Après le silence

Réponse de Julia à Aimy.

Julia et Aimy ne commencent qu'à 9h ce matin et cela jusqu'à midi. Elles prendront leur repas sur le banc qu'elles se sont attribuées avant de rejoindre la table du fond de la bibliothèque. Comme leur temps est limité, c'est dans la détente qu'Aimy dessinera en musique sous l'œil avisé de Julia. Fort contentes du moment passé, Aimy s'apprête à tendre la lettre. Elle fixe Julia, étonnée par son geste et lui pointe du doigt, la petite phrase du bas. Julia la remercie même si elle ne comprend pas, mais elle apprécie. Julia sourit par le petit exploit de son amie puis se dirige tout droit vers les amphis où le professeur se tient déjà.

Les séances finies, elles iront travailler deux heures à la bibliothèque, pour leurs révisions. Comme à l'accoutumée, elles ne verront pas les heures s'écoulées et se sentent prêtes pour revenir demain.

Dehors, la pluie a redoublé et Aimy sort son parapluie jusqu'à l'abri présumé. Elles semblent peinées de se quitter, malgré qu'Aimy se sente frileuse par son anxiété. Les chemins s'opposent mais elles disposent d'un peu de liberté ce soir. Aimy n'ira pas voir Jade car il fait déjà nuit. Cependant, elle lui racontera sa journée, une fois dans ses draps, et repassera toutes les photographies de sa petite amie.

Julia arrive chez elle, salue sa grand-mère, lui débite sa journée devant une tasse de café et quelques madeleines. Elle savoure ces moments-là, avec elle, car elle sait combien ils ne seront pas éternels. Julia partage aussi les silences de son amie, comment elles étudient et combien elle apprécie. Sa grand-mère sourit au visage de Julia qu'elle trouve radieux depuis quelque temps. Tout comme celui d'Aimy, il a perdu de sa lueur depuis l'adieu. Sa grand-mère se réjouit du changement de sa petite fille et lui fait savoir. Elle a bon espoir que Julia reprenne goût à la vie. En parlant de cela, elle se souvient de la lettre et s'excuse auprès de sa grand-mère pour s'isoler dans ses quartiers tandis que celle-ci va préparer à manger.

Julia saute sur son lit, courrier en main, qu'elle détaille avant de prendre soin de l'ouvrir correctement. Dès les premières lignes, ses yeux deviennent humides car elle ne pensait pas qu'Aimy avait tant d'estime pour elle. Elle s'étonne de la confiance qu'elle lui témoigne et de sa franchise. Puis vient le passage qui inonde son visage de larmes salées qu'elle ne peut retenir. Personne ne devrait autant souffrir, ni vivre cet instant.

Julia est dévastée et doit faire une pause avant de reprendre la lettre. Elle se lève, attrape un paquet de mouchoirs pour s'essuyer et se moucher. Elle ne s'attendait pas à une telle révélation, autant de compliments et un tel accident. Dans sa poitrine serrée, une vague de sentiments et d'émotions la submerge.

À peine remise, elle s'efforce de continuer sa lecture mais c'est encore plus démise, le cœur au bord de la déchirure, qu'elle finalise la lettre. Estomaquée, bouleversée, en colère et peinée, elle rassemble ses idées, les yeux fixés au plafond. Elle ne peut s'imaginer son amie dans un silence aussi profond et surtout comment elle peut encore exister après ça. Comment peut-elle croire que Julia pourrait la laisser après s'être révélée? Sans attendre, Julia s'installe à la table de son bureau et se décide à lui répondre. Elle aussi va devoir se dévoiler, mais elle sous-estime son malheur à celui de son amie.

                                                               Aimy,

                      Tout d'abord, laisse-moi te dire que je n'ai jamais rencontré quelqu'un comme toi, avec tant de force et de courage. Car crois-moi, il en faut, non seulement pour se dévoiler, mais aussi pour avoir affronté ce drame. 

Ta lettre m'a bouleversé et je ne trouve même pas les mots pour pouvoir te réconforter. Comment pourrais-tu croire que je veuille t'abandonner alors que depuis que tu es là, je retrouve l'espoir et un goût à la vie. Ce n'est pas de la pitié de ma part que tu liras, mais une profonde estime et une sincère amitié. Bordel, je me sens si vulnérable à tes côtés que mes mots sont dérisoires. Même si j'ai vécu une histoire tragique, je me trouve tellement pathétique face à toi.

Mais tu as raison, l'amitié est basée sur la confiance et à présent, je peux me confier avec toi, sans ressentir la moindre gêne ou désillusion.

Pour commencer, je vis avec ma grand-mère depuis 7 ans déjà. Elle m'a recueillie après que mes parents soient décédés dans un accident. Ma mère était en tournée, accompagné de mon père. À la sortie du concert, la pluie s'est invitée lorsqu'ils regagnaient leur hôtel. L'orage était sévère et ça tombait de plus belle. La voiture a glissé sur une flaque, tourbillonnante, elle s'est écrasée contre un rocher pour découvrir deux corps flasques au matin. Je t'épargne les détails et mon chagrin. Et même s'il ne s'agit pas du même amour, il y a la perte de quelqu'un et ce ressenti de tout qui s'arrête.

Pourquoi voudrais-tu que je te rejette? Alors que tu viens à peine de donner un sens à ma vie? Je ne prétends pas pouvoir t'aider, mais une chose est sûre, c'est que je n'ai pas l'intention de te rejeter. Je dirais même que j'ai encore plus envie de te connaître. Déjà quand tu dessines, tu me fascines, quand nous révisons, tu me sublimes par ton intelligence et ta motivation. Je me suis attachée à toi et pour rien au monde,  je ne voudrais te remplacer.

Oh oui, je sais que les gens parlent sans savoir et ça fait bien longtemps que j'ai appris à les ignorer. Ils font peine à voir tous ces étudiants sans âme, bercés d'illusions, aux vies monotones.

Toi, tu es différente et tellement intéressante, même sans voix. Je l'ai ressenti la première fois où j'ai croisé ton regard. Je ne l'explique pas vu ce que je sais et vois de toi. Mais tu as cette lueur et cette douceur que les autres n'ont pas. Serait ce les drames de notre vie qui nous unissent et nous comprennent? Je ne sais pas, mais je sais ce que tu représentes pour moi. J'aime être complice avec toi et partager notre quotidien. Je trouve qu'on s'entend bien.

Aimy, je serai toujours là pour toi. Que ce soit à la faculté, ailleurs ou sur une lettre, je saurai te prouver que tu peux compter sur moi.

Je te souhaite aussi Bonne Chance pour tes examens et je te dis encore à demain, pour nos révisions et notre quotidien.

                                                                                                   Julia.

Julia ne relit pas. Elle enferme son papier dans une enveloppe puis inscrit le prénom d' "Aimy" au milieu. Pas besoin de lui spécifier de lire plus tard, elle connaît Aimy et sa pudeur. Julia a déversé les mots au fil de ses pensées et tout ce qu'elle avait sur le cœur sans se poser de questions. Elle est comme ça Julia, spontanée. Elle ne cherche pas à plaire et c'est plutôt une solitaire. Alors oui, elle apprécie la compagnie d'Aimy et tout ce qu'elle dégage malgré son manque d'expressions. Julia se félicite d'avoir eu une bonne intuition en se rapprochant d'Aimy.

                                                                                           ***

Coucou à vous et merci encore d'être toujours là, pour vos lectures, vos votes et vos commentaires.

C'est ici que je me suis arrêtée et je souhaitais savoir ce que vous en pensiez. N'est-ce pas trop long? Le récit vous plaît-il? Et comment verriez vous la suite?

N'hésitez pas à me faire part de ce que vous ressentez car je suis preneuse de vos commentaires. 

Merci encore à vous et à bientôt.