sœur qui est déjà en route pour venir me chercher. Une hôtesse prend la parole pour se présenter et nous souhaiter un bon vol, puis c'est au tour du commandant de bord de nous souhaiter la bienvenue. Durée de vol prévue, 1h10.

Nous arrivons à bon port à l'heure indiquée sur mon billet à la minute près, alors que mon appréhension est en constante augmentation. Même ma romance n'a pas pu me délivrer de la peur et de l'angoisse qui m'étreint l'estomac. Je n'ai pas peur de ma soeur évidemment, mais j'ai peur de voir les émotions traverser son visage, parce qu'assumer le mal que j'ai pu faire me tétanise. Le cœur battant, je sors la dernière, puis suis les indications pour arriver enfin au tapis roulant sur lequel je n'ai aucun mal à retrouver ma valise violette flambant neuve. Résignée, me demandant pourquoi j'ai absolument tenu à venir me fourrer dans un pétrin pareil, je peste jusqu'à apercevoir Lou à l'entrée du hall des arrivées. Je me pare de mon plus beau sourire avant qu'elle ne me voit. Arrivant à une dizaine de mètres d'elle, je crie son prénom. Elle se tourne vers moi, m'adressant un faible sourire poli. Comme je le pensais, l'accueil n'est pas aussi chaleureux qu'espéré. Je m'attendais à quoi, après tout ?

"Roxane, enfin, ça fait une demi heure que j'attends.
- Je t'avais dit de ne pas venir trop tôt, tu sais, le temps de retrouver ma valise et tout ça...
- Mouais...
- Comment vas-tu ?
- Ça t'intéresse depuis quand ?"

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