Retourne-toi

6 - PAUL

Dimanche 12 Septembre

Lorsque je me réveille, Jade n'est plus dans le lit depuis un moment déjà, à en croire l'absence totale de chaleur sur le matelas. On s'est disputés assez violemment hier soir en rentrant de la salle des fêtes. ne voyant clairement pas ce qu'elle me reprochait, j'ai eu le malheur de lui dire qu'elle c'était certainement laisser monter la tête par cette garce d'Hélène. Remarque qui ne lui a pas plu du tout, évidemment. Pourquoi est-ce toujours les personnes les plus manipulatrices et malsaines qui sont les plus appréciées ? Pourquoi un gars simple, honnête et droit dans ses pompes comme moi attire ce genre de problème ? Sans rire...

Je soupire en me redressant, plaçant mon visage dans mes mains, les coudes sur les genoux. Parfois, j'aime imaginer ce que serait ma vie si j'avais suivi mon rêve de gosse de devenir berger dans les alpes. Ma nature solitaire adorerait ça. Secouant la tête, je soupire à nouveau en enfilant un jean et un t-shirt. Je laisse mes pieds nus frôler le parquet en chêne massif. Il m'a coûter les yeux de la tête, mais je l'adore. Rien que ça, ça me fait sentir chez moi, la chaleur du bois et le craquement de celui-ci sous mes pieds me rassurant.

Alors que je descends l'escalier pour arriver à la salle à manger, un étrange présentiment me serre l'estomac. Il n'y a aucun bruit dans la maison. Je fais demi-tour et ouvre les portes de notre armoire. La valise de Jade n'est plus là. Elle n'est pas sérieuse... Putain ! On s'est disputés d'accord, mais elle sur-réagit toujours d'une façon totalement ecsessive qui a le dont de m'agacer au plus haut point. Elle voulait que je fasse des efforts, soit ! J'ai pris une journée de congés pour elle qui m'a presque fait perdre deux clients, je suis rentré tôt tous les soirs pour qu'elle ne me reproche pas mon absence, j'ai effectuer pratiquement toutes les tâches ménagères, et elle ose encore se plaindre, tout ça parce que cette chère Hélène lui a mis je ne sais quelles idées dans le crâne ! Son côté influençable commence sérieusement à me taper sur les nerfs !

Sans compter que c'est au moins la six ou septième fois qu'elle me fait ce coup là. Très bien, et bien si elle veut faire l'enfant, je peux le faire également. De toute façon, c'est chez moi ici, elle reviendra quand elle se rendra compte qu'elle a merdé. J'en ai assez de faire des efforts dans le vent !

J'avale en vitesse un café avant de me mettre au travail. Il n'y a pas de congés pour les braves... J'ai une tonne de paperasse à faire, et aucune secrétaire. Trop onéreux pour une petite entreprise comme la mienne, puis au final, ça prend du temps mais j'ai suivi une formation en comptabilité, alors j'arrive à m'en sortir.

Trois heures plus tard, alors que j'édite ma dernière facture, je n'ai toujours aucune nouvelle de Jade. Ce constat m'énerve plus qu'il ne m'atriste. Cette manie qu'elle a de jouer un rôle de femme délaissée comme ça, vraiment ça me mets les nerfs en pelotte. Elle a tout pour être heureuse, et moi je n'arrive pas à la suivre, elle est tellement... Lunatique !!

Je décide d'aller me balader un peu pour me vider la tête et prendre l'air, je déteste rester enfermé. je suis un homme d'extérieur. Encore quelque chose que je n'ai pas en commun avec Jade. Je secoue une nouvelle fois la tête pour me sortir Jade de mes pensées. Ce qu'elle peut m'agacer quand elle s'y met... J'ai autre chose à faire que de gérer ses pleurnicheries. J'ai une entreprise à faire tourner, moi !

J'arrive à destination 25 bonnes minutes de marche plus tard. La petite chapelle se dresse fièrement, surplombant la route départementale. Les chèvres se sauvent en me voyant arriver. Elles n'ont pas l'habitude de voir des gens passer ici. Prenant une grande inspiration, je marche lentement en direction de la pierre plate sur laquelle je m'assieds tout le temps. Jade ne sait pas que je viens là régulièrement. Si je lui disais, je devrais lui expliquer comment je l'ai trouvé la première fois. Je devrais lui expliquer qu'une fille que j'aimais éperdument m'avait donné rendez-vous ici, devant cette chapelle. Que cette même fille s'était glissée sur la pointe des pieds avant de déposer un baiser doux comme une plume sur mes lèvres, et qu'elle m'avait dit :