10 - PAUL

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Vendredi 17 septembre

Je me réveille ce matin la tête lourde des pensées qui m'ont tenues éveillé une bonne partie de la nuit. C'est toujours comme ça quand quelque chose me contrarie : je pense beaucoup trop, retournant le problème dans tous les sens possibles, et au final je ne dors pas. C'est vraiment rageant de ne pas savoir faire taire ses pensées !

Envoyant balader la couette, je me force à sortir du lit pour me rendre sur mon chantier. j'ai bien avancé ces deux derniers jours, la concentration que me demande mon travail m'empêchant de me souvenir que je suis seul à la maison quand je rentre le soir. Jade m'a bloqué de tous les réseaux sociaux, a bloqué mon numéro. Elle m'a rayé de sa vie, en somme. J'en ai gros sur le coeur, mais pas comme un rupture. Plutôt parce qu'elle a eu la maturité qui m'a manqué pour avoir su ouvrir les yeux sur notre relation et voir que je n'étais pas vraiment impliqué. Pourtant j'aurais voulu y croire, à cette belle histoire. J'ai mal pour Jade, qui méritait tellement plus qu'un homme à moitié là, à moitié amoureux... J'ai du mal à croire que c'est bel et bien terminé, mais au final, c'est sûrement mieux comme ça, je sais qu'elle a eu raison de faire ce qu'elle a fait. Il faut que je prenne le temps de digérer ça, c'est tout.

Lorsque j'ai appris à ma mère que je venais de me faire larguer par Jade, elle n'a même pas levé la tête. Elle a simplement dit : "je savais que cette fille n'étais pas faite pour toi.". Quand je lui ai demandé ce qu'elle voulait dire par là, elle n'a pas répondu, gardant le regard fixé sur son tricot, un sourire énigmatique accroché au visage. Ma mère est étrange parfois, mais souvent, pour ne pas dire toujours, ses intuitions se révèlent être vraies. Elle m'a dis avoir vu Roxane au café mercredi matin. Elle m'a dit l'avoir trouvée belle et en plein forme, mais qu'elle avait l'air profondément triste. Cette fois-ci, elle m'a regardé dans les yeux, l'air de dire "mais qu'est ce que tu attends, mon fils ?", mais n'a rien dit de plus. Je sais qu'elle a toujour adoré Roxane. Cependant, lui pardonner ce qu'elle m'a fait, et ce qu'elle a fait à tout ceux qui tenaient à elle, c'est... C'est trop dur pour le moment. Et puis nous deux, ça n'a pas marché avant, c'est que nous ne sommes pas faits pour être ensemble.

Je tente de chasser la petite voix dans ma tête qui me dit que nous serions encore ensemble aujourd'hui si elle n'était pas partie et que si elle est là, au moment même où Jade part à son tour, c'est que le destin nous donne un coup de pouce. Cette pensée ne sort pourtant pas de mon esprit une seule seconde durant cette journée pluvieuse. Le soir venu, épuisé tant par mon travail que par les rouages affolés de mon cerveau, je ne prends pas le temps d'allumer le feu de bois, et met plutôt en route la chaudière. je me fais couler un bain dans lequel je mets une des nombreuses boules de bain que Jade a laissé ici. Cette attention me fais sourire. Elle sait que c'est mon pêché mignon, même si je n'ai jamais voulu l'avouer. C'est tellement un truc de gonzesse ! Je souris à cette pensée et me glisse dans l'eau brûlante, détendant mes muscles instantanément. Je soupire de bien-être et me laisse aller à imaginer ce que serais ma vie si Roxane n'était jamais venue me parler et qu'on ne s'étaient jamais mis ensemble. J'ai beau essayer de retourner mes pensées dans tous les sens, je ne parviens pas à m'imaginer sans elle, à l'époque où j'étais adolescent. On a fait les quatre cent coups ensemble, avec Marcus, toujours fourrés les trois. Nous étions amis au début, pendant pas mal de temps en fait, et c'est à 13 ans qu'on s'est mis ensemble. Marcus s'est un peu éloigné au début, se mettant à l'écart de son propre chef. Il a vite compris cependant qu'il n'avait pas besoin de faire ça, que malgré les sentiments qui nous liaient Rox et moi, nous étions et resterions toujours le trio de trois meilleurs amis. Du moins, à l'époque, je pensais que rien ne pourrait jamais nous séparer, tout les trois. Ca aurait dû se passer comme ça. C'était écrit. Pourtant Roxane a balayé tout ça d'un simple revers de la main pour partir en ville et s'amouracher d'un pauvre type. Envolées, les promesses. Envolé notre amour, envolé notre trio.

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