Chapitre 8

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*Kimiko*

« Je m'étale au sol lorsqu'on me pousse. Mon dos frappe la roche et je perds connaissance.

C'est la voix étouffée de Dix Mille qui me réveille. Mais elle est comme un écho au loin, j'ai du mal à ouvrir les yeux et à respirer. D'une main tremblante, j'essuie le sang qui coule de ma lèvre supérieure ou de mon nez, ou des deux. Je tousse. La douleur se répand dans mes côtes ainsi que le long de l'arête de mon nez et se diffuse dans mon crâne. Je grince des dents tout en serrant mes flancs. Combien de côtes m'avaient-ils cassées ?

Je me raidis quand je sentis des doigts caresser mes cheveux.

— Bois un peu.

Dix Mille approcha un bol de ma bouche tandis qu'il relève doucement ma tête. J'avale le liquide avant de vomir le maigre repas constitué de pain trempé dans de l'eau qu'ils nous avaient donné.

— Tu es le prochain, l'informé-je.

— Ne t'inquiète pas pour moi, chuchote-t-il.

Je ferme un instant les paupières et mon esprit dérive vers le visage de mes parents et de ma sœur.

— Dix Mille ?

— Oui.

— Parle-moi. Ne me laisse pas m'endormir.

Il m'enjambe afin de passer ses bras sous mes aisselles pour m'aider à m'adosser contre le mur. J'entendis la fermeture éclair de sa veste. Il se penche sur moi et m'enroule dedans. Je venais d'être torturé durant des heures et la chaleur du vêtement m'apaisa un peu.

— J'aime lire et je dessine à mes heures perdu, annonce-t-il en s'asseyant à ma gauche.

Paupières closes, je m'imprègne de sa voix. J'aime son timbre et son accent britannique.

— Un point commun, avoué-je en crachant du sang.

Je me tourne vers lui, mais je n'arrive qu'à distinguer ses formes.

— Notre chef nous a tatoué un de mes dessins pour marquer cette nouvelle mission. J'ai adoré le tatouer à mon tour.

— Vous avez un dermographe ?

Je souris, mais la douleur me fait vomir.

— Il l'a volé à son ex-femme qui s'est barrée avec le voisin.

Il rigole malgré lui.

— C'est quoi comme motif ?

— Un faucon.

— L'oiseau le plus rapide au monde, chuchote-t-il.

J'acquiesce.

— Me tatoueras-tu si on s'en sort vivant ?

— Si on sort de ce merdier, j'en serai ravie.

Je lui tends mon poing qu'il frappe doucement.

— Tu as quelqu'un qui t'attend ? me demande-t-il.

Je renifle, essuie mon nez qui a arrêté de pisser du sang puis réponds :

— On doit se marier à mon retour de mission.

— T'es un type bien Treize.

Je tente un sourire, soulagée qu'il n'ait pas remarqué que je suis une femme. Quinze jours que j'étais enfermée, quinze jours que je priais pour que personnes ne le découvre. »

J'ouvre difficilement un œil, aveuglée par la luminosité qui traverse mon salon. Mon estomac manque de rendre tout l'alcool que j'ai ingurgité. Je pivote sur le dos et entends la respiration de ma sœur qui dort à l'autre bout du canapé. Nauséeuse, j'aperçois un cachet de paracétamol à côté d'un verre d'eau sur la table basse.

— Comment j'ai atterri là ? baragouiné-je en attrapant le verre que je porte à mes lèvres.

— Ton mec t'a emmené à l'hôpital et nous t'avons ramené chez toi, ronchonne-t-elle en s'étirant.

Je m'étouffer et tourne la tête vers elle, le front plisser.

— Mon mec ? Je n'ai pas de mec.

— Mattys Jonson.

Mon cœur rate un battement. Quand et comment Matt a pu appeler Marie ? Je déglutis sous les yeux inquisiteurs de Marie.

— Pourquoi tu ne m'as jamais parlé de lui ?

Je me renfrogne et m'affale contre le dossier du canapé.

— Il n'y a rien à dire.

Elle se redresse puis saisit mon visage. Je grimace quand ses ongles griffent ma peau.

— Alors, explique-moi pourquoi il arrive à t'approcher !

Elle pose sa main sur mon avant-bras d'un air de défis, mais je me dégage quand la brûlure devient insupportable. Je sais que ça lui fait du mal de ne pas pouvoir me toucher ni m'aider.

— J'étais bourré.

— Non Kim, à la façon dont il te regarde, ce n'était pas la première fois. J'espère qu'il embrasse bien au moins ?

Mes joues s'échauffent.

— Tu ne dois pas aller travailler ? sifflé-je.

Elle m'envoie un coussin en pleine tête avant de se lever pour se diriger vers la cuisine.

— Pourquoi vous m'avez abandonné sur le canapé ? maugréé-je. J'ai le dos en vrac.

— T'as refusé qu'il te monte dans ta chambre et je n'avais aucune envie de te laisser seule. Donc on est deux à ne plus avoir de lombaires.

— Et Jess ?

— Elle est en colère.

Marie me jette un coup d'œil avant de renchérir :

— Très en colère.

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