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Janvier 2016

  JE SORS TOUT JUSTE du sixième magasin de vêtements que je viens de faire. Je me suis organisée une petite journée shopping rien que pour moi toute seule. J'ai sorti mon téléphone pour regarder l'heure, il est 14 heures 16. J'ai continué à marcher en regardant quelques messages jusqu'à ce que je sente quelque chose me bousculer.

  — Fais attention à où tu marches ! m'écriai-je en regardant le contenu du gobelet Starbucks s'étaler sur mon sweat blanc.

  J'ai regardé le métis en face de moi. Il m'a adressée un sourire gêné.

  — Désolé, c'était pas fait exprès.

  — Heureusement !

  J'ai fait demi-tour pour aller rejoindre ma voiture. C'est la première fois que je mettais ce sweat, j'aurais dû lui demander de me rembourser. Je viens tout juste de l'acheter avec mes économies que j'ai réussi à récolter dans mon boulot de baby-sitter. J'ai commencé à faire ce job quand j'ai eu dix-sept ans, il y a six mois. J'ai ouvert ma portière avant d'entrer à l'intérieur de ma Volkswagen.

[...]

  Quelques heures plus tard, lors d'un long moment d'ennui, j'ai eu l'idée de me faire un gâteau au chocolat. Mes parents et mon petit frère pourront en profiter. Seulement, j'ai un problème de grande importance : je n'ai pas de chocolat. Alors, je suis en route pour la supérette de mon quartier. J'habite en haut d'une montée, l'épicerie est en bas. J'y vais très rarement, contrairement à ma mère qui y va a chaque fois qu'elle a besoin d'un truc. Je pense que je n'y suis pas allée depuis six mois, les caissiers ne sont pas accueillants, c'est à peine s'ils te disent bonjour, et les clients font tous une tête déprimante. Ils ne doivent pas connaître le sourire. Ma mère trouve qu'ils sont super gentils, je me demande vraiment si on va au même endroit.

  Arrivée là-bas, j'ai pris l'ingrédient manquant ainsi qu'une boîte de six œufs, au cas où il en manquerait puis j'ai foncé à la caisse. La tête du caissier m'est étrangement familière. Il y a une dame avec un tas d'article devant moi alors j'ai le temps de me perdre dans mes pensées pour essayer de retrouver qui est ce gars. J'ai pris quelques secondes à réaliser que c'était le métis qui m'a bousculé tout à l'heure.

  — Mademoiselle ? fit une voix, me sortant de mes pensées.

  Le caissier m'a sourie avant de scanner mes articles.

Oui, excusez-moi, je pensais à autre chose.

  — J'suis encore désolé pour tout à l'heure.

Cette fois, c'est à mon tour de lui offrir un sourire. C'est la première fois qu'un caissier d'ici est aussi accueillant, ça fait plaisir.

  — Je te pardonne, j'ai lancé un rapide coup d'œil à son badge, Kylian.  

  J'ai froncé les sourcils avant de reprendre.

  — Non, j'vais t'appeler Kyky, juste Kyky.

Il a fait la moue.

  — Et moi, j'suis censé t'appeler comment ?

  — Tu veux déjà mon numéro ? demandai-je en faisant allusion au double sens du verbe « appeler ».

  — Tu m'as très bien compris, rétorqua-t-il en roulant des yeux.

  — Léna, juste Léna.

  — Lé, c'est très bien comme surnom, déclara-t-il.

J'ai croisé mes bras.

  — Il ne me plaît pas.

𝐒𝐏𝐄́𝐂𝐈𝐀𝐋𝐄 - 𝐊𝐘𝐋𝐈𝐀𝐍 𝐌𝐁𝐀𝐏𝐏𝐄́Où les histoires vivent. Découvrez maintenant