11 - ROXANE

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Samedi 18 septembre

Je crois que je me suis levée du mauvais pied ce matin, rien ne va comme ça devrait. Maman me regarde d'un oeil anxieux alors que je termine mon petit déjeuner en m'agaçant sur cette idiote de tartine qui est tombée du côté beurré. Bon sang, mais qu'est ce que j'ai bien pu faire pour que tout s'acharne contre moi, en ce moment ? Je soupire de frustration avant de débarasser mes affaires.

Je m'enferme dans la salle de bain afin de prendre une bonne douche chaude qui me détendra de la sale nuit que je viens de passer, puis me sèche rapidement les cheveux, me maquille légèrement et enfile une robe. Il fait grand soleil aujourd'hui, et je compte bien ne rien faire de ma journée.

Hier soir, Alban a appelé. Je suis restée un moment interdite avant de décrocher, la boule au ventre. Il m'a une nouvelle fois reproché de ne pas m'intéresser à lui, de ne pas demander de nouvelles ni quoi que ce soit. Je me suis énervée en répliquant que lui non plus ne faisait pas tout ça, ce à quoi il a répondu avec tout le venin du monde qu'il se fichait bien de savoir ce que je faisais chez mes bouseux de parents. Folle de rage, je l'ai envoyé pêtre en lui disant que de toute manière, ce mariage est une grosse erreur. Ce à quoi il n'a pas daigné répondre, puis a simplement racroché. Une semaine, deux coups de fil d'à peine quelques minutes, aucun message... Tu parles d'un fiancé, franchement !

J'ai passé la nuit à cogiter, et ma décision de parler avec ma mère s'est faite encore plus pressante que ces derniers jours. Rassemblant mon courage en attachant mes cheveux en une queue de cheval haute, j'inspire profondément, puis rejoints ma mère, toujours dans la cuisine. En me voyant arriver, elle semble comprendre que la conversation qu'elle attendait depuis mon arrivée est pour maintenant. Sans attendre, elle lâche le torchon qu'elle avait dans les mains, nous sert un verre d'eau puis s'assied pendant que je tente de trouver mes mots.

Quelques secondes passent, et ne sachant par quoi commencer, je sens une boule se former dans mon ventre et remonter, me serrant la gorge. Honteuse, je fonds en larmes sans même avoir le temps de les voir venir, et maman se précipite vers moi pour me prendre dans ses bras.

"Oh ma puce, ça va si mal que ça ? Demande-t-elle, réellement soucieuse, en me frottant le dos d'une main affectueuse.
- Rien... Rien ne va maman... Je ne sais même pas par où commencer..."

Elle m'accompagne vers le canapé sur lequel nous nous asseyons, mes mains toujours dans les siennes. Je baisse les yeux, mais elle me relève la tête en posant une de ses mains sous mon menton, essuie une larme qui roule sur ma joue, et me regarde avec toute l'affection dont elle est capable.

"Ma chérie, tu peux tout me dire tu sais, je ne serais jamais fâchée contre toi, je suis ta mère. Autrement dit, la seule personne qui ne te jugera jamais pour quoi que ce soit.
- Mais je... J'ai peur que tu sois déçue...
- Déçue que tu ne sois pas prête à épouser un illustre inconnu ? Ou déçue que tu sois toujours amoureuse de Paul ?"

Je reste interdite un moment, ne sachant quoi dire, abasourdie par ses paroles. Mais comment fait elle pour toujours tout savoir avant que moi-même je ne m'en rende compte ? Elle semble comprendre mon trouble et me souris tendrement.

"Ma puce enfin, je suis ta maman ! Le fait que tu restes évasive sur la date de ton départ, que tu ne nous aies jamais présenté cet Alban, et puis aussi la façon dont tes yeux se voilent quand on parle de Paul... Je vieillis certes, mais je ne suis tout de même pas aveugle ! Je vois bien que tu n'es pas heureuse dans ta vie mon chaton, et malheureusement, à part te donner mon avis et t'apporter un peu de réconfort, je ne peux pas faire grand chose."

Mes mots se coincent dans ma gorge alors que je voudrais lui dire que si pour elle ce n'est pas grand chose, pour moi c'est tout, au contraire. J'ai tellement manqué de sa présence ces dernières années, je ne sais même pas pourquoi je me suis infligée tout ça, c'est ridicule. Reprenant mon souffle, me concentrant sur ma respiration pour reprendre une contenance, je reprends sa main dans la mienne et la regarde. Elle est si belle, bien sûr, le temps fait son œuvre et je vois bien qu'elle n'est plus aussi jeune qu'avant, mais c'est la plus belle femme au monde pour moi. Ca me fait tellement de bien d'être avec elle.

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