Chapitre Dix-Sept

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Je restai près de lui encore pendant quelques heures, jusqu'à ce que le soleil soit haut dans le ciel. Les cris et les hurlements s'étaient tus depuis un bon moment maintenant, laissant place à un silence religieux. Personne n'était venu ; j'étais seule, toujours à genoux, triste et épuisée. J'avais encore pleuré, un peu somnolé aussi, puis je me suis rendu à l'évidence : je n'allais pas passer le restant de mes jours ici. Il fallait avancer. J'étais encore triste bien sûr, mais je ne pleurais plus. C'était déjà ça.

Je me relevai difficilement, grimaçant en étirant mes jambes engourdis et mes bras courbaturés, puis posai les yeux sur mon père. Il n'était pas question que je le laisse comme ça. J'invoquai ma magie, fermant les yeux pour mieux me concentrer. Tout mon corps se mit à picoter, et je sentais la magie parcourir mes veines. Des petites flammèches se créèrent au bout de mes doigts, et je rouvris les yeux lentement, tandis que mes paumes chauffaient doucement au contact du feu. Les flammèches devinrent des flammes, grandissantes et puissantes. Je soufflai dessus, orientant le feu vers mon père. Le feu devint fournaise, brûlant lentement et embrasant mon père tout entier. Bientôt, je ne le voyais presque plus, distinguant seulement une forme immense en face de moi, noire et inanimée. Le vent souffla, et le feu se répandit plus vite ; une heure plus tard, les cendres encore fumantes remplaçaient le dragon Smaug, qui fut jadis mon père.

D'un revers de la main, je fis souffler le vent, rassemblant ainsi toutes les cendres qui s'envolèrent, puis formant une masse en face de moi. Je l'observai quelques secondes, et bien sûr, les cendres prirent la forme d'un dragon, ce qui me fit sourire.

- Adieu, Papa... J'espère te revoir un jour dans une autre vie...

Je fis une petite courbette respectueuse, puis laissa les cendres s'envoler au gré du vent, loin de moi. Je les suivis des yeux, laissant retomber ma magie.

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Qu'allais-je faire maintenant ? Retourner à Lacville ou sur Erebor ? Je me pinçai les lèvres en réfléchissant, hésitante. Il y avait certainement à faire à Lacville ; les humains n'avaient plus de maisons, ils allaient devoir trouver un autre endroit pour pouvoir reconstruire leurs vies. Une aide de plus ne serait sûrement pas de trop. Et sur Erebor ? Les nains, qu'allaient-ils faire ? Je ne les avaient pas vu cette nuit, ni eux, ni Bilbon. Ils devaient être restés à la Montagne Solitaire ; mais maintenant ? Est-ce qu'ils savaient que mon père était mort, et que les habitants de la ville avaient besoin d'aide ?

J'en étais là dans mes réflexions quand des voix me sortirent de mes pensées. Je me retournai, surprise de voir débarquer les autres nains qui étaient restés à Lacville. Ils couraient vers moi, le sourire aux lèvres, m'appelant en me faisant des signes de la main. Le brun à la jambe blessée semblait guéri. Tant mieux, un souci en moins. Je souris. Thorin allait être soulagé que son neveu ne soit plus en danger de mort.

- Contente de voir que vous êtes encore en vie ! M'exclamais-je dans leur direction.

- Vous aussi ! Lança le frère du brun.

Ils me rejoignirent, et se mirent tous à parler en même temps ; ils étaient impatients de savoir ce qu'il s'étaient passé de notre côté.

- Du calme, du calme, tempérais-je en riant face à leur enthousiasme. Et si on y allait au lieu de bavarder ?

Il acquiescèrent en chœur et avec joie, et nous nous mîmes donc en marche. Leur présence apaisa mon cœur lourd de tristesse, et me changeait les idées. Je repensais à Thorin. Comment allait-être nos retrouvailles à tous les deux ? Il fallait que je lui parle ; que je sache ce qu'il l'avait poussé à m'embrasser ou... Autre chose, peu importe, mais une explication ! J'étais un peu perdue, et je ne savais plus ce que je voulais. Est-ce que sans m'en rendre compte j'avais des sentiments pour lui, et que ce baiser en était la cause ? Était-ce pour cela que je ne l'avais pas repoussé ? Ou était-ce parce que j'étais encore sous le choc après avoir revu mon père ?

En fait, je me rendis compte que j'attendais beaucoup de Thorin ; son explication mettrait de l'ordre dans mes propres pensées. Enfin, je crois.

Une fois arrivés, les nains se ruèrent vers l'entrée encore démolie par Papa. Les autres étaient justement en train d'amasser pierres et roches pour fermer la porte. Quand nous arrivâmes, ils nous accueillirent avec le sourire, mais je vis que Bilbon ne partageait pas l'enthousiasme des autres ; je remarquai également que Thorin n'était pas dans les parages, ce qui me surpris. La réponse à mes interrogations ne tarda pas, car quand le neveu de Thorin demanda à Balin où était leur oncle, le nain à la barbe blanche sembla soudain gêné et embêté.

- Eh bien... Je ne sais pas comment vous dire cela, mais Thorin n'est... Plus vraiment lui-même depuis que nous avons sommes ici.

Je fronçai les sourcils, intriguée. Comment ça, plus lui-même ? Les autres aussi semblèrent perplexes, et insistèrent pour savoir où était leur chef.

- Dans les salles, au sous-sol. Lâcha Balin presque à regret.

Les neveux en tête, nous nous précipitâmes vers le lieu indiqué. Je me pinçai les lèvres, redoutant le pire. Balin semblait vraiment inquiet. Dans quel état allions-nous le retrouver ?

Quand nous arrivâmes, je ne sus dire si ce que je voyais était pire ou mieux que ce que j'avais imaginé.

Quelques nains étaient en train de fouiller les immenses tas d'or qui montaient à des hauteurs vertigineuses ; Thorin était au-dessus d'eux, perché au sommet d'une sorte de petite tourelle. Il portait une couronne, et un manteau royal qu'il avait dû trouver dans les salles de la Montagne. À côté de moi, les nains appelèrent leur chef, et je sentis dans leur voix leur inquiétude. Je comprenais ; même si je ne connaissais pas Thorin depuis bien longtemps, le nain que je voyais là-haut ne lui ressemblait pas ; en tout cas, pas dans l'idée que je me faisait de qui il était. Et quand il se tourna vers nous, des frissons me parcoururent l'échine ; décidément, je comprenais pourquoi Balin avait l'air si inquiet.

- Mes chers neveux ! Les accueillirent Thorin, bras ouverts et sourire aux lèvres. Bienvenue à Erebor !

Ses paroles résonnèrent dans l'immense salle, mais son sourire ne lui ressemblait pas.

- Qu'est-ce qui se passe ?! Questionna un des nains en désignant les autres qui fouillaient toujours les tas d'or.

Le visage de leur oncle se durcit, et il fronça les sourcils.

- Bilbon n'a pas trouvé l'Arkenstone. Grommela-t-il. Il est impératif de le trouver !

- Et concernant la porte ? Lâchais-je avec une légèreté feinte, comme si nous parlions au vrai Thorin.

Il me jeta un coup d'œil, et son regard me glaça.

- Que faites-vous encore ici, vous ? Me rétorqua-t-il froidement.

J'ouvris la bouche, mais ne su que répondre. Je m'attendais à tout, sauf à ça. Comment ça ce que je faisais là ?

- Nous n'avons plus besoins de vos services, reprit Thorin, voyant que j'étais muette. Repartez d'où vous venez.

- Je... Quoi ?! Balbutias-je.

Il me lança un regard de pur mépris, et se détourna de nous. Les autres me regardèrent avec surprise, certainement étonnés eux aussi, mais certainement pas aussi sous le choc que moi. Je les aidais à rejoindre la Montagne, à ouvrir cette fichu porte, et j'avais même sauvé la vie de cet imbécile et je l'avais EMBRASSÉ... Et il me demandait de PARTIR ?! Je fulminais littéralement sur place. Lui, il allait m'entendre ! 

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Fille De Dragon ~ Nouveau chapitre tous les deux jours, à partir de dix heures

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