chapitre 39

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Lewy

Mon téléphone sonne pour la cinquième fois, toujours la même personne ; Wade. Pourtant il sait très bien que quand je suis dans ma maison, c'est pour me couper du monde entier. Je sais que louper deux jours de cours consécutifs ne me ressemble pas, il doit surement se poser des questions, mais tant pis.

Je mets mon téléphone en mode avion comme un connard et me lève pour fermer les volets du chalet.

Cette maison est le meilleur endroit pour se vider la tête. C'est simple, c'est dans les campagnes un peu éloignée de Los Angeles, il n'y a aucun bruit et aucun humain. Juste un lac et des arbres pour seuls compagnons.

Quoi de mieux ?

Rien.

Mes parents ont cette maison depuis plus de trente ans, bien avant ma naissance. On passait toute nos vacances ici, en famille. Mais il faut dire que cette maison est devenue la détentrice de souvenirs douloureux que mes parents préfèreraient oublier, alors ils ne viennent plus. Je suis le seul qui y passe encore du temps. Certes les souvenirs affluent, les photos n'aident pas non plus, mais c'est mon deuxième havre de paix.

La nuit tombe et je sais ce qui m'attend ce soir, mon télescope est déjà en place sur le ponton du lac, avec des coussins et mon appareil photo. Je me fais à manger rapidement, avant de passer ma nuit avec les étoiles pour le troisième soir consécutifs. Ce sont les meilleurs moments de vie.

C'est une fois que la nuit est noire et que les étoiles sont là que j'attrape une veste et sors pour rejoindre le ponton. Je suis entouré de nature, l'odeur des arbres et des feuilles m'aident à me sentir encore plus détendu. Cela m'aide à calmer les tempêtes en moi qui ne veulent pas se dissiper en ce moment.

Je mets mon casque et lance ma playlist, puis règle mon télescope.

Je prends le temps d'admirer les étoiles qui sont bien visible ce soir, même à l'œil nue. Les souvenirs me submergent lentement au-dessous de ces vagues illuminées. J'ai passé la plupart de mon temps ici, avec Lyviee. Je nous revoie sauter dans le lac, hiver comme été, ou du moins elle me poussait sans mon consentement dans l'eau gelée. C'est aussi la seule et unique personne avec qui j'observais l'Univers. Elle n'y comprenait rien, et finissait toujours pas faire autre chose car je cite « on s'ennuie à en mourir », mais elle restait avec moi juste pour me tenir compagnie. Ça m'est déjà arriver de la porter jusqu'à la maison car elle s'endormait à même le ponton, morte de fatigue.

C'est l'effet de cette maison, elle me ramène aux moments de ma vie ou tout allait pour le mieux, ou je n'étais pas cette épave mentale que je suis devenue.

A une époque où mon père me considérait encore comme un fils, qu'il m'aimait toujours. Car la haine a seulement remplacé la tristesse, l'habitude aussi, mais chaque jour ça me tue d'avoir perdu mon père alors qu'il est toujours là. J'aurais beau me rassurait, en me disant que je le déteste, au fond, mon cœur connait la vérité. Je le déteste de me détester, car moi, mon père me manque, car je l'aime toujours.

Voir le dégout que mon père a pour moi est ma punition, et c'est surement la pire.

J'avance mon télescope vers moi et je mets mon œil à l'oculaire, je règle les derniers réglages pour ajuster les grossissements, et mon cerveau se met sur pause, enfin. J'observe déjà la grande ourse, ou encore l'étoile Grenat et la ceinture d'Orion. Rien que ça suffit à m'apaiser, alors que je connais ce ciel presque par cœur. On ne se lasse jamais de ce qu'on aime, je suppose.

Assis face au lac, sous les étoiles avec mon casque sur les oreilles restera toujours mon moment favori, rien de mieux que de se retrouver seul avec la nature et l'Univers.

ESTRELLA - BRAHMAN PARADISEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant