Chapitre 21 : Roman

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Jay se recomposa rapidement un visage sérieux.

—   Si jamais on couchait ensemble, tu n'aurais aucun problème, Roman, dit-il. Je serais consentant et j'ai l'âge.

—   Tu t'entends, Jay ? Tu te rends compte de ce qui se passe ? Je ne... je n'ai pas envie de me poser des questions sur ce que je peux ou pas faire. Et si ça s'impose c'est justement parce que t'es un gamin. Si je veux baiser avec un mec, j'espère ne pas avoir à me demander s'il a l'âge ! C'est totalement absurde.

—   Ok, je comprends, mais le fait est que j'ai l'âge et que nous le voulons, ça devrait suffire pour arrêter de se poser des questions !

—   Bordel, pourquoi tu compliques tout, Jay ? m'agaçai-je en me levant.

Je lui tournai le dos, commençant à marcher dans ma cuisine aux couleurs claires s'harmonisant avec l'ambiance naturelle du bois. C'était apaisant. Mais pas suffisamment. Mes jambes s'impatientaient sous l'effet de mon rythme cardiaque trop rapide. J'avais besoin de bouger, sinon j'allais imploser. Je sortis de la cuisine pour me diriger vers le salon, où l'espace était plus grand pour circuler. Jay me rejoignit rapidement.

— J'en ai assez de t'entendre me dire que je suis un gamin. Je suis peut-être jeune, mais pas innocent. J'aimerais que tu arrêtes de me voir comme ça. Et je crois que tu te mens à toi-même. Tu ne serais pas attiré par-moi si tu pensais que j'étais vraiment un gosse. C'est toi qui compliques tout, Roman, conclut-t-il d'une voix sérieuse que je ne lui connaissais pas.

—   Non, je suis sensé, rectifiai-je.

—   Sensé ? répéta-t-il en écarquillant les yeux. En quoi es-tu sensé ? Tu as envie de moi et j'ai envie de toi, mais tu t'en empêches sous prétexte que je ne suis pas encore majeur. Comme si ça avait arrêté les autres ! J'ai déjà couché, Roman, tu penses que tu vas me ravir quelque chose ? Tu te trompes !

La bile me monta à la gorge. Mon corps se tourna d'un bloc vers Jay, planté au milieu de la pièce. Jay ne comprenait rien et il s'évertuait à me rendre dingue. Évoquait-il ses aventures sexuelles pour me mettre en rage ? Cela fonctionnait.

— J'ai parfaitement compris que tu avais déjà baisé, Jay, inutile de me rabâcher les oreilles avec ça ! Ce que tu fais te regarde, en ce qui me concerne, je ne veux pas être mêlé à ça ! Si tu veux baiser, trouve-toi un petit-ami, je ne suis pas un gigolo et je ne serais pas ton expérience sexuelle du moment, crachai-je, le regard venimeux.

— Pardon ? s'offusqua-t-il

La conversation nous échappait. Jay se focalisait sur l'aspect sexuel, comme s'il ne pouvait y avoir que l'attirance physique entre nous. Peut-être était-ce tout ce qui intéressait Jay. Peut-être n'avions-nous pas la même définition du mot plaire.

Et surtout, il ne comprenait pas la gravité de ma position.

—   Tu n'arrêtes pas de parler de sexe, comme si ça se résumait à ça, sauf que c'est bien plus complexe.

—   Eh bien, je ne comprends pas alors !

—   Tu es un adolescent, pas tout à fait un adulte. Ce serait considéré comme un détournement de mineur.

—   Quoi ? s'étonna-t-il, les yeux ronds.

—   Tu as la majorité sexuelle, ce qui implique que tu pourrais avoir des relations sexuelles, je te l'accorde. Mais pas avec un adulte qui est responsable de toi comme moi. On bosse ensemble, ce qui fait qu'on ne peut pas entretenir de relation.

Jay sembla choqué par mes propos, il ne devait pas saisir l'importance de la situation.

Pendant un long moment, Jay resta silencieux, presque abasourdi. Ses mains se crispèrent pour s'accrocher au dossier du canapé contre sa jambe. Il respirait vite et fort, si bien que j'eus envie de le prendre dans mes bras pour le calmer. Évidemment, je jugulais cet élan.

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