Chapitre I

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Adam éteignit son réveil en grommelant et quitta la réconfortante chaleur de ses couettes. Après être rentré de son magnifique rendez-vous de la veille, il avait pris un repas succinct et était parti se coucher. Ses parents étaient sortis, personne n'avait eu à juger sa maigre salade mis à part Calypso, la vieille chatte qui lui servait de confidente depuis ses sept ans. Il s'étira longuement après s'être levé et saisit son téléphone pour aller dans sa salle de bain. Il lança sa playlist et se glissa sous l'eau fraîche de la douche. Il regarda avec désespoir son sexe semi-dur comme tous les matins depuis le début de sa puberté et ce bien malgré lui. Par habitude, il l'ignora et attendit que les gouttes glacées le fassent retomber. Il savait que c'était naturel mais il trouvait quand même ça gênant. À moins que ce soit à cause des moqueries des autres lycéens ? Il soupira légèrement.

— Adam, dépêche-toi ou tes toasts vont être froids, entendit-il de l'autre côté de sa porte.

— J'arrive, m'man, hurla-t-il en finissant de laver ses cheveux.

Il quitta la petite cabine et se sécha. Ensuite, il revêtit rapidement un jean noir serré, troué au niveau des genoux, avec une chemise à carreaux rouges ouverte sur un t-shirt blanc et termina sa toilette. Il ne prit pas le temps de réorganiser les boucles folles sur le haut de son crâne et descendit dans la cuisine. Il salua la femme d'une quarantaine d'années qui s'y trouvait devant une tasse de café, déjà apprêtée pour aller travailler.

— Papa est parti, demanda l'adolescent en croquant son pain de mie grillé recouvert de pâte à tartiner.

— Oui, il avait un rendez-vous tôt ce matin... C'est moi qui t'emmène au lycée.

— Je dois vraiment y aller, soupira-t-il sans retenir son désespoir.

— Oh que oui, jeune homme ! La terminale, c'est important, tu prépares ton bac !

Adam grimaça légèrement en regardant sa mère avaler son nectar noir. Il ne voulait pas aller au lycée mais il ne pouvait pas lui expliquer pourquoi. Même si elle était au courant qu'il avait été en couple et qu'il avait rompu, il ne lui avait pas donné tous les détails de ce qui s'était passé l'an dernier. Quand il voyait les réactions des autres face à l'asexualité, il n'avait plus envie de se confier.

Il suivit la femme à l'extérieur de la maison pour prendre la voiture garée dans l'allée, sans piper mot. Il n'aimait pas beaucoup parler de toute manière, alors le silence ne le gênait pas. Il regarda par la fenêtre les rues défiler jusqu'à ce que sa mère se gare non loin de son lycée. Il embrassa sa joue avant de descendre du véhicule pour rejoindre les grilles ouvertes. Il entra dans la cour de l'établissement et rejoignit son petit groupe d'amis assis sur des rebords de fenêtres.

— Salut, Adam, comment ça va ?

— Ça va, et toi, Lucie ?

— T'as l'air... déprimé, ajouta un garçon près d'elle.

— Mon rendez-vous s'est mal passé, rien de bien nouveau...

Il posa ses fesses à côté de la jolie blonde aux cheveux coupés au carré. Il écouta distraitement leur discussion sur leur soirée de la veille, laissant son regard se perdre sur la foule d'adolescents. Il s'arrêta sur un groupe qui fumait dans un coin dédié de la cour. Plus précisément, sur un des garçons qui rigolait à gorge déployée, une cigarette à la main.

— Charles est toujours aussi beau, murmura-t-il en se perdant dans l'observation des longs cheveux noirs de l'adolescent au look de bad boy.

— Tu te fais du mal, Adam, soupira son amie près de lui.

— Charles est un enfoiré, microbe, tu ferais mieux de l'oublier, souffla Julien, le beau brun près de son amie.

Le plus petit du groupe, en taille, soupira avant de sauter sur ses deux jambes et de se planter en face d'eux. Il s'apprêtait à leur lancer une pique sur la façon dont ils aimaient s'immiscer dans sa vie privée mais il fut coupé par une voie à ses côtés :

— Hey, le frigide ! Tu es encore là ?

— Tu as manqué de temps pour te maquiller ce matin, Ophélia ? Parce que tu as une tâche sur ton front, là.

— Pardon ?

— Ah, c'est ta connerie, expliqua-t-il de manière détâchée avec un regard noir, je me disais aussi qu'elle était tellement grosse, c'est dur à cacher !

— Toi, espèce de... de sale petit PD...

— Que je sache, je préfère les hommes de mon âge, insulte non-recevable.

Comprenant qu'elle n'aurait pas le dernier mot avec le lycéen, la jeune femme pesta et s'éloigna à l'intérieur de l'établissement scolaire. Il serra les dents. Il aurait aimé dire qu'il avait pris l'habitude des moqueries mais ce n'était pas vrai, il avait juste appris à répliquer pour qu'on le laisse tranquille. Estomaqués par la scène, Lucie et Julien le fixaient comme un extraterrestre avant qu'il ne soupire longuement en remontant son sac sur son épaule. Il jeta un œil derrière lui et croisa le regard de Charles. Il frémit légèrement et déglutit en se détournant. Julien avait raison, c'était un enfoiré.
Son asexualité était la cause de leur rupture. En apprenant qu'il était asexuel, son ex-petit-ami l'avait jeté devant tout le lycée en le traitant de frigide. Et depuis, ça le suivait. Au début, il pensait que comme pour son attirance pour les garçons, ça passerait au bout d'un ou deux mois. Mais au contraire, plus de six mois après les événements et malgré les grandes vacances, il avait toujours le droit aux moqueries. À croire que coucher avec les hommes était mieux accepté que de ne coucher avec personne. Pourtant, il n'était pas incapable d'éprouver du plaisir, loin de là, ce qui ne faisait pas de lui un frigide. Il voulait simplement une romance qui n'incluait pas de relations sexuelles. Il n'avait jamais demandé à être la risée du lycée. Il ne comprenait pas quel plaisir Charles avait pu prendre à ridiculiser une personne qu'il était supposé aimer devant des adolescents affamés par les drames et cherchant à railler la moindre différence.

— Oh ! Adam ! Tu m'entends !

— Hein ? Euh... nan, désolé Ju', tu disais ?

— Que notre nouveau prof de philo était arrivé, donc qu'on avait cours avec lui cette aprèm... Apparemment, il est...

— Beaucoup trop sexy, l'interrompit Lucie, je t'assure ! Des filles de S l'ont eu hier, elles me l'ont dit !

— Cool. Mais je m'en fou.

Et c'était vrai. Il l'avait entraperçu dans un couloir la veille et il n'était pas du tout de l'avis de sa meilleure amie. Il avait certes du charme mais ce n'était pas son type.

— Quoi, s'indigna la blonde alors que Julien pouffait près d'elle.

— Tout juste bon à se rincer l'œil pendant le cours le plus ennuyant de l'univers.

La moue choquée de son amie valait tout l'or du monde et il ne put que rejoindre le petit-ami de cette dernière dans son hilarité. Ils furent coupés par la sonnerie annonçant le début des cours et allèrent vers leur classe de SES en parlant gaiement. Alors qu'ils rentraient dans la salle, Julien attrapa son bras et plongea ses yeux noisettes dans ses océans bleus en demandant :

— Tu viens bien avec moi à la boxe ce soir, hein ?

— Je vais passer pour ta fangirl en portant ta serviette et ton eau, t'es au courant ?

— Je pourrais pas rêver meilleur fan, sourit le plus grand des deux adolescents avant de lui passer la main dans les cheveux pour les ébouriffer tout en s'asseyant à une table, non, sérieux, tu viens ? Je sais que tu as toujours eu envie de regarder...

— Bien sûr que je viens, je te l'ai promis ! Et qui sait, s'il y a des gars assez mignons, je reviendrai peut-être, répondit Adam avec un petit sourire enjôleur en posant son délicat fessier sur la chaise près de lui, regardant Lucie aller un peu plus loin avec une de ses amies.

— Toi, t'aimes pas le sexe, mais t'aimes vraiment beaucoup trop les mecs.

— Il n'y a pas de mal à imaginer de belles romances avec certains, tu sais ?

— Je sais. Je préfère me dire que tu imagines faire des câlins à un gars plutôt que des scènes de sexes torrides que tu décrirais à Lucie juste après.

Le froncement de sourcil et la moue dégoûtée de son meilleur ami suffit à le faire éclater de rire. C'est vrai qu'il lui épargnait cette peine. Un regard noir de sa prof suffit cependant à le faire taire et il commença à prendre en note le cour.

Parfois, il se disait que c'était dommage que Julien soit hétéro et en couple, il était le seul à le comprendre vraiment... 

Parce que tu as besoin de sexe, toi ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant