MIKO.A

XIII

Le lendemain, je suis réveillée par un appel téléphonique de la deuxième vers qui mes pensées se tournaient la veille.

- Tu n'imagines pas comme je suis contente de t'avoir au téléphone !

- Et bien, tu es brûlante d'enthousiasme, tu aurais dû m'appeler.

- Tu sais bien que je n'ose pas, je préfère que tu profites.

- Pfff... Alors dis-moi tout !

Je commence à lui parler de tout ce qu'il s'est passé au cours de ses dernières semaines en terminant par les nouveaux sentiments que je ressens. Je lui explique qu'au vu des discussions que nous avons déjà eu, je ne comprends pas ce qu'il m'arrive.

- Je pense que je ne t'ai pas correctement expliqué ce qu'est l'asexualité. Déjà, c'est un terme assez large. Je pense qu'il te concerne toujours malgré tout ce que tu m'as raconté.

- Ah bon, mais je croyais que ça voulait dire qu'on ne ressentait aucune attirance, donc on n'est pas censé aimer.

- C'est vrai pour certaines personnes, mais tu peux aussi aimer sans vouloir de relation intime par exemple. J'avoue que comme ça ne me concerne pas, je ne pourrais pas t'expliquer toutes les variations qu'il y a dans ce mot, mais si tu regardes sur internet, tu auras plein de témoignage.

Je hoche la tête comme si elle pouvait me voir.

- En tout cas, tu devrais te laisser porter. L'expérience t'aidera à comprendre ce que tu ressens. Tu découvriras ce que tu apprécies ou pas en expérimentant, si tu aimes les bisous, les câlins, les moments plus intimes, c'est d'ailleurs ce qui sera le plus compliqué pour toi je pense. Mais si c'est quelqu'un de bien, il comprendra, hésite pas à lui en parler si vous commencez vraiment une relation.

- Merci, j'y vois un peu plus clair.

- Sinon, comme je sais que tu seras pas là pour ton anniversaire, j'ai envoyé ton cadeau plus tôt. Tu l'as reçu ?

- J'ai pas été voir le courrier depuis plusieurs jours.

- Va voir. Je veux qu'on soit au téléphone quand tu l'ouvres, c'est pour ça que je t'ai appelé, dit-elle avec enthousiasme.

Toujours en pyjama, je file dehors. Il fait un peu frais, mais ça reste surportable sachant que je ne porte qu'un shorty et un débardeur. En ouvrant la boîte aux lettres, il y a plusieurs lettres mais surtout un petit colis. Je dépose celui-ci sur la table de la salle à manger. Je reprends mon téléphone et allume ma caméra pour qu'elle puisse voir l'ouverture en direct.

- Ah, si tu te balades comme ça devant lui, il resistera jamais.

- Je croyais qu'on avait changé de sujet, en plus tu crois que j'entends pas tes sous-entendues, espèce de vicieuse.

- Il faut bien te détendre un peu, rit-elle.

Je soupire et commence à découper l'adhésif du carton à l'aide d'un couteau. J'écarte le papier de soi pour découvrir le contenu du colis. Il y a un maillot de bain blanc avec un effet dentelle, très jolie. Mais il y a aussi un mug en damier aux finitions dorés avec personnage d'animation au cheveux gris avec un robot aspirateur avec la couleur des détails. La référence me fait sourire, c'est une série que j'avais beaucoup aimée. Enfin, il y a une mignonne petite robe blanche, dans le même style que le maillot de bain.

- Alors ? Ça te plaît ?

- Tu me connais trop bien. J'aime beaucoup ! En plus, ça arrive à point nommé, je n'oublierais pas de le mettre dans ma valise.

- Je suis contente, tu pars dans les îles, il te fallait bien ça.

Notre conversation téléphonique ne s'arrête pas après l'ouverture du colis. Au contraire, nous continuons de discuter de tout et de rien. Comme, nous ne sommes pas dans le même pays, on évite de s'envoyer trop de messages. Mais il faut croire qu'il était temps qu'on puisse se parler. On a trop de choses à se dire.

Les fous-rires s'enchaînent quand elle me parle de ses nombreuses histoires d'été. Il semble que ce soit toujours plus facile avec les italiens selon ses dires. Elle respire tellement la joie de vivre que je suis persuadée que dans n'importe quel pays, elle ne laisserait personne indifférent. Je suis toujours surprise par notre amitié, nous sommes vraiment opposées en tout point. Mais je ne veux pas que ça change.

Cette discussion m'a redonné le peu d'énergie qu'il me manquait. J'annonce à Mikoa qui vient de me rejoindre pendant que je prépare le déjeuner que j'accepte la proposition. Finalement, vivre dans un somptueux appartement au sommet du siège d'une entreprise me plaît bien. J'espère juste qu'aucun problème ne se posera à l'avenir. Mais Emily a raison, si je n'essaie pas, je ne pourrais pas savoir.

- C'est super, je vais pouvoir aller le prévenir.

- Tu t'en vas à nouveau ?

- Non, je peux consacrer mes ressources à deux discussions. Ce matin, je me divisai entre la supervision de ton hologramme et l'ajustement du monde virtuel.

- Ah oui.

- Tu pourras le tester dans peu de temps.

- Je suis très curieuse de découvrir comment tu perçois l'univers en tant qu'hologramme.

- Voilà, il est très content. Il m'a demandé de tout organiser pour la décoration et l'ameublement de l'appartement pour qu'on le fasse selon tes goûts.

- C'est vraiment gentil de sa part, du coup tu vas devenir ma petite décoratrice d'intérieur.

- Justement.

Un petit amas de pixels apparaît dans ses mains prenant doucement la forme d'un carnet électronique. Elle est vraiment mignonne, je pense qu'elle s'amuse à imiter l'humanité.

- Tu sais si tu veux vraiment faire comme les humains, il va falloir te créer une vrai garde-robe.

- Très bien, mais pour l'instant, je veux savoir ce que tu imagines. D'ailleurs, j'ai des photos et des plans à te présenter pour que tu puisses te projeter.

À l'aide de l'épingle à cheveux, elle me présente des images. Le fait de voir l'appartement jumeau de celui de James me rappelle la taille du sien. Finalement, ce n'était pas qu'une impression, il est vraiment immense.

- Je pense que je vais avoir besoin de réfléchir. Je n'aurais jamais pensé pouvoir partir d'une page blanche.

- On devrait regarder des inspirations sur internet ou dans les magazines. Mange et rejoins-moi tout à l'heure, on doit explorer internet. J'aimerai utiliser l'épingle mais elle aura besoin d'une mise à jour pour ne t'envoyer, ne serait-ce qu'en partie, dans le monde virtuel. Tu y as accès, mais uniquement en surface pour le moment. Je pense que ce sera la prochaine chose sur laquelle on travaillera.

- Ne t'en fais pas, le casque me va très bien. En plus, entre la décoration de ma chambre et celle du monde virtuel, ça devrait pouvoir m'inspirer aussi.

- Oui. En fait, à long terme, tu n'auras plus besoin du casque. Tu pourras passer du virtuel au réel grâce à l'épingle dans un lapse de temps très court, mais aussi partiellement.

- Tu veux dire que je pourrais faire comme toi, à deux endroits à la fois ?

- Oui, tu en as les ressources selon mes analyses.

- Tu m'intrigues beaucoup. Vous ne cesserez jamais de me surprendre et de me faire des cadeaux au passage.

- Tu le mérites, sachant qu'en tant qu'expérimentateur à haute performance, à long terme, la technologie pourra être adaptée à de futurs clients. Autrement dit, tu contribues à notre future rentabilité. Il y a aussi des choses que je n'ai pas encore le droit de te dire, mais il ne ment pas en disant que tu es aussi importante que moi.

- Ok, je te crois. Mangeons !

Décidément, il m'estime beaucoup, sans doute trop.

Nous passons l'après-midi sur des sites pour trouver des inspirations pour l'appartement. On fini par choisir des tons beiges, roses pâles, et blancs pour la pièce de vie, avec des matières plutôt marbrées et boisées pour le mobilier, avec des formes arrondis. Cette pièce devrait être très lumineuse. L'idée devrait se retrouver dans la salle de bain. La chambre aura les mêmes tons et les mêmes formes la journée, et la nuit elle prendra l'ambiance du bureau, c'est-à-dire avec des néons donnant des couleurs assez vives. En revanche, le style du bureau sera très différent, plus industriel, avec du métal, et des tons assez sombres, avec une faible touche de lumière pour la journée. Le dressing restera très neutres avec des tons clairs et des meubles en bois clairs également.