21 - ROXANE

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Mercredi 6 octobre

"Tiens donc, mais revoilà la petite fille prodige qui rentre chez ses bouseux parents..."

L'accueil glacial que me réserve Alban ce matin me cloue sur place. Je ne pensais pas qu'il serait encore là, et au vu de sa tenue, je pense que si j'étais arrivée dix petites minutes plus tard, il n'aurai plus été là. Aller Roxy. Tiens bon, encore aujourd'hui et demain, et tu ne reverras plus jamais son visage de psychopathe. Il passe à côté de moi en me poussant sans ménagement.

"Pousse toi un peu, ne reste pas plantée là, déjà que tes foutues affaires prennent toute la place, si tu t'y mets aussi...
- Bonjour à toi aussi, Alban.
- Ouai c'est ça. Ferme à clés en partant, je ne serais pas rentré quand tu partiras."

Première bonne nouvelle de la journée. J'attends patiemment qu'il passe la porte, puis souffle un bon coup. Sa présence qui il y a quelques semaines m'était indispensable, aujourd'hui m'angoisse plus que de raison. Et dire qu'il n'y a pas si longtemps, le mois dernier en fait, tout allait merveilleusement bien entre nous, nous allions nous marier... C'est insensé à quel point un tout petit évènement, aussi insignifiant puisse-t-il paraître, peut tout remettre en question comme ça. Je ne regrette pas une seul seconde d'être allée à ce banquet des classes. Je crois que c'est juste ce dont j'avais besoin pour me sortir de cette léthargie dans laquelle je m'étais empêtrée. Je ne comprends même pas ce que j'ai pu trouver à Alban. Je me trouve immonde de dire ça, mais à la seconde où j'ai revu Paul, je sais qu'au fond de moi, il n'a plus du tout été question d'Alban. En fait, j'ai bien tenté de me voiler la face quelques jours, mais au fond à quoi bon ? Paul est l'homme de ma vie, le vrai, et j'ai été d'une idiotie sans limite de pouvoir penser que ce n'était pas le cas et que ma petite vie de citadine était parfaite pour moi. Je me déteste d'avoir mis tant de temps à m'en rendre compte, tant d'années à avoir fait semblant de ne pas voir la vérité. On a beau se voiler la face, se cacher la réalité, celle-ci revient toujours au galop et je crois que plus on attend, plus le retour de flamme est puissant.

Je pense à Marcus et à son message, trop court à mon goût. Il n'a pas réécrit et je ne sais pas si je dois le faire à mon tour ou non. Je ne sais pas ou j'en suis avec lui, où nous en sommes. J'aimerais que les choses soient beaucoup plus simples.

Je range la salle de bain, fais du tri dans les produits, les accessoires, les bijoux. Je fais un voyage jusqu'au bac de tri, un autre jusqu'aux poubelles, et la matinée passe à une vitesse affolante. Je me rends compte qu'il est déjà midi lorsque j'entends sonner à la porte. C'est Stéphanie qui passe me chercher pour aller casser la croûte. Je prends mes affaires puis ferme la porte à double tour avant de suivre mon amie dans un restaurant plutôt sympa auquel nous nous rendons à pieds. Nous prenons le menu du jour avec un verre d'apéritif, puis attendons le plat en grignotant quelques olives placées au centre de la table. Stéphanie est sans arrêt sur son téléphone et lâche tantôt un gloussement niait à souhait, tantôt un rire franc et plutôt contagieux. Je la regarde effectuer ce petit manège plusieurs fois avant de l'interrompre en riant.

"Est-ce que je peux savoir ce que te raconte Nathan de si drôle ? S'il continue à me voler ton attention, je vais devoir lui demander de nous laisser en paix pendant le déjeuner ! 

- Oups pardon, désolée Rox. C'est que...

- Tu tombes amoureuse..."

Elle rougis violemment et baisse les yeux, déclenchant une bouffée d'amour en moi. Elle est tellement mignonne ! Autant elle peut être exubérante et aimer attirer l'attention sur elle, autant quand on parle de sentiments, elle fait l'autruche en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire ! Je l'aime énormément et elle me manquera beaucoup quand je serais rentrée à la maison. Ma pensée m'interpelle "Rentrée à la maison"... Pourtant jusqu'à maintenant c'était ici justement ma maison. Je me rends compte que je n'ai plus d'attache ici, si tant est qu'il y en ait déjà vraiment eu, finalement... Mon travail me manquera aussi, c'est sûr, j'aimais beaucoup ce que je faisais, et puis laisser mon projet de bus de maquillage me rends un peu triste, mais j'ai passer le bébé à Stéphanie, je voulais que ce soit elle qui s'en occupe. Elle avait bien cerné mon idée de base, alors je pense qu'elle fera un super boulot sur ce dossier. 

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