Feelings

Chapitre 21

Le lendemain, je fus un peu en retard car j'avais mis du temps à m'endormir. Mes nuits en ce moment étaient pleines de réflexion. Impossible de fermer l'œil avec ces nombreux problèmes sans solutions et ces nombreux cauchemars que je faisais. Après m'être habillée à toute vitesse, je pris mon sac et m'aperçus que je n'avais pas rangé le livre emprunté aux archives. Je me pressai pour le ranger sous mon lit quand au même moment, mon père toqua à ma porte tout en rentrant dans ma chambre. Je cachais immédiatement le bouquin derrière mon dos lorsque mon père m'interrogea :

— Que caches-tu derrière ton dos Anxieuse ?

— Rien.

— Montre-moi ça je t'en prie.

— C'est un livre que j'ai emprunté à la bibliothèque. Ce n'est rien.

— Anxieuse, montre-moi, ça m'intéresse de savoir quel livre lit ma fille.

Je lui montrai alors le livre en question quand soudain, une expression de colère apparut sur son visage. Il le prit en sa possession en me l'arrachant des mains et s'exclama aussitôt :

— Anxieuse ! Où est-ce que tu as trouvé ce livre !

— À la bibliothèque.

— Tu n'aurais jamais dû trouver ce livre. Je vais appeler ton lycée. La proviseure va en prendre pour son grade.

— Mais, il n'y a rien à l'intérieur !

— Encore heureux, tu n'aurais jamais dû le prendre ! Pourquoi tu l'as pris, quel est ton but ?

— Je l'ai pris car personne ne sait ce qu'il s'est passé à Feelings pour qu'on vive dans une dictature pareille. Personne ne m'a expliquée pourquoi il y a cette loi. Je sais que tu te méfies de moi. Et bien je te le dis papa, je suis curieuse, je suis un humain ! Traite-moi de changement si tu le souhaites, ça m'importe peu.

— J'aurais voulu être sourd face à tes propos. Si les pages ont été arrachées, c'est pour une bonne raison.

— Je ne sais pas qui a pu les arracher mais je souhaite juste qu'on me dise pourquoi la ville est ainsi. Je ne demande pas la lune que je sache.

Soudain mon père se mit à soupirer tout en baissant le regard au sol, puis le reposa sur moi en me disant :

— On ne peut décidément rien te cacher. Tu es très tenace. Je ne connais pas la raison Anxieuse, je vais juste te dire quelque chose. Il y a quatre ans, une jeune fille du même âge que toi, se renseignait également sur la ville, sur cette loi. Elle voulait à tout prix percer ce mystère, savoir pourquoi la loi était rentrée en vigueur. Jusqu'au jour où elle a enchaîné les émotions en public, la police s'est lancée à sa recherche. Elle s'est enfuie et on ne l'a jamais retrouvée. C'est pour ça que je ne souhaite pas que tu sois à sa place. Je ne veux pas que ma fille soit pourchassée par les autorités. Je ne veux pas qu'il t'arrive quelque chose, tu comprends ?

— Je ne savais pas mais qu'est devenue cette fille ? Elle était de quelle famille ?

— Je l'ignore. Maintenant tu es prévenue. Je ne veux plus reprendre cette discussion, d'accord ?

— Promis, répondais-je à mon père en soupirant.

— File en cours. Tu es en retard, il me semble.

— Et pour le livre ?

— Ne t'en occupe pas. Je vais le mettre en lieu sûr.

En sortant de la maison, j'étais sous le choc de ce que mon père venait de me raconter. Une fille avait donc pensé comme moi quelques années en arrière. Mais qu'était devenue cette fille après tout ce temps ? Il fallait que j'en sache un peu plus. Peut-être que cette fille se cache toujours. Il fallait absolument que je la retrouve. Je m'étais lancée un pari de trouver d'autres personnes pensant comme moi mais je n'y croyais pas vraiment vu l'immensité de Feelings. Mais ça, c'était avant que mon père me raconte cette histoire concernant cette fille.