Control Me

Chapitre 16 : Unity

En me réveillant ce matin, je n'ose pas descendre les escaliers pour rejoindre la cuisine. J'entends des voix masculines : tous les membres de la fraternité sont réunis, dont Kurt.

Hier soir, abandonnée aux bras de Kurt, j'ai perdu le contrôle sur mon corps et sur moi-même. Certes, ce n'était qu'un baiser, mais suite à ses lèvres posées sur les miennes, j'ai voulu plus. Et j'ai eu peur. C'est pour quoi je m'étais dégagée de son emprise pour rejoindre Shirley en bas. Et même en dansant avec Shirley, je ressentais encore ses lèvres aigris aux miennes.

C'est insupportable.

Il n'y avait qu'avec Jackson que je ressentais ces émotions. Rien ne doit changer. Après tout ce qu'il s'est passé, je lui dois au moins ça.

Je gémis quand la jambe de Shirley s'échoue sur la mienne.

Mon amie étant complètement saoule hier, je l'ai fait dormir avec moi. J'ai presque regretté ce geste dès qu'elle a commencé à s'étendre dans n'importe quelle position : les pieds sur mon ventre, la tête sur mes fesses aussi, et pour couronner le tout, les mains agrippées à ma tête.

J'ai cru que j'allais la jeter par la fenêtre.

En tournant la tête vers elle, je m'aperçois que cette idiote sourit de toutes ses dents. Elle grimace quand je l'incendie du regard.

‑ Laisse moi deviner, j'ai eu un sommeil agité ?

‑ Ouais, souffle-je lourdement.

Elle enlève sa jambe contre la mienne pour s'allonger à plat ventre, la tête sur le côté, dans ma direction.

‑ Ça m'arrive souvent quand je suis bourrée. Désolée.

Je me souviens très bien de cette fois-là où je m'étais retrouvée dans le lit de Kurt parce qu'elle s'était allongée en étoile.

Je repense inévitablement à son ex. Et si son subconscient lui interdisait de dormir avec quelqu'un ? Elle ne m'a pas raconté dans les détails comment il avait réussi à prendre ces photos, mais il avait sûrement profité de son sommeil.

Comme si Shirley devinait ce que je pensais, elle saute du lit en baillant lourdement.

‑ Allez, on va petit déjeuner !

J'aurais aimé lui demander si on pouvait rester ici le temps que les garçons terminent de manger, mais je devrais alors lui expliquer pourquoi et je n'en ai pas envie. C'est étrange, mais j'ai envie de garder ce moment entre Kurte et moi, secret...

Nous passons toutes les deux par la salle de bain pour laver nos visages et lorsqu'elle s'apprête  à quitter la chambre, je la retiens en attrapant son bras. Elle me lance un regard incrédule.

‑ Regarde toi.

Elle baisse la tête et sa bouche forme un "o" suivi d'un rire. Je roule des yeux.

‑ C'est mieux de sortir avec des vêtements, effectivement, dit-elle en se servant dans mon armoire.

Une fois habillée, on descend les escaliers où des gobelets trainent un peu partout sur les marches ; il y en a même dans le hall.

Nous rejoignons les garçons dans la salle à manger ouverte au salon ; des boissons de la veille traînent encore sur la table basse et sur les canapés contrairement à la grande table où nous mangeons qui, elle, est pleine de bonne nourriture.

Pour le plus grand plaisir de Shirley, tous les mecs sont torse nu. Je roule des yeux en m'asseyant à table ; cette fille est exaspérante.

Je fais mon maximum pour éviter de croiser le regard jouissif de Kurt, mais étant tous les deux aux deux extrémités de la table, c'est compliqué. Surtout quand ce dernier dévore sa baguette sans me quitter des yeux.

Je fais donc exprès de discuter avec Zack pour me changer les idées. Le jumeau m'explique qu'un jour, il a défoncé tout le monde dans un match de water-polo et à quel point il était fier de lui. Malheureusement pour lui, je ne partage pas son enthousiasme. Pour être franche, je n'en ai rien à foutre des matchs qu'il a gagnés, je veux simplement que Kurt arrête de me regarder. Et quand je tente un regard dans sa direction, je le regrette immédiatement. Il ne m'a toujours pas quitté des yeux. Ses pupilles vertes me dévorent et je crois que les miennes dévorent également son torse magnifiquement sculpté.

Je regrette qu'il soit assis et que je ne puisse pas le détailler entièrement, ni même le caresser. J'ai envie de me frapper pour cette pensée plus que déplacée. D'abord le rêve, maintenant le baiser, et puis encore, on ne va quand même pas coucher ensemble. C'est hors de question.

Perdre le contrôle ? Jamais.

Il finit par détourner les yeux lorsque Shirley engage la conversation. Il ne semble pas enthousiaste mais ça ne décourage pas la blonde à blablater. Je m'étonne à apercevoir un petit sourire en coin sur les lèvres pleines de Kurt. Il ne s'agit pas d'un sourire charmeur, c'est un sourire amical. Je me retiens de sourire en l'apercevant aussi... lui-même et détendu. Qu'est-ce qu'il me prend à la fin ?

Zack reprend quelques secondes après sa conversation passionnante sur ses recors de water polo et je fais semblant de l'écouter en acquiesçant tout en buvant mon café. Une trentaine de minutes plus tard, ayant fini de manger, j'emporte ma vaisselle sale en me dirigeant dans la cuisine. Je souris à Brett qui charge le lave vaisselle.

‑ Salut. T'as bien dormi ?

‑ Vu ta tête, mieux que toi en tout cas.

Il rit à ma plaisanterie et après avoir mis ma tasse et mon couteau dans la machine, je décide de l'aider à remplir le reste. Il me remercie gentiment mais je sens que quelque chose le tracasse. Il me lance des regards furtifs dès que j'ai le dos tourné.

‑ Bon, Brett, soufflé-je en me calant contre le plan de travail. Dis-moi ce qui se passe.

‑ Euh... Rien du tout, pourquoi ? rit-il nerveusement en adoptant la même attitude que moi.

Je croise les bras contre ma poitrine.

Il capitule.

‑ Je me demandais simplement si tu avais porté plainte pour la vandalisation ?

Je me force à ne pas dévier le regard, il ne doit surtout pas savoir que je n'ai jamais porté plainte. Je ne veux pas qu'il s'en mêle. Ça pourrait le mettre en danger.

‑ Bien sûr. Pourquoi ?

L'un des Requins entre dans la pièce tout joyeux, comparé à nous deux qui sommes sérieux. Il hausse les sourcils face à notre visage beaucoup moins enjoué que d'habitude et déguerpit après avoir attrapé une baguette sur l'ilôt central.

‑ Ça fait déjà un petit moment que ça dure et on n'a toujours pas de nouvelle.

J'avais fait quelques recherches d'appartement récemment, mais ils étaient tous hors de prix. A ce moment de l'année, les locations les moins chères sont déjà prises. Je me retiens de m'effondrer devant lui ; je déteste montrer mes faiblesses, et il ne faut surtout pas qu'il se doute de quelque chose.

‑ Oui, ils m'ont dit que ça allait prendre un peu de temps à cause du manque de piste, mais je peux toujours trouver une autre fraternité ou un appartement si ça devient trop compliqué pour vous.

‑ Non, non, non ! Tu ne nous déranges pas, dit-il en s'approchant. Je m'inquiétais simplement.

Il me prend gentiment dans ses bras. Cette proximité me fait du bien. Elle me rassure dans mon monde incertain.

***

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