Après le silence

Les confidences d'Aimy à Jade.

Sans plus se parler, Aimy et Julia sont retournées en cours. après ces derniers, de retour en bus, Aimy s'en est vite allée au Jardin des Souvenirs. Elle est pressée aujourd'hui car elle a besoin de se confier. Ce n'est pas qu'elle n'a rien à étudier, ni travailler, c'est surtout l'envie urgente et incessante de s'ouvrir à sa petite amie.

Aimy est perturbée et son esprit est comparable à un raz de marée. Elle ne sait plus comment gérer ses émotions et s'apitoie plus que de raison. Elle s'interroge même sur le son de sa voix, si elle reviendra ou au contraire disparaitra à jamais. Elle se pose tant de questions dont elle aimerait y répondre. Et depuis qu'il y a Julia, les interrogations se répandent sans savoir pourquoi.

Aimy est déboussolée, affolée, elle s'empresse de s'installer sur son coussin, en face de Jade.

             À Jade,

Je sais que tu n'es plus là physiquement, que le temps s'en est allé depuis l'accident, mais je n'y arrive pas. Tu es encore si présente dans mon esprit que je peux encore sentir ton souffle sur ma peau, tes mains dans mon dos, tes caresses sur chaque parcelle de mon corps.

Je sais que j'ai tort et qu'il faut que je me redresse pour chasser cette tristesse. Mais comment t'oublier quand j'ai encore le goût de toi sur moi, quand je nous vois encore faire l'amour, dans ces draps où nous avons tant transpiré et où nous nous sommes tant aimées. J'ai l'impression que ma tête va exploser et que plus jamais je ne serais capable d'aimer. Je n'accepte pas ce qu'il s'est passé et tout le vide que tu m'as laissé. Nous allions nous marier, nous étions heureuses et tu m'as abandonné. Bien sûr que ce n'était pas ta volonté, que tu ne pensais qu'à vivre, mais aujourd'hui, je ne fais que souffrir. Toi, tu es reposée dans cet endroit, mais moi, je suis torturée et je ne sais pas si je retrouverai ma voix alors que j'aimerais tant crier. 

Je sais que tu ne reviendras pas et que je dois avancer mais chaque fois que j'essaie, c'est toi que je revois. Tu es dans toutes mes pensées. La mort n'était pas une option et nous ne nous étions pas préparées. Ce n'est pas le cœur léger que je pars étudier chaque matin. Il y a bien des embûches sur mon chemin et des étudiants remplis de méchanceté. Le monde est cruel, pas comme nous l'avions imaginé. Pour tous ceux et celles qui ne comprennent pas, je suis la bête à abattre, le pauvre petit animal blessé. Il m'est difficile de parfois les éviter et sans voix, je suis la proie facile.

J'ai perdu toutes expressions alors que, te souviens-tu comme nous rions ! Je voudrais tant que ce soit comme avant. Quand tu me serrais dans tes bras, que tu me déposais un baiser et qu'on oubliait tout. Je sens encore la douceur de tes lèvres sur les miennes, celle de ton corps aussi. Bien souvent, les scènes de notre intimité me reviennent et je me surprends à ressentir les mouvements de ton bassin. J'aimais ton sexe collé au mien qui par frottements savait nous emporter par des cris et des gémissements. Je ne connaissais pas cet amour-là et avec toi, j'ai tout découvert. Nous n'en avions jamais assez, toujours le besoin de se le prouver. Comme tes mains me manquent et tout de toi. 

Jade, aide-moi !

                L'esprit de Jade,

Aimy, oui, je ne suis plus là et nous en avons déjà longuement discuté. Oui, plus rien ne sera comme avant, juste différent. Tu dois arrêter de penser ou plutôt non, cesse de me comparer. L'amour est cruel quand il s'en est allé, mais il peut être aussi éternel si tu le laisses à nouveau entrer. Tu es jeune, pleine de vie Aimy et tu ne dois pas tout briser de par ce qu'il m'est arrivé. Tu n'y es pour rien, c'est le destin qui a frappé. Je suis toujours là quand tu as besoin, mais je refuse de te soutenir avec ton esprit torturé.

Nous avons toujours nos souvenirs sauf qu'aujourd'hui, tu dois t'en créer d'autres. Tu dois me prouver que tu es capable, ne pas renoncer à tout ce que nous avions envisagé. Car ça voudrait signifier que tu as abandonné et que nous avions rêvé pour rien. Que tu n'as rien compris de la vie qu'on s'était faite de demain.