Chapitre II

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— Même pas un peu, chuchota Lucie en se tournant vers Adam alors que leur prof de philosophie écrivait des citations au tableau.

— Non, Lucie, même pas un peu. Ce prof de philo est même pas gay de toute manière, soupira-t-il en secouant les bouclettes sur le haut de son crâne.

— Oh oh, le gaydar de Adam s'est mis en marche, murmura Julien en lui faisant un clin d'œil.

L'adolescent pouffa légèrement en regardant son meilleur ami. Il ne le connaissait pourtant que depuis un an mais ils étaient inséparables. À l'époque, il faisait partie du groupe de Charles, qu'il fréquentait parfois avec Lucie car il sortait avec lui. C'était là que Julien l'avait convaincu de l'aider à séduire la belle blonde. Et il ne le regrettait pas, il avait gagné un ami extraordinaire qui n'avait pas hésité à abandonner son ancien groupe et sa popularité pour lui montrer son soutien. Indéniablement, s'il avait été gay, il aurait voulu sortir avec lui.

Il fut sorti de ses pensées par le son de la sonnerie. Il se leva rapidement en fourrant ses affaires dans son sac, imité par ses meilleurs amis, avant de sortir de la salle de classe avec eux. Il ignora superbement les regards dédaigneux et les chuchotements qu'il laissait dans son sillage et sortit du lycée. Il attendit que Lucie et Julien aient fini de s'embrasser pour se dire au revoir et salua la jeune femme avant de suivre le brun jusque chez lui. Il n'habitait pas très loin du lycée alors ce fut assez rapide d'atteindre l'immeuble où il occupait un appartement avec sa mère.

— Tu veux manger quelque chose en attendant qu'on parte, demanda Julien en ouvrant un placard et en sortant un paquet de Granola.

— C'est si gentiment demandé... je veux bien que tu me donnes ton paquet. Entier.

— Rêve toujours, microbe ! Un thé, comme d'habitude ?

— Oui, s'il te plaît, sourit Adam en regardant son ami s'activer derrière le comptoir de la cuisine alors qu'il s'asseyait sur un des tabourets pour commencer à dévorer les biscuits.

Il était vraiment beau gosse... mais malheureusement, ce que Julien s'amusait à appeler le "gaydar", ne s'était pas affolé à son contact. Il attendit silencieusement que le brun lui serve son thé et s'asseye à ses côtés avec un jus de fruit. Il parlèrent un peu et firent leurs devoirs avant que le plus grand des deux décide qu'il était l'heure de partir à la salle pour son cours de boxe.
Comme à son habitude, Adam ne prononça pas un mot et laissa son cadet faire la conversation en marchant sur le chemin qui menait à l'établissement. Quand ils arrivèrent finalement, Julien poussa la porte d'un coup de pied et salua rapidement un homme roux qui frappait dans son sac de sable, un pli énervé barrant son front.

— Il a pas l'air aimable, lui.

— Aaron ? Il est pas comme ça d'habitude quand il y a son copain, mais ça fait quelque temps qu'il est pas venu et vu son état c'est pas bon signe, lui souffla Julien avec une petite moue inquiète.

— Il est gay ?

— Ouais ! Et plutôt du genre, "appelle-moi Maître et vouvoie-moi" !

— Berk, leur vie sexuelle doit être beaucoup trop active.

L'apprenti boxeur partit dans un grand éclat de rire avant d'ébouriffer ses boucles cuivrées et d'aller vers les vestiaires. Le plus petit le suivit rapidement en ajustant la lanière de son sac à dos, pas prêt à rester seul dans la même pièce que Aaron. Il patienta sur le banc le temps que le brun enfile son short et son t-shirt de sport puis il l'aida à bander ses poings et à mettre ses gants bleus. Il prit la bouteille d'eau et la serviette de son ami et sortit avec lui des vestiaires. Julien lui désigna un banc en lui proposant d'aller s'y asseoir, ce qu'il fit après avoir jeté un coup d'œil en biais vers les autres garçons qui venaient s'entraîner ici, notamment le roux qu'ils avaient salué tout à l'heure. Il semblait avoir terminé et parlait avec un homme aux yeux à la couleur de l'acier.
Sa mâchoire manqua de se décrocher et son cœur loupa un battement pour repartir de plus belle en voyant le trentenaire passer une main dans ses cheveux noirs coupés courts dans un soupir. Ses bras étaient musclés, on pouvait même voir ses veines ressortir quand il les contractait, vision qu'il trouva extrêmement séduisante. Il se pencha vers son ami qui finissait de s'échauffer près de lui en soufflant :

— C'est qui le mec là-bas ?

— Mm ? C'est Henry, c'est lui qui gère la salle et c'est notre coach.

— Et il a quel âge ton coach ?

— Euh... Il a trente-sept ans... attends, pourquoi tu demandes ça ?

— Mm... Pour savoir.

Le plus grand des deux adolescents regarda l'autre se mordre la lèvre en fixant Henry. À la vue de ses yeux brillants d'intérêts, ses neurones firent rapidement la connexion. Son séduisant professeur avait encore fait des siennes, il avait tapé dans l'œil de son petit Adam. Il grimaça légèrement. Il ne voulait pas qu'il ait le cœur brisé à nouveau, sauf que Henry avait la fâcheuse tendance de refuser toutes les avances qu'on lui faisait. Et puis mine de rien, il y avait quand même dix-neuf ans d'écart entre eux. Mais il était aussi content de voir Adam penser à une autre personne que Charles, alors même si c'était juste un fantasme il n'allait pas lui briser ses rêves.

— Il te plaît ?

— Il est... vraiment craquant...

— Et notre gaydar, il dit quoi ?

— Que les signaux sont brouillés par ses yeux.

— Wow, t'es grave atteint là, se moqua Julien, c'est le coup de foudre.

Adam hocha légèrement la tête. Il était incapable de lâcher l'homme du regard. Son ventre se tordait, il sentait ses joues le chauffer, sa bouche devenir sèche à force de déglutir pour se calmer. C'était assurément un coup de foudre. Au même moment, Henry termina sa discussion avec son autre élève et alla vers eux en demandant d'une voix grave qui provoqua mille et un frissons dans sa colonne vertébrale :

— Tu es échauffé, Julien ?

— Oui, coach !

— Et qui est ce jeune homme ?

— Sa meilleure fangirl, répondit le petit brun à bouclette sans se démonter malgré la rougeur qui gagnait peu à peu ses joues pâles, Adam.

— C'est mon meilleur ami, précisa le plus jeune en voyant Henry les regarder tour à tour avec de grands yeux surpris.

— Oh, je vois...

— Mais si vous vous posez la question, je suis bien gay, ne put s'empêcher de préciser Adam.

Le coach fronça les sourcils. Il avait l'habitude qu'on le drague de manière peu subtile, mais il devait avouer que l'adolescent en face de lui faisait fort. Le jeune garçon lui fit son plus beau sourire, révélant ses dents blanches, et il ne put s'empêcher de se sentir légèrement troublé. Il y avait une sincérité en lui qu'il avait rarement vue ailleurs.

— C'est pas mon problème, gamin, tout le monde est le bienvenu ici. Bien, Julien va me faire quelques frappes dans le sac que je vérifie tes progrès.

Se sentant de trop, Julien se dépêcha de s'exécuter. Il ne put qu'entendre son meilleur ami demander quelque chose et la réponse cinglante de son professeur.

— Et vous alors ? Vous l'êtes ? Parce que vous faites dysfonctionner mon gaydar...

— Calme tes hormones, freluquet.

Parce que tu as besoin de sexe, toi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant