Chapitre VII

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S'il était d'un naturel silencieux, Adam n'avait jamais aussi peu parlé à ses parents que ces derniers jours. Quand il rentrait du lycée, il allait s'enfermer dans sa chambre et n'en ressortait que quand il fallait manger. Ainsi, il évitait soigneusement les questions et les leçons de morale sur les événements du week-end. Son comportement semblait un peu peiner sa mère mais il s'en fichait. Il n'y avait rien à dire de toute façon. Jonathan s'était moqué de lui et il avait perdu ses moyens. Enfin, il ne pouvait pas dire que tout avait été pourri dans ce déjeuner. Il avait pu s'expliquer avec Henry. En dépit de tous ses efforts, il ne parvenait pas à oublier le professeur de boxe. Son imagination fonctionnait à mille à l'heure dès qu'il pensait à lui, et il ne pouvait pas s'empêcher de rêver à un futur avec lui. ll savait que c'était impossible, Henry était juste gentil et essayait de le soutenir. La différence d'âge entre eux était si importante qu'il savait que son aîné ne tenterait rien avec lui, encore plus maintenant qu'il savait qu'il était le fils d'amis.

Mais comme il n'arrivait pas à l'oublier et que ça faisait longtemps qu'il n'avait pas eu de pensées aussi agréables, il avait décidé de l'aimer quand même. C'était à sens unique, ce serait sûrement douloureux, toutefois, rien ne pourrait être pire que le mal que lui avait fait Charles. S'il se taisait, il n'y avait aucune raison pour que Henry lui brise le cœur. En plus, il se sentait apaisé aux côtés du plus vieux.

Il soupira de bonheur en se rappelant qu'il l'attendait ce soir à la salle de boxe. Il avait vraiment hâte d'y aller. Mais avant, il allait devoir préparer un gâteau au professeur, comme il le lui avait promis. Et peut-être que comme ça, il parviendrait à oublier les moqueries qui l'avaient suivi pendant tout le début de la semaine.

~~~

Nerveux, Adam poussa la porte de la salle de boxe. Cette fois, Julien n'avait pas pu l'accompagner, à cause d'une autre activité le mercredi soir. Il était donc venu seul. C'était terriblement stressant, parce qu'il ne connaissait personne ici à part Henry et qu'il n'aimait pas affronter l'inconnu seul. Pourtant, à peine eut-il mis un pied dans la pièce qu'un des élèves de Henry s'approcha de lui. Il reconnut assez facilement le roux peu aimable qui tapait comme un forcené sur un sac de frappe la première fois qu'il était venu. C'était quoi son nom, déjà ? Aaron ?

— Tu es Adam, non ?

Il hocha la tête, surpris de ne pas entendre d'agressivité dans sa voix. Elle était grave et un peu autoritaire mais pas méchante. Le roux lui sourit d'ailleurs et ses étranges yeux dorés s'éclairèrent brièvement.

— Je suis Aaron. Henry doit régler des papiers alors il m'a demandé de te faire visiter en attendant qu'il arrive.

— O-ok...

Il se mordit la lèvre en se rendant compte qu'il avait bafouillé. Il n'était vraiment pas fait pour les interactions sociales. Aaron sembla amusé mais ne se moqua pas de lui. Au lieu de ça, il remplit son rôle de guide, lui montrant les différentes installations de la salle, avant de l'emmener aux vestiaires. Il lui dénicha un casier vide pour pouvoir y ranger son sac durant l'entraînement et lui ramena des gants ainsi que de quoi bander ses poings et ses poignets. Il le laissa pour qu'il puisse se changer, ce qu'il fit rapidement. Sa tenue de sport était basique, un sweat noir trop large pour son corps fin, comme à peu près tous ses vêtements, et un jogging gris avec des baskets noirs. Il se fit la remarque que ce n'était pas avec ça qu'il allait réussir à séduire Henry avant de ranger son sac. Il essaya ensuite d'enfiler les bandes, tentant de se rappeler comment il l'avait fait sur Julien quelques semaines plus tôt. Il galéra cinq bonnes minutes avant de laisser tomber, vaincu. Il allait devoir demander de l'aide. Il attrapa sa serviette, sa bouteille d'eau et la boîte de biscuits qu'il avait préparés pour Henry d'une main et, de l'autre, il prit les gants de boxe et les bandes. Une fois sûr qu'il arriverait à tout porter sans faire n'importe quoi, il quitta les vestiaires, un léger sourire aux lèvres.

— Tu es prêt ?

Il sursauta et se tourna vers la voix qui l'avait interpellé. Il s'agissait bien évidemment de Henry, appuyé contre le mur près de la porte des vestiaires. Il pria silencieusement pour que ses joues ne rougissent pas trop et essaya de ne pas trop s'attarder dans la contemplation des veines sur ses bras musclés.

— Presque, répondit-il en se concentrant pour ne pas perdre ses moyens, je n'arrive pas à bander mes poings.

— Je vais m'en occuper. Suis-moi...

L'adolescent ne se le fit pas dire deux fois et suivit le professeur à travers la salle. Ce dernier lui désigna un banc au niveau des sacs de frappe pour qu'il puisse poser ses affaires. Après une légère hésitation, il y déposa tout sauf la boîte de biscuits. Il la tendit vers Henry en baissant la tête pour ne pas avoir à le regarder.

— Qu'est-ce que c'est, demanda le plus vieux en prenant la boîte.

— Des biscuits à la cannelle... Je... je t'avais dit que je t'amènerais des gâteaux...

— Je ne pensais pas que tu étais sérieux... Merci.

— J'espère qu'ils te plairont !

Une main apparut soudainement dans son champ de vision et, avant qu'il ne puisse reculer, Henry avait attrapé son menton entre son pouce et son index. Il lui releva la tête pour pouvoir plonger ses yeux aciers dans les siens et le lycéen sentit son cœur fondre comme neige au soleil. Il devrait y avoir une loi pour interdire à quelqu'un d'être aussi beau. Il rougit légèrement en se rendant compte que son visage, et par extension ses lèvres, était proche de lui. Il avait l'impression de flotter sur un petit nuage, il ne savait pas trop ce qui se passait mais ça lui plaisait vraiment beaucoup.

Le boxeur était tout aussi perdu que lui. Il avait juste voulu relever la tête de l'adolescent, pour lui dire d'être fier de ce qu'il avait fait, mais il ne s'était pas attendu à être happé par ses grands iris aussi bleus que l'océan. Ses yeux étaient tellement beaux. Mais il y avait en eux beaucoup trop de souffrance, beaucoup trop de peur. Sa mâchoire se contracta légèrement. Pourquoi était-il comme ça ? Pourquoi disait-il que tout allait bien alors que ses yeux criaient le contraire ? Il le relâcha un peu brusquement et se détourna vers le banc pour prendre les bandes. Il aimerait tellement le comprendre, il aimerait tellement faire plus pour lui. Il savait que ce n'était pas normal, que c'était plus qu'une simple envie d'aider un membre de sa communauté, mais il savait aussi qu'il ne pouvait pas se permettre d'éprouver quelque chose pour lui. Il sortait à peine de l'adolescence, il était encore au lycée. Ce n'était sûrement pas sain.

Adam se mordit la lèvre. Il n'avait pas trop compris pourquoi mais Henry avait paru énervé pendant un instant avant de le relâcher. Il posa doucement deux doigts sur son menton, là où étaient ceux du professeur quelques instants plus tôt, et sa peau pâle se colora de rouge. Il allait vraiment finir par tomber amoureux s'il faisait des petites choses comme ça.

— Donne-moi tes mains.

Il sursauta légèrement. Henry était de nouveau devant lui et avait sûrement vu tout ce qu'il venait de faire. C'est-à-dire toucher l'endroit qu'il avait touché en rougissant. Il eut envie de disparaître. Si le plus vieux n'avait toujours pas compris qu'il crushait sur lui après ça, alors il avait de la chance.

Il tendit ses mains vers lui pour ne pas le faire plus attendre et le boxeur banda ses articulations avec précautions, lui montrant comment faire pour la prochaine fois. Sauf que Adam ne l'écoutait pas. Il était bien trop hypnotisé par le mouvement de ses mains musclées et veineuses sur les siennes, petites et fines. Henry lui prit la main pour se faciliter la tâche et il maudit sa peau de rougir aussi facilement. L'image de sa petite main dans son immense paluche avait de nouveau réveillé les papillons dans son ventre et ses jambes étaient redevenues du coton. Il se demanda même comment il faisait pour tenir debout.

Et son cœur qui battait à la chamade ne faisait que lui répéter l'évidence qu'il avait voulu nier. En vain. Il était amoureux de Henry. 

Parce que tu as besoin de sexe, toi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant