14 - PAUL

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Lundi 20 septembre

"Et ensuite nous sommes rentrés, Marie a conduit ma voiture parce que... J'étais pas.. Et puis en rentrant maman nous attendait avec des chocolats chauds, comme elle le faisait quand nous étions enfants quand ça n'allait pas. Ça m'a beaucoup réconforté, je sais ça paraît bête mais...

- Rox. Ce n'est pas bête. Tu n'es pas bête. Viens là. Je suis sincèrement désolé."

Je prends Roxane dans mes bras et la serre de toutes mes forces contre moi, le cœur déchiré par le récit de ce qui lui est arrivé hier. Si j'avais su, je serais descendu de ma voiture, aurait poussé cet abruti fini dans ce taxi de riche pour qu'il reparte aussi vite d'où il venait. 

Il n'est que 7h30 et ça fait déjà une bonne heure qu'elle est là. Elle m'a appelé vers 6 heures pour savoir si elle pouvait me voir. Je lui ai demandé si ça pouvait attendre ce soir que je rentre du boulot, mais elle a fondu en larmes, alors je lui ai dit qu'elle pouvait venir immédiatement. L'angoisse que j'ai ressenti en l'attendant puis les longues minutes qui ont suivi durant lesquelles elle a pleuré sans réussir à parler m'ont brisé le cœur. Comment un homme peut-il faire subir ça à quelqu'un qu'il "aime" ? Quel est ce chantage auquel il a joué avec elle ? Comment a-t-il pu être si dur avec elle ? Et enfin, mais qu'est ce qui ne va pas chez ce mec ?

J'aimerais décommander mes chantiers de la journée mais je sais que je ne peux pas, c'est impensable, c'est un gros chantier et je ne peux pas me permettre de prendre un seul jour de congé pour le moment. Celui que j'avais pris pour Jade avait déjà failli me coûter un client... Roxane semble le comprendre sans difficulté, et je l'en remercie. Étant déjà très en retard, je la réconforte encore quelques minutes, puis lui dit qu'elle peut rester là si elle veut, que je rentrerais pour ce midi et qu'on pourrait manger ensemble si elle le souhaite. 

Elle accepte, des étoiles dans les yeux et me sourie, les joues trempées de larmes. Je sais que son sourire à mon égard est sincère, mais la tristesse et la déception au fond de ses jolis yeux verts me donnent la nausée. Je n'ai qu'une seule envie, c'est d'aller immédiatement buter ce connard pour ce qu'il lui a fait subir. Heureusement qu'elle a eu la présence d'esprit de lancer un appel avec sa sœur, et je remercie le destin qu'il ne l'ait pas vue faire. Qui sait ce qui aurait pu se passer, autrement. Une frisson parcourt mon corps alors que je passe la porte, le cœur gros de laisser Roxane seule. 

Je ne peux pas empêcher une pensée égoïste de pointer le bout de son nez au milieu de ce bouleversement qui traverse Roxane. Au moins, elle en a finit avec lui. Désormais, elle est libre comme l'air, non ? Moi aussi... Peut-être que... Non, non, non ! J'avais dis que je devais me blinder ! C'est pas vrai ça ! Mais quelle mauviette je fais ! Mais Roxane est seule chez moi et... Et on va prendre le temps. On va prendre le temps, parce qu'on a toute la vie devant nous et qu'il faut repartir sur de bonnes bases. Respires Paul, respires. Ça va aller. Concentres toi sur le boulot de ce matin.

La matinée passe à vitesse grand V et c'est l'appel de mon estomac qui m'indique qu'il est l'heure d'aller déjeuner. Mon cœur bat la chamade lorsque je vois que la voiture de Roxane est toujours garée chez moi. Je pense que Marcus a dû la voir, sa voiture est garée dans sa cours, il doit être rentrée du boulot il y a peu, et je pense que si je n'ai pas encore de message de sa part, ça ne saurait tarder. Alors que je sors de la voiture et m'apprête à ouvrir la porte, je vérifie l'écran de mon téléphone : un nouveau message, et comme je m'y attendais, il est de mon meilleur ami.

"Comment va-t-elle ?"

Je reste interdit devant ce message durant quelques secondes, n'en comprenant pas le sens. Ne le comprenant pas parce qu'en fait, il ne peut en avoir qu'un, il ne peut concerner que Roxane et comment... Comment pourrait-il savoir ? Savoir qu'hier soir, elle était à deux doigts de se faire agresser physiquement et peut-être même sexuellement par l'homme qui prétendait vouloir l'épouser ? Alors, je décide de jouer à l'imbécile et fais comme si de rien n'était, en lui répondant : "Qui donc ?", puis range mon téléphone dans ma poche avant de pénétrer chez moi. Elle est endormie sur le canapé, la télévision éteinte, un plaid chaud en polaire rouge sur elle, dans une position fœtale absolument craquante, et je ne parle même pas de sa bouille endormie. Je sais que je suis parfaitement ridicule à la trouver aussi belle, au point que ça pourrait me couper le souffle, mais après tout, pourquoi me cacher de ce que je ressens, alors que c'est ce que j'ai toujours ressenti avec elle, depuis pratiquement notre rencontre ? Je m'agenouille devant son visage, l'observe encre quelques secondes, puis passe mon pouce tout doucement sur sa joue. Au début, elle fronce légèrement le nez, faisant ressortir ses tâches de rousseur, puis elle ouvre lentement les yeux. Je découvre rapidement que ceux-ci sont rougis, certainement d'avoir encore pleuré en mon absence. Elle se redresse vite lorsqu'elle me voit et me prends dans ses bras et chuchotant mon prénom. Elle prend ensuite ma main dans la sienne et baisse les yeux.

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