Chapitre 15

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*Kimiko*

— Kim, tu sais que les infirmières n'apprécient pas que tu tatoues un macchabée, ricane Jimmy.

Je me crispe sur la machine.

— Il ne va pas mourir.

Mon frère attrape un tabouret qu'il installe de l'autre côté du lit. Les coudes contre le matelas, je sens son regard réprobateur sur moi et ça m'agace.

— Pourquoi tu lui fais le même que le nôtre ?

Je souffle et me redresse pour lui faire face.

— Jim, il m'a maintenu en vie. C'est un frère d'armes. Il est comme nous. Il fait partie de cette famille maintenant.

Sa mâchoire carrée se contracte et je vois bien qu'il essaie de se contenir.

— C'est un Anglais ! Il ne fait même pas partie de notre armée !

— Il me l'a demandé, Jim.

Il secoue le menton, puis lève les bras. Il ne me comprend pas.

— Dans cette grotte, je n'aurais pas survécu seule. Bordel, Jim, tu n'étais pas là ! Tu n'as pas vécu l'enfer. Alors, laisse-moi faire ce putain de tatouage. Dis-toi que c'est comme une thérapie.

Mon frère détourne la tête.

— Je suis tellement désolé de ne pas être arrivé plus tôt. Kim, comment tu vas ?

Je hoche les épaules. C'est une bonne question. Mon corps n'est qu'ecchymose, mes bandages me grattent. Je n'ai plus d'ongle et ça fait un mal de chien, rien que de tenir le dermographe. Mais comment lui avouer que je me sens vide ? J'ai pourtant tué mes ravisseurs et tous ceux qui se trouvaient dans la grotte, femme et enfant compris.

Je ferme les yeux tandis qu'une larme coule le long de ma joue. J'entends le tabouret de Jimmy grincer contre les tomettes rouges. Il me retire l'appareil de la main pour enrouler délicatement ses bras autour de moi. Le parfum familier d'agrume de son déodorant et de la lessive me ramène au présent. Je m'ancre à lui alors que je craque. Il me berce lentement et je sens ses lèvres contre ma tempe.

— Je t'aime Kimiko. Ne t'en fais pas, je suis là maintenant.

Un sanglot m'échappe alors il me serre plus fort contre lui.

— Si tu savais comme j'ai eu peur qu'ils découvrent que j'étais une femme, reniflé-je. Je veux rentrer à la maison auprès Marie et Nana.

Il presse plus fort sa joue contre le haut de mon crâne et je l'entends déglutir.

— Plus qu'une semaine à tenir Kimy. Plus qu'une.

— Chaque fois, je priais pour que tu viennes me chercher. Chaque jour, je pensais à Marie, Nana et toi. J'étais terrorisé à l'idée de ne plus jamais vous revoir.

Je me redresse lentement, mon regard verrouillé à celui rougi de mon frère.

— Je suis là, maintenant.

Du bout des pouces, il caresse ma peau pour effacer mes larmes, avant de poser son front contre le mien.

— On va s'en sortir, Kim. Toi et moi contre le reste du monde.

J'acquiesce avec un petit sourire. Il détourne la tête pour observer, Dix Mille ainsi que le tatouage que je suis sur le point de terminer.

— Il est encore plus joli que le mien, souffle-t-il.

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