Chapitre 9

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*Matt*

Les bras croisés derrière ma nuque, je fixe le plafond sans trouver le sommeil. Je revois sans cesse les yeux vides de Kim et je suis démuni face à sa détresse. Sa sœur n'a rien voulu me dire. Je souffle d'exaspération tandis que les heures défilent sur l'horloge murale. Je finis par me lever, me rhabiller avant d'attraper mes clefs de voiture.

Je ne fais pas attention à la réceptionniste de nuit qui me regarde intriguer. Une fois installé derrière le volant, je roule vers le seul endroit où je me sens bien et où je pourrais arrêter de penser à Kimiko : mon salon de tatouage.

En entrant, je pose mes affaires dans mon bureau et me dirige vers la salle d'eau pour m'asperger le visage. Le miroir me renvoie le reflet d'un homme débraillé, cerné et aux cheveux en bataille. Je fais peur à voir. J'aurais bien besoin d'une douche, mais à aucun moment je ne me suis dit que ça aurait été une bonne idée avant de sortir de chez moi. Des images de Kim me reviennent en tête. La détresse dans son regard ainsi que la violence de ses gestes maîtrisés. C'était comme si, se battre faisait partit d'elle. J'ai envie de lui écrire, mais je ne savais pas comment m'y prendre. Ce n'est pas la première fois que j'ai affaire à un tel comportement. Pour la plupart, ils étaient atteints de stress post-traumatique. Que lui était-il arrivé ?

J'allume ma tablette et attaque à travailler sur les commandes en cours. Dessiner est le meilleur moyen pour m'empêcher de réfléchir. À l'ouverture du shop, j'ai déjà fini un phénix posé sur un crâne qui devait recouvrir la cuisse d'un habitué.

Je passe la journée à tatouer, rire et écouter les histoires d'un groupe de femmes qui sont venues soutenir leurs amies. Leur joie et leur bonne humeur ont fait disparaître toute fatigue sur mon visage. Une fois terminé, je la laisse se rhabiller et payer avant d'aller chercher mon client dans la salle d'attente. Il m'avait fallu une semaine pour réaliser le dessin qu'il voulait. Le type était une armoire à glace. Une coupe stricte et des yeux d'un bleu puissant. Le genre d'homme à gonzesses. Quand il m'aperçoit, il me sourit et me tend la main que je serre volontiers. Il m'emboite le pas, s'installe et je lui montre sur ma tablette son futur tatouage qui représente des carpes koïs. Nous faisons quelques retouches, puis au moment où il enlève son tee-shirt je me raidis. Je déglutis sans lâcher le faucon qui s'étend sur ses côtes.

— Il y a un problème ? demande-t-il en suivant mon regard sur sa peau noircie.

Je tressaille au son de sa voix grave.

— J'ai... j'ai le même.

Il fronce un instant les sourcils, puis rigole.

– C'est impossible. Celui-là il a une putain d'histoire, mec.

Au moment où je soulève mon tee-shirt pour lui prouver que j'ai bien le même, son poing s'abat dans ma tête. En moins de temps qu'il n'en faut, je me retrouve plaqué contre le mur, sonné.

Falcon-Ink TherapyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant