Chapitre 27

2 2 0
                                    

*Matys*

En entrant dans la voiture, Kim est déjà installée sur le siège passager, la tête tournée en direction de la fenêtre. Je respecte son silence, alors je récupère les clefs qu'elle a laissées à côté du levier de vitesse et mets en route le moteur.

Quand nous arrivons dans son allée, je suis soulagée de me garer, car son mutisme est pesant. Elle détache sa ceinture et sort en claquant la portière. Je reste un instant à l'observer monter les trois marches qui l'emmènent à son porche. Je souffle un coup et me décide à la rejoindre. Lorsque je rentre à mon tour, elle m'invite à m'asseoir sur le canapé. Ne voulant pas la brusquer, je m'exécute.

Elle entre dans la cuisine, ouvre le congélateur, saisit une poche de glace. Avec délicatesse, Kim l'applique sur mes phalanges endolories. Elle s'éclipse de nouveau et je l'entends grimper à l'étage. Elle revient dix minutes plus tard, vêtue d'un long tee-shirt et d'un short large, les cheveux dégoulinant sur le tissu. Son gel douche sucré est enivrant.

Dans un silence de plomb, elle dépose une boite à pharmacie et s'attèle à nettoyer les plaies causées par la violence du coup que j'ai porté à mon beau-frère. Sur son magnifique visage, je peux lire tout un tas d'émotion : de la colère, de la honte, mais surtout de la tristesse. Je soulève son menton et ses yeux humides s'arriment aux miens.

— Parle-moi, murmuré-je.

Elle ne peut retenir ses larmes qui dévalent le long de ses joues. Avec une infinie douceur, je lui attrape le poignet et la tire à moi. Sans protester, Kimiko m'enjambe et se blottit contre mon torse.

— Est-ce que tu vois tout ça en moi ? murmure-t-elle dans un soubresaut.

— De quoi tu parles ?

— Une coquille vide, sans âmes. Un monstre aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur. Est-ce que tu me vois comme ça ?

Mon cœur s'emballe, comment peut-elle penser ça ? Je resserre mes bras autour de son corps et l'embrasse sur la tempe.

— Bien sûr que non, Kimiko.

Elle se redresse, essuie ses larmes et me dévisage dans une grimace de douleur.

— Je me vois exactement comme il m'a décrite. J'ai...

Ma bouche s'écrase contre la sienne pour la faire taire.

— Kimiko, tu n'es pas un monstre.

— Je t'en supplie, répare-moi, hoquète-t-elle.

Mes doigts caressent sa joue et elle se laisse aller à ce contact.

— Je ne veux plus de ça, renchérit-elle. Prends-moi comme modèle pour ton concours et guéris-moi.

— Je ne peux que les camoufler. Tes cicatrices seront toujours présentes, elles font partie de toi. Il te suffit de les accepter, de te pardonner.

Un sanglot franchit ses lèvres que j'emprisonne des miennes.

— Par contre, si tu m'autorises, je peux soigner celle-là, lui assurai-je en posant mon index sur son cœur.

En se reculant, ses mains glissent sous mon tee-shirt. Ma peau frissonne à son touché. Lentement, elle remonte le long de mes côtes puis passe mon haut par-dessus ma tête. Je me sens étrange sous son regard lascif. Je ne sais pas quelle attitude adopter. Partagé entre mon envie de la réconforter et l'excitation qui née dans mon bas ventre, je la laisse explorer, tracer et caresser les lignes noires qui recouvrent mes propres balafres.

— Suis-moi, murmure-t-elle en se relevant.

Kim enlace ses doigts dans les miens et me conduit à l'étage. Elle m'entraîne jusqu'à une pièce à côté de sa chambre. Quand elle l'ouvre, l'odeur d'acrylique m'agresse les narines. Au moment où elle allume, je suis attiré par le mur qu'elle a peint. Le rapace est un peu différent de celui tatoué sur notre peau. Plus droit, plus fière, plus abimé aussi. Il porte le poids du monde sur ses épaules. Les couleurs sont flamboyantes comme si le faucon était dos à un brasier.

Falcon-Ink TherapyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant