MIKO.A

XXXVI

Le lendemain, je prends le train pour retourner chez mes parents. J'ai besoin de m'éloigner un peu. J'ai l'impression que si je sors, je serais forcément agressée.

Je n'ai pas besoin d'être au siège pour travailler, donc une semaine dans la maison de mon enfance devrait me faire du bien sans me mettre en difficulté. De plus, mon père sera là lundi. Ce sera l'occasion de le revoir après tout ce temps.

J'ai un peu peur à l'idée de me retrouver seule à nouveau car James ne pouvait pas me suivre sans s'organiser préalablement. Mais il y a toujours ma petite intelligence artificielle à mes côtés.

Après quelques heures, le train s'arrête dans la gare de ma ville natale. Tandis que je rejoins l'arrêt de bus, je m'assure d'avoir toujours des personnes à proximité. Espérant qu'elles auront un effet disuasif. En approchant de mon quartier résidentiel, c'est un peu plus complexe, donc je me dépêche, oubliant que je risque de le regretter si je force trop. Je pense que mon kinésithérapeute ne va pas être content quand on se reverra à mon retour.

En arrivant à la maison, je fouille les placards à la recherche de nourriture, mais il ne reste quelques sachets de pâtes. Autrement dit, il n'y a pas de quoi faire la semaine. J'hésite à aller faire des courses, mais après être rester observer la rue pendant plusieurs minutes, je me rends compte que je ne pense pas être capable de sortir seule. Heureusement, on peut se faire livrer les courses à domicile. Je commande quelques produits frais, qui seront livrés en fin d'après-midi.

Je fini sur le canapé à regarder la télévision tout en consultant les réseaux sociaux. J'ai fait le choix de ne pas évoquer le fait d'être retourner chez mes parents pour ne pas me montrer faible face à Cyberleads. Je n'aime pas l'idée qu'il puisse être le vainqueur, ou même se l'imaginer.

Une fois livrée, je lance un stream sur un jeu de survie qui semble prometteur. Mais au final, ce dernier est décevant. Mais j'ai tout de même passé un bon moment en discutant avec ma communauté. Ils sont doués pour me changer les idées. Sauf que ça ne reste pas quand je les quitte. Même si je n'ai pas faim, je songe aux faits que je ne me suis pas fait livrer à domicile pour ne rien manger après. Surtout que je n'ai pas rempli mon estomac depuis la veille.

Malgré mes efforts, la moitié de mon assiette se retrouve dans le réfrigérateur. Je rejoins mon lit dans l'espoir de laisser les évènements de la veille derrière moi, mais je suis incapable de trouver le sommeil. Il est deux heures du matin quand je file dans le monde virtuel, me libérant de ces mauvaises expériences.

Je me sens mieux. Au cœur de ma ville favorite, une mélodie me vient assez naturellement. Puis, des paroles. Me laissant porter par celles-ci, je commence à chanter. Doucement, les gens s'arrêtent et se rapprochent pour m'écouter. Malgré mon capuchon, ils reconnaissent ma voix. Puis, dans la foule, je reconnais un avatar. Il me donne le sourire. À la fin de ce petit concert improvisé, et enregistré par Mikoa pour le partager sur mon profil, je cours vers lui. Il m'ouvre ces bras dans lesquels je me blottis. Il me manque déjà alors que cela ne fait pas vingt quatre heures que l'on est séparé.

– Tu as écrit une nouvelle chanson ?

– On va plutôt dire que mon insomnie est inspirante. Il faut que je la travaille un peu.

– En tout cas, elle est magnifique. Ce style plus doux te va vraiment bien, tu devrais chanter plus souvent comme ça.

– Merci, je vais y songer. Qu'est-ce que tu fais là ?

– Tu as communiqué ton agitation, et puis tu t'es apaisée. J'ai compris que tu étais venue ici. Il m'a suffit de suivre la mélodie, et ensuite ta voix. Pour mon plus grand bonheur.