Chapitre 21

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Trois jours. Trois jours sont passés depuis que Timothée m'a retrouvée à l'aéroport. Et je n'ai pas bougée de son appartement depuis. Même pas pour faire les courses. Et il n'a même pas osé me laisser seule pour aller remplir les placards, il s'est donc contenté de commander en ligne. Je ne savais même pas que c'était possible. Un type a débarqué avec des sacs énormes remplis de nourriture. Tout ça parce que Tim a insisté pour me faire goûter à tout ce qu'il aime en Amérique. Il a même été jusqu'à commander les meilleurs Hot-Dogs de la ville, de même pour les Pizzas, Beggels et Mac'n Cheese. Sans mentir, les Mac'n Cheese sont une véritable tuerie. C'est d'ailleurs la seule chose qui m'empêche de sombrer dans un état dépressif avancé. Ça et Tim. Je ne sais pas comment il fait pour me supporter. Je lui ai déballé des horreurs impensables et je peine à lui adresser un seul sourire depuis trois jours. Et pourtant, il est toujours partant pour essayer de me faire rire. Je ne peux pas nier qu'il est vraiment super lorsqu'il se contente de rester amical, presque fraternel. Je ne suis pas au top de ma forme, mais je ne suis pas au plus bas, et c'est grâce à lui.
En revanche, je n'arrive pas à fermer l'oeil sans voir Tom. Je le vois encore et encore. À chaque fois que j'ai le malheur de tomber dans un état inconscient. Je me suis retrouvée dans cette chambre d'hôtel où on s'est rencontré la première fois, puis à Cleveland le jour où il m'a demandé de partir. Mes cauchemars ne sont que des bribes de souvenirs arrangés pour me faire du mal. Pas une seule fois en deux nuits je n'ai eu la chance de le serrer dans mes bras. De lui dire que j'étais désolée. Lui dire que je l'aime. Parce que putain ce que je l'aime. Et je le sais d'autant plus maintenant qu'il n'est plus là. Maintenant qu'il a arrêté de m'appeler. Je regrettes tellement de ne pas avoir répondu les cinq premières fois, parce que maintenant je sais qu'il ne rappellera pas. J'ai manqué ma chance de recoller les morceaux. Et ne me demandez pas pourquoi, je n'ose pas l'appeler. J'ai tellement peur en réalité. Tellement peur de me faire rejeter à nouveau.
Ma vie à Londres me manque. Il me manque. Et je n'arrive pas à penser à autre chose. Il m'obsède, ça me rend dingue. La preuve, il est actuellement quatre heures du matin ici à New-York et je suis toujours plantée dans le canapé à scroller Instagram comme-ci ça pouvait arranger les choses. Timothée dort depuis au moins trois heures, avachi dans le canapé pendant que je scroll des photos de mon ex en boucle. J'ai imaginé un million de fois la façon dont il m'appellerait en plein milieu de la nuit, complètement alcoolisé pour me dire qu'il m'aime comme un fou. Mais ce n'est jamais arrivé. Et à mesure que son joli visage défile sous mes yeux, le sommeil me gagne. La fatigue l'emporte sur son sourire parfait et je tombe à nouveau dans les ténèbres.
Cette fois, adieu la chambre au Royal Monceau, ou bien cet horrible hôpital où il m'a demandé de partir. Non, cette fois je suis de retour à Cleveland, dans cette chambre que j'ai partagé avec lui pendant un mois entier. Et contre toute attente, il ne cri pas et qui plus est, il est seul. Recroquevillé sur lui-même au pied du lit, assis à même la moquette. Qu'est-ce qu'elle a dû me marquer cette moquette bleu nuit pour m'apparaître aussi clairement. Je ne vois pas son visage, et pour cause, sa tête est plongée dans ses bras. Je n'ai pas le plaisir de croiser à nouveau ses si jolis yeux, mais je sais une chose, ils sont certainement noyés de larmes. Je peux l'entendre sangloter comme un enfant qui aurait perdu quelque chose. Il pleure. Mais pourquoi est-ce qu'il pleure ? Et pourquoi est-ce qu'à chaque fois que je rêve de lui ça me brise le coeur ? Cette fois au moins j'ai un semblant de contrôle sur mon corps et j'arrive à le rejoindre. À peine à sa hauteur, il relève la tête vers moi et son visage est tellement déformé par le chagrin que, même endormie, je peux sentir mon coeur se briser en un nombre incalculable de morceaux.
- I'm so sorry...
Ses larmes ne s'arrêtent pas et lorsque j'essaie de les effacer du bout des pouces, je suis extrêmement déçue de ne pas sentir sa peau sous mes doigts. Rien de tout ça n'est réel, et c'est ce qui rend le tout tellement plus douloureux.
- We lost the baby because of me.
Si j'avais été réveillée, cette phrase m'aurait plongée dans un coma instantané. Mais là, je n'arrive de nouveau plus à bouger ou bien même à parler. Je suis forcée de le regarder enfouir son visage dans ses bras pour pleurer toutes les larmes de son corps sans pouvoir le consoler. Je ne peux même pas le prendre dans mes bras, le serrer contre moi et lui dire que je ne lui en veut pas. Que, quoi qu'il se passe, je l'aimerais inconditionnellement jusqu'à mon dernier souffle. Mais, tel un personnage de jeux vidéos dont la manette n'aurait plus de batterie, je suis incapable de bouger. Et très vite, la scène change. La chambre disparaît et les lueurs bleus qui s'échappent de la piscine apparaissent. Au dessus de nos têtes, les étoiles. À ma gauche, allongé sur un transat qu'on partage, Tom. Je suis blottit dans ses bras et même si je ne sens pas les caresses de ses doigts ou bien même la chaleur de son torse, je me souviens de cette nuit là. J'étais tellement bien dans ses bras. J'ai retrouvé le contrôle de mon corps, et ça me permet de laisser ma main se balader sur son torse même si je ne peux pas le sentir. L'illusion d'être installée là, sous les étoiles, blottie dans ses bras me fait un bien fou. Et cette fois il ne pleure pas, il ne hurle pas non-plus. Il se contente de regarder les étoiles en silence. Et la beauté de son visage me manque.
Étonnamment, comme-ci il m'avait entendu, sa tête se tourne vers moi et je peux l'admirer dans son intégralité. Ses yeux sombres, ses sourcils en bataille. Ses lèvres pincées dont j'essaie encore de me remémorer le goût. Qu'est-ce qu'il me manque, c'est dingue.
- What should we call him ?
Je ne réagis pas, peut-être trop absorbée par sa gueule d'ange. Après tout, je ne contrôle rien, pas même alors que tout ça se passe dans ma tête.
- I love William. Or Amy if it's a girl. What do you think, Darling ?
Sa voix. Cette voix. Elle pourrait me conduire tout droit en enfer que ça me serait égal. Il est entrain de parler du bébé. Et même si rien de tout ça n'est réel, c'est la plus belle chose qu'il m'ait dite depuis bien trop longtemps. Un sourire illumine son visage tout droit sortit de ma mémoire, et je n'ai pas le temps d'apprécier qu'il disparaît. Les étoiles aussi disparaissent et on se retrouve dans un parc, assis sur un banc. Encore un souvenir. À croire que mon cerveau souhaite à tout prix me torturer. Tom a la tête baissée, le regard posé sur une minuscule boite qui ressemble comme deux goûtes d'eau à celle qui renfermait ce précieux collier que je n'ai plus désormais.
- We should get married. For real.
Il relève enfin les yeux et ce bonnet en laine moutarde qu'il a sur la tête m'empêche d'admirer ses jolis boucles.
- I really wanna marry you, Elena.
Je baisse les yeux pour tomber sur ma main dans la sienne, une si jolie bague au doigt que je ne sais même pas où mon subconscient à réussi à en retrouver le souvenir.
- Marry me.
Mon regard retombe sur son visage d'ange, et le sourire qu'il retient me donne terriblement envie de l'embrasser.
- I love you.
Et c'est là, à mon plus grand regret, que son visage disparaît à son tour. Il devient flou et ma main se met à vibrer. Et merde... tout ça c'était dans ma tête. Rien n'est réel. Je sors complètement stone de ce rêve qui se déroulait ci bien pour me rendre compte que ce n'est pas ma main qui vibre, mais mon téléphone actuellement prisonnier de mes doigts. Je tourne l'écran vers moi pour me brûler les rétines et l'heure tardive me fait presque oublier que quelqu'un est en train de m'appeler. Je fini par décrocher les yeux fermés.
- Allô...
Aucune réponse ne me parvient. Seulement le son d'une respiration.
- Allô !
Ma voix se fait plus forte et j'ai même l'impression d'avoir été agressive. Mais faut me comprendre aussi, il est quatre heures du matin et pour une fois que mon rêve n'était pas un véritable cauchemar il faut qu'on me réveille. Mais décidément mon agressivité ne suffit pas à faire réagir mon interlocuteur. Je retire mon téléphone de mon oreille, prête à raccrocher à qui bon n'est pas décidé à me parler, lorsque de mes yeux à demi-ouverts j'aperçois le sourire que je viens de quitter dans mon rêve. Mon coeur s'arrête, comme-ci quelqu'un avait appuyé sur le bouton d'arrêt d'urgence. Je reporte immédiatement mon téléphone à mon oreille de peur qu'il raccroche subitement.
- Tom ?
Même son prénom prononcé dans ma propre bouche arrête de nouveau cet organe stupide qui me pompe le sang. Je l'entend renifler, mais toujours pas de réponse.
- Tom... est-ce que c'est toi ?
Toujours aucun bruit. OK, c'est pas grave. Je suis sûr qu'il m'entend, et ça me suffit pour être en paix quelques minutes. Même si on ne parle pas, même si tout ce qu'on échange n'est qu'un silence sans fin, ça me va. Parce que je sais qu'il est là, à l'autre bout de ce téléphone. Peut-être qu'il n'a pas envie de me parler, peut-être bien qu'il voulait seulement entendre ma voix.
- Si c'est bien toi...
- I'm sorry.
Sa voix résonne dans ma tête comme l'écho de mes propres pensées. C'est exactement ce que j'allais dire, mais il m'a devancé, comme-ci il avait lu dans ma tête comme dans un livre ouvert.
- I'm so sorry baby...
La tonalité rauque et brisée de sa voix me frappe en plein coeur, comme une flèche décochée par Hawkeye lui-même, une flèche qui ne rate jamais sa cible, une flèche qui tue. Et je peux entendre très nettement sa respiration se saccader et sa voix se mettre à sangloter. Il est en train de pleurer. Non, c'est pas possible... pourquoi est-ce qu'il pleure ?
- I miss you so much... I'm so sorry...
Ses pleurs me font sauter du canapé d'un bond incontrôlé. Comme-ci ils avaient activé en moi le mode Terminator.
- Non, non, non, arrête de pleurer, je t'en prie.
Même si j'ai encore et toujours dans un coin de la tête la douleur et la colère qu'il m'a fait ressentir je ne peux pas m'empêcher d'avoir le coeur en miettes à l'entente de sa voix tremblante.
- I'm a fucking asshole... I should never have treated you like I did.
Chacun de ses mots est sanglotant, cassés par sa voix rauque et son ton lourd. Et ça ne fait que rendre cette discussion plus difficile encore.
- And... and I'm so sorry baby, I swear... I beg you to come back... please...
Je m'arrête au milieu du salon où seule la lumière de la télé éclaire la pièce. Tim dort profondément et je ne peux pas m'empêcher de penser que ça lui ferait du mal que je parte. Mais d'un autre côté, si je pouvais me téléporter auprès de Tom dans la seconde, je le ferais sans hésiter. Et ça fait certainement de moi quelqu'un de stupide.
- Please baby... I can't live without you one day more...
Je tourne le dos au canapé où la vision de Timothée allongé en travers, la tête sur l'accoudoir, les pieds sur la table basse et paisiblement endormi me donne de violent remords. Si Tom savait que je suis ici avec lui il n'aurait jamais pensé un seul mot de cette phrase.
- It's driving me mental... I made a really huge mistake and I can't fucking stop thinking about you.
Ses sanglots reprennent de plus belle tandis que j'essaie de comprendre de quoi il parle.
- De quelle erreur est-ce que tu parle au juste ?
Je l'entend renifler une seconde avant de se remettre à pleurer.
- I don't even understand what you're saying... I'm a fucking idiot... I don't deserve you.
Oh seigneur ! Mon coeur est bien trop lourd de chagrin pour encaisser ça.
- Tom arrête... please, stop saying that kind of shit.
Je suis forcée de lui parler dans sa langue maternelle, consciente qu'il n'est pas en état de comprendre la mienne.
- That's not bullshit ! It's fucking true ! I'm a fucking asshole and I don't deserve a wife like you !
Mon coeur fait un violent bond dans ma poitrine à l'entente de ce mot. Wife. Il m'a désignée comme sa femme. C'est la plus belle chose que j'ai entendue ces dernières soixante-douze heures.
- I'm so sorry baby... please come back here with me... I promise I will be a great dad, a wonderful dad, the best our baby can have and... and I will be the greatest husband in this entire planet. You make me a better man and I know it now, I swear to God I will be the best version of myself for you and our baby.
Waouh... OK, ça fait beaucoup trop d'informations à retenir d'un seul coup. Tellement que j'ai l'impression de m'être rendormie. Ça paraît tellement irréel.
- Tom...
- Marry me, Elena.
Mon coeur s'arrête, frappé par le nuage de papillons qui vient de s'envoler du creux de mon ventre pour remonter jusqu'à mon cerveau et l'asphyxier en un quart de seconde.
- Marry me and let me make you a hundred more babies !
C'est cette dernière phrase qui me réanime. Cette phrase précise qui paraît la plus dingue. Le mariage il en parle depuis tellement longtemps, mais avoir des enfants c'est quelque chose qu'il repousse depuis le début, une idée à laquelle il refuse de penser si tôt. Et c'est ce qui fait perdre toute sa sincérité à cette phrase.
- Are you drunk ?
Un silence me confirme déjà la réponse.
- No... Yes, well... maybe, I don't know. Is that important ?
OK, il a clairement bu. Et ça me fait regretter d'avoir cru un seul foutu mot de tout ce qu'il vient de me dire.
- Baby we don't give a shit about that... I love you, and I fucking can't live without you, and... and I wanna marry you and raise our kids and...
- Wait !
Je l'arrête avant de sentir la colère de savoir que tout ça n'est que le fruit de l'alcool prendre le dessus.
- What were you talking about when you said you made a mistake ?
Et pour seule réponse, je n'ai le droit qu'au silence. Encore. Et ça ne me rassure en rien.
- Come here and we will talk about it.
Alors ça c'est encore pire. Putain mais de quoi il parle ? De son baiser avec Zendaya ? Ou d'autre chose, quelque chose de plus grave encore ?
- You're talking about Zendaya right ? About your kiss ? Or...
- Baby please... please I'm begging you to come back with me... please...
Il m'a coupé au mauvais moment, comme-ci il savait ce que j'allais dire. Comme-ci il avait peur que je le dise à voix haute. Est-ce qu'il... est-ce qu'il aurait osé coucher avec elle ? Ses sanglots me stoppe dans mes doutes.
- Please, please, please... I'm so sorry... baby, I swear...
- OK, c'est bon, je viens ! I come. I will take the first plane I can to Atlanta.
Je l'entend renifler et ses sanglots s'arrêter.
- But please... stop crying OK ? It's too painful.
- Yeah, you're right... I'm sorry.
Je renverse ma tête en arrière, culpabilisant déjà de le forcer à s'excuser pour la millième fois.
- Stop saying that you're sorry too.
- But I am !
Je jette un oeil à Timothée qui vient de bouger. Le pauvre doit vraiment être mal installé.
- Je sais, Tom.
Mais en réalité je pense que l'alcool le rend nettement plus désolé qu'il ne l'est vraiment. Et ça m'emmerde pour tout vous dire.
- I love you so much.
Mes lèvres étirent un sourire sans mon consentement. Ça fait bien trop longtemps que je rêve d'entendre ça. De vive voix, dans cette réalité et non pas dans ma tête. Et aussi surprenant que ça puisse paraître, j'ai envie de lui répondre que moi aussi je l'aime, lui hurler même. Mais je n'y arrive pas. C'est comme-ci je n'arrivais plus à oser lui dire. Ça m'a fait tellement de mal la dernière fois que je lui ai dit que là je n'y arrive plus. Et pourtant je le pense. Pourtant, qu'est-ce que je l'aime cet idiot. Mais j'y arrive pas. J'arrive pas à lui dire. Ses sanglots laissent place à un rire inattendu. Un bref rire qui me confirme qu'il manque de sommeil et de sobriété.
- Why are you laughing ?
Entendre son rire me noue l'estomac et me force à sourire. Quel paradoxe que ça me fasse sourire et que ça me noue l'estomac. Mais je sais pourquoi son rire me fait un tel effet. Parce que ces trois derniers jours je pensais avoir perdu le privilège de l'entendre à nouveau, je pensais l'avoir perdu lui. Et l'entendre à nouveau me donne l'impression, l'étrange sensation de l'avoir retrouvé.
- Because I miss you, Darling.
Darling. Comme ça fait du bien d'entendre ça. Ça me fait l'effet d'un gramme de cocaïne dans le sang. Ça me tourne la tête et ça me réveille en même temps.
- How long have you slept since I left ?
Son rire s'arrête doucement, et je regrette aussitôt de l'avoir interrompu.
- I don't know... five hours, maybe six.
- Last night ?
Il pouffe de rire, et honnêtement ça m'énerverait presque si je n'étais pas heureuse de l'entendre rire plutôt que pleurer.
- No... since you left.
Le ton de sa voix se fait plus lourd, comme-ci la gravité de la situation lui revenait en pleine figure.
- Since you left me in the middle of the street. Since you told me I would never see my baby.
Mon coeur s'arrête. Je me souviens parfaitement de ce moment. Et l'entendre en parler de sa voix lourde de tristesse me culpabilise en un quart de seconde. Je sais que je n'aurais jamais dû dire ça. Que c'est impardonnable d'avoir pensé à priver Tom de son enfant juste par vengeance, pour le punir.
- Looks like you're the one who will cry now.
Son ton est si lourd qu'il écrase mon coeur avec la même intensité dont j'ai dû écraser le sien lorsque j'ai prononcer cette même phrase à Atlanta.
- You were right... I'm crying right now.
Sa voix se brise à nouveau et le silence qui s'en suit me laisse penser que ses sanglots sont de retour. Et aussi douloureux que ça puisse paraître, mes larmes à moi refusent de couler. J'ai la gorge nouée, j'ai profondément mal de l'entendre pleurer, mais je n'arrive pas à en faire autant. Pourquoi ? J'en ai aucune idée. Et c'est d'autant plus douloureux d'avoir l'impression de ne pas partager sa peine. C'est dingue... je l'aime de tout mon être, de toute mon âme et je n'arrive plus à lui dire. Je l'entend pleurer de chagrin et je n'arrive plus à suivre sa tristesse, à lui exprimer la mienne. C'est comme-ci... comme-ci quelque chose entre nous était brisé et que ce quelque chose était si important que je n'arrive plus à lui faire voir mes sentiments. Je n'y arrive plus. Je garde tout en moi, comme-ci j'avais peur qu'il ne s'en serve à nouveau pour me poignarder en plein coeur. Je me suis tellement forcée à me détacher de lui pour ne plus souffrir que maintenant je n'arrive plus à m'y attacher de nouveau comme avant. Et le pire dans tout ça c'est que... comment puis-je espérer le revoir et que ça redevienne aussi intense qu'avant si je n'arrive même plus à pleurer pour lui, à lui dire que je l'aime. Rien ne sera plus jamais comme avant. Et ça c'est dur.
- Tom... you need to sleep, OK ? Stop crying and get some rest.
- I can't... I can't sleep without you, I can't... I can't baby.
Je jette un oeil à Tim, toujours endormi, et un pincement au coeur de culpabilité m'envahit. C'est dingue comme j'ai l'impression de le trahir en parlant avec l'homme que j'aime. Je ne comprend toujours pas comment il a fait pour s'immiscer dans ma tête comme ça. Mais Tom compte plus que tout, plus que lui. Et c'est pour ça que je me faufile en dehors du salon dans la chambre qui m'est dédiée.
- But you need to sleep.
Je referme doucement la porte et me glisse sous la couverture froide du lit vide qui m'attend.
- But I can't.
- I know.
Je retire le téléphone de mon oreille pour mettre le haut parleur.
- I'm gonna stay with you until you fall asleep.
- Really ?
Sa voix sortant du téléphone m'arrache un sourire. C'est comme-ci il était là, allongé à côté e moi. Comme-ci il n'était jamais partit.
- Really.
Un silence prend place mais comparé aux autres il n'est pas lourd. Pas angoissant. C'est comme-ci, de part ce silence on se disait tout. Et lorsque le silence commence à parler, alors c'est que les coeur sont de nouveau connectés. Et ça fait du bien.
- Promise me you will come back.
Je pensais qu'il s'était endormi, et le son de sa voix ouvre mes paupières comme le ferait le bruit d'une explosion. Est-ce que je peux lui faire cette promesse ? Est-ce que je vais vraiment revenir ?J'en ai terriblement envie. Je veux le retrouver, le serrer dans mes bras. Mais ce ne sera pas comme avant. Définitivement pas, et ça me fait peur.
- Je te le promet.
Le silence reprend place pendant quelques secondes, et je l'imagine en train de sourire. Qu'est-ce qu'il me manque son sourire.
- I love you.
Cette simple phrase m'apaise, et mes paupières retrouvent leurs lourdeurs. Sous mes yeux clos j'aperçois son visage. Je l'imagine paisible, endormi. Qu'est-ce qu'il me manque. Rien qu'à l'entendre respirer j'ai l'impression de reprendre mon souffle moi aussi. Comme-ci pendant tout ce temps, ces trois derniers jours, j'avais inlassablement retenu mon souffle. Comme-ci la douleur m'avait étouffée de l'intérieur. On dirait que j'ai vraiment besoin de lui pour me sentir vivante. J'ai besoin de lui pour vivre.

Unexpected 2 [FR/EN]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant