Chapitre 43 : Jay

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Toujours puni, j'avais des difficultés à mettre mon plan à exécution. Premièrement, je ne pouvais pas mettre un pied hors de chez moi le week-end. Deuxièmement, j'avais interdiction de trainer après les cours en semaine. L'idée de sécher une heure m'effleura l'esprit quelques secondes avant d'être remisé dans un coin. Si je faisais ça, Roman serait énervé. Et je ne souhaitais surtout pas mettre de l'huile sur le feu.

Non, j'avais besoin de faire les choses dans les règles, pour une fois.

Il ne me répondait toujours pas, même après deux semaines de distance abominable. Ce silence ravageait mon humeur, j'étais une vraie loque. Mais j'avais décidé de me battre, d'imposer une discussion. 

Il souffrait de ma trahison et je devais lui prouver que je regrettais sincèrement, que je l'aimais et que je voulais pas le perdre. Je devais me racheter. Pour ça, il fallait que je le voie. 

Mes options étaient grandement limitées et j'envisageai sérieusement de mentir pour avoir une autorisation de sortir...

Je ne savais simplement pas encore quels mensonges j'allais servir à ma mère pour qu'elle accepte. Mentir était facile pour moi, mais considérant où cela m'avait mené, j'étais mal à l'aise de devoir encore ruser pour avoir ce que je voulais.

J'entrai dans la cuisine d'un pas traînant, l'esprit complètement ailleurs. J'avais faim après avoir refusé de manger avec mes parents, ce qui arrivait de plus en plus souvent.

En pénétrant dans la pièce, je ne m'attendais pas à y voir mon père se préparant un thé. Depuis quand buvait-il du thé ? Cette pensée m'amena à Roman et ma poitrine se comprima sous le chagrin. Je fonçai vers le frigo pour me préparer une assiette.

—   Ça va, fils ? demanda tout à coup mon père.

—   Hum.

—   Et avec de vrais mots ?

Un soupir exaspéré s'échappa de ma bouche.

—   Ça va, dis-je en mettant mon assiette au micro-ondes.

—   Tu as l'air... abattu, Jay.

Je haussai une épaule, faisant mine de rien. Le bruit de l'appareil imprégna les lieux et j'observai les chiffres en rouge défiler comme un compte à rebours. Mon esprit divaguait. Que se passerait-il lorsque la sonnerie retentirait ? Mon cœur exploserait ? Ce serait drôlement cocasse. Pour éclater, encore fallait-il qu'il y ait encore un cœur dans ma poitrine.

La silhouette de mon père se posta à mes côtés et posa une main ferme sur mon épaule.

—   Est-ce que tu es dans cet état à cause de ce qui s'est passé ? Parce que si c'est le cas, nous pouvons prendre rendez-vous chez un psychologue pour que tu parles de...

—   Non, l'interrompis-je, avant qu'il ne dise n'importe quoi.

—   Non, quoi ?

—   Ça n'a rien à voir, marmonnai-je à contrecœur.

Un moment de silence jusqu'à ce que le tintement du micro-ondes brise l'instant. Sans attendre, je récupérai l'assiette pour retrouver ma chambre.

—   Jay ! m'interpella à nouveau mon père.

Je me retournai et vis l'index de mon paternel pointer la table de la cuisine.

—   Assieds-toi.

Sa voix ne laissa aucune place à la protestation. Je fixai le visage sérieux de mon père et ses yeux de la même teinte que les miens me disaient que je n'avais pas intérêt à soupirer une fois de plus. Contraint, je posai mon cul sur la chaise et il me rejoignit, face à moi et les mains jointes.

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